Laurence Rossignol a remis mardi 27 septembre un riche rapport sur l'industrie pornographique en France, fruit de six mois d'enquête réalisée avec quatre autres élues. La sénatrice de l'Oise alerte sur la nécessité de mieux encadrer ce milieu, propice aux violences à l'encontre des femmes.
C'est un rapport "totalement inédit", puisqu'aucune "institution française ne s'est jamais penchée sur l'industrie pornographique". Un texte de 150 pages dressant l'état des lieux des pratiques dans le monde du porno et ses conséquences en France a été présenté à la presse par la sénatrice (PS) de l'Oise et ses homologues Alexandra Borchio-Fontimp (LR, Alpes-Maritimes), Annick Billon (UC, Vendée), Laurence Cohen (PCF, Val-de-Marne), toutes membres de la délégation sénatoriale et transpartisane pour les droits des femmes.
Pendant six mois, les quatre élues ont auditionné des représentants de sites pornographiques, des journalistes, magistrats, chercheurs, militants associatifs et bien sûr des actrices, notamment celles victimes dans les affaires incriminant les sites Jacquie et Michel et French Bukkake. Le rapport présente des constats sinistres, comme la fréquence des viols lors des recrutements des actrices. Laurence Rossignol ne mâche pas ses mots quant à l'objectif de son rapport. "Il faut déstabilise ce système qui repose sur la traite humaine,' assure la sénatrice de l'Oise.
Lorsqu'on travaille sur les droits des femmes, le rapport avec l'industrie pornographique transparaît bien souvent. (...) On ne peut pas lutter contre les violences sexuelles et sexistes et tolérer que ce tsunami qu'est le porno sape nos efforts.
Laurence Rossignolsénatrice (PS) de l'Oise
Un encadrement nécessaire
"Je n'exclue pas l'existence d'un "artisanat" du porno où chacun serait respecté, mais on retrouve très souvent une vision raciste ou homophobe dans ces vidéos, ajoute l'élue isarienne. Par exemple, une vidéo d'une scène lesbienne va bien souvent se conclure par l'arrivée d'un homme. Ça sous-entend qu'une femme lesbienne ne pourra pas se passer d'un homme." Ces messages en filigrane et les pratiques mises en scène "toujours plus trash" participent à perpétuer une vision déformée de la sexualité et ainsi les violences systémiques à l'encontre des femmes.Il est normal d'avoir de la curiosité sexuelle à l'adolescence, mais aujourd'hui le porno a colonisé l'imaginaire des jeunes. La double pénétration, la pénétration anale... Cela ne devrait pas être par ces pratiques qu'on devrait commencer sa sexualité.
Laurence RossignolSénatrice (PS) de l'Oise
23 recommandations
- De mieux former les forces de l'ordre à mieux prendre en compte les témoignages des victimes lors des dépôts de plainte.
- Aux sites et productions de faire preuve de transparence afin de responsabiliser les clients ou spectateurs sur les conditions de tournage.
- D'imposer aux sites de retirer une vidéo en ligne sur la demande d'un acteur ou d'une actrice apparaissant dessus. Aujourd'hui, seul le producteur a la main dessus.
- De mieux réprimer les sites qui proposent des contenus pornographiques accessibles aux mineurs. Aujourd'hui, un tiers des moins de 12 ans a déjà été en contact avec ces contenus et la première exposition peut intervenir dès le primaire.
Le rapport, baptisé "Porno, l'enfer du décor", est désormais accessible en ligne après avoir été présenté au Sénat le 27 septembre. "Nous espérons que le gouvernement saura agir en consultant ce rapport, conclut Laurence Rossignol.