Mercredi 7 janvier 2015, les frères Kouachi ont pris d'assaut les locaux de Charlie Hebdo. En tout, 12 personnes, dont deux policiers, ont été abattues. À la suite de cette attaque terroriste, les deux hommes ont débuté une cavale de 50 heures qui est passée par l'Aisne et l'Oise, avant de se terminer aux portes de la Picardie.
Il y a dix ans, jour pour jour, mercredi 7 janvier 2015, les frères Kouachi, lourdement armés, pénétraient dans les locaux de la rédaction de Charlie Hebdo à Paris. Douze personnes, dont deux policiers, étaient tuées.
À la suite de cet attentat terroriste, les deux hommes ont pris la fuite et un dispositif opérationnel a été mis en place.
Saïd et Chérif Kouachi se sont lancés dans une longue fuite de près de 72 heures. Une course folle qui est passée par l'Aisne et l'Oise avant de s'achever à Dammartin-en-Goële, en Seine-Maritime. Retour sur 50 heures de traque.
Une station-service braquée
Jeudi 8 janvier, Saïd et Chérif Kouachi sont les hommes les plus recherchés de France et, à ce moment-là, considérés comme suspects principaux de l'attentat qui a coûté la vie à 12 personnes à Paris. Pour échapper aux forces de l'ordre, les deux suspects investissement l'appartement d'un des deux frères à Reims (Marne) avant de se réfugier dans le département limitrophe, l'Aisne.
À 9h30, armés de fusils d'assaut, ils braquent une station-service et menacent trois personnes à Vauciennes, sur la RN2, à proximité de Villers-Cotterêts. Les deux hommes repartent avec des sacs remplis de gâteaux et de bouteilles d'eau. Les frères, à visage découvert, sont formellement identifiés par le gérant. Les vidéos surveillance confirmeront ses dires.
Le plan Épervier renforcé est déclenché sur tous les axes en direction de la région parisienne à 40 km autour de l'endroit où les terroristes ont été repérés. Tous les carrefours du département de l'Aisne sont contrôlés. Francis Maillard, correspondant pour France 3 Picardie, raconte à midi lors du JT 12/13 : "il y a de nombreuses voitures de gendarmerie qui sont là, en plus d'un véhicule du laboratoire scientifique qui est arrivé il y a environ un quart d'heures. Je viens d'arriver à Villers-Cotterêts, il y a de nombreuses patrouilles qui tournent dans la ville".
À cet instant, "il est difficile d'en savoir plus". Le substitut du procureur est d'ailleurs venu voir les journalistes pour leur demander d'en dire le moins possible, afin de ne pas entraver l'avancée des recherches. Tout ce qu'il peut affirmer, c'est que "quelque chose de très lourd s'est passé dans cette station-service, qui est actuellement fermée au public".
Villers-Cotterêts et ses alentours, inspectés de fond en comble
Dans l'après-midi, les villages de Longpont et Corcy, autour de Villers-Cotterêts, sont passés au peigne fin. La forêt de Retz aussi. Les hommes du raid inspectent chaque maison à la recherche des terroristes signalés dans les environs. "Ils sont passés chez nous, ils ont visité le sous-sol, raconte un habitant de Corcy. Ils nous ont demandé si on avait vu quelque chose de suspect, bon en fait on n’a rien vu, mais ils ont contrôlé quand même et ils ont contrôlé toutes les maisons dans la rue". L'ensemble du secteur est quadrillé et certaines routes sont barrées.
Toute la journée, les forces de l'ordre sont sur le qui-vive. Des hélicoptères sont déployés, prêt à appréhender tout individu suspect. Les riverains, auxquels la prudence est conseillée, sont incrédules : "on m'a gentiment dit de partir, de faire demi-tour", explique un conducteur avant de souligner : "ils bouclent le secteur, ils sont avec les fusils à pompe, les fusils-mitrailleurs et on ne peut pas rentrer".
Le soir, les recherches et moyens des forces de l'ordre se concentrent notamment à Longpont, avec d'un côté le raid, et de l'autre le GIGN. Mais, vers 22 heures finalement, les forces spéciales d'intervention de la police se replient.
Une automobiliste braquée dans l'Oise
Vendredi 9 janvier, vers 9 heures du matin, les forces de l'ordre, les véhicules et les hélicoptères quittent le secteur en urgence car la piste se précise : une automobiliste vient d'être braquée à Montagny-Sainte-Felicité, dans l'Oise. La femme, comptable de profession, voit "deux formes arriver sur la route" avec des gilets pare-balles et des mitraillettes.
Elle pense au départ qu'il s'agit de gendarmes à la recherche des deux terroristes. "Ils pointaient sur ma voiture, donc je me suis arrêtée, raconte-t-elle. Ils m'ont dit : on va prendre votre voiture. Mais ils étaient calmes, ils prenaient leur temps, ils n'étaient pas menaçants, ils voulaient seulement me prendre ma voiture pour continuer leur route".
Les frères Kouachi s'enfuient au volant de sa Peugeot 206 grise et sont finalement localisés vers Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne), commune de 8 000 habitants, frontalière de l'Oise. Sur leur trajet, ils rencontrent des policiers et des coups de feu sont échangés.
Le secteur entier de Dammartin est alors bouclé. De très nombreuses forces de police et de gendarmerie sont sur place et continuent de converger. La presse du monde entier est, de son côté, tenue à distance d'environ 2 km.
Les frères Kouachi sont retranchés avec un otage - un employé - dans une imprimerie située dans une zone industrielle. "Nous avons vu les hélicoptères pumas qui transportent vraisemblablement des forces d'intervention qui faisaient du stationnaire au-dessus de la ville", décrit Rémi Vivenot, journaliste de France 3 Picardie, présent sur place. De nombreuses heures de négociations se lancent alors.
Plusieurs établissements scolaires sont évacués en début d'après-midi. Les habitants sont confinés chez eux et les entreprises environnantes qui ne peuvent être évacuées sont protégées par la gendarmerie.
Assaut lancé aux portes de la Picardie
À 16h50 très exactement, les gendarmes d'élite du GIGN finissent par lancer l'assaut contre Chérif et Saïd Kouachi, retranchés depuis huit heures.
Les deux frères sortent du bâtiment en tirant avec leurs armes sur les forces de l'ordre. Un membre du GIGN est blessé dans l'opération, mais ses jours ne sont pas en danger. Les deux frères finissent par être abattus après 50 heures de traque. L'employé est, de son côté, sain et sauf.
En tout, à 80 km autour de Paris, 88 000 policiers ont été mobilisés pour traquer les fugitifs. Ils disposaient de moyens très modernes pour l'année 2015 (caméras miniatures, sondes thermiques). Ce dispositif exceptionnel était piloté par le directeur général de la gendarmerie et de la Police nationale, sous la houlette du parquet antiterrorisme. L'ordre de donner l'assaut a été donné par François Hollande.