Muhittin Ulug, accusé du meurtre de Julien Videlaine commis en 2014 à Nogent-sur-Oise, ne sera pas jugé par la cour d'assises de l’Oise en ce mois de mars 2022. Le procès a été renvoyé. Explications.
L'annonce de la greffière aux jurés a été sobre : "Le procès est renvoyé". Et pourtant, depuis quelques jours, l'ambiance est tendue au tribunal de Beauvais. Ce jeudi 24 mars, le procès pour meurtre de Muhittin Ulug devait s'ouvrir. L'homme de 42 ans est accusé d'avoir tué Julien Videlaine, le petit ami de sa fille, à Nogent-sur-Oise en 2014. Mais problème : une relation sentimentale entre avocats est venue perturber la tenue du procès.
"On apprend plus la déonto ?"
Me Leïla Djebrouni, avocate de la fille de l'accusé et principal témoin, et Me Pierre Lumbroso, l'un des avocats de la défense, sont mariés. Une relation qui interpelle Me Justine Devred, avocate de la famille de Julien Videlaine. "Mais WTF, on apprend plus la déonto ? Ah pardon, ils ont tous les deux, 30 ans de barre", a-t-elle notamment réagi sur les réseaux sociaux.
La fille de l'accusé modifie ses déclarations
Pour Me Justine Devred, l'avocate de la famille de Julien Videlaine, et Me Franck Berton, l'autre avocat de l'accusé, cette situation pose problème sur deux aspects : la déontologie, d'une part, et la suspicion de conflit d'intérêts, d'autre part.
Lors de ses premières déclarations, la fille de l'accusé avait indiqué que son père, d'origine kurde, n’acceptait pas sa relation avec un homme d’une autre origine. À l'été 2004, alors qu'elle prenait un bain avec son compagnon, son père est intervenu et a assené une vingtaine de coups de couteau à Julien Videlaine. Le jeune homme était décédé à l'arrivée des secours ; Muhittin Ulug avait lui pris la fuite en Turquie. Il a été extradé en 2018 et affirme aujourd'hui qu'il pensait que sa fille se faisait agresser.
Si dans un premier temps, la jeune fille pointait du doigt la responsabilité de son père et s'était portée partie civile, elle est depuis revenue sur certaines déclarations et a le simple statut de témoin. Un changement de discours et de positionnement qui interroge notamment l'avocate de la famille de Julien Videlaine.
"Il y a une indépendance totale entre nous"
Ce jeudi 24 mars, Me Leïla Djebrouni a finalement renoncé à défendre la jeune fille. De son côté, son mari Me Pierre Lumbroso a, lui, indiqué qu'il se maintenait à la défense. Après l'annonce du renvoi et les différentes accusations de ses confrères, il a réagi : "Il y a une indépendance totale entre nous [ma femme et moi]. Pour moi, il n'y a pas de problème déontologique fondamental."
L'accusé doit choisir entre ses 2 avocats
Sur le changement de version de la jeune fille, il défend la chronologie : "Elle est revenue sur ses déclarations alors que mon épouse n'était absolument pas son avocate. Mon épouse n'a fait que de la reconstitution. [...] Tout ça, c'est une mise en scène. Franck Berton n'a jamais préparé le dossier. Il voulait le renvoi, il l'a eu." Le torchon brûle donc aussi entre les deux avocats de la défense, Me Lumbroso et Me Berton. Ce dernier a d'ailleurs indiqué qu'il ne plaiderait pas aux côtés de Me Lumbroso. Dans les prochains mois, l'accusé va devoir faire un choix entre ses avocats.
Officiellement, la présidente de la cour d'assises de l'Oise a usé de son pouvoir discrétionnaire qui lui permet de renvoyer le procès sans donner davantage d'explications. Selon nos informations, le procès pourrait avoir lieu en septembre 2022.