À Compiègne, des agents municipaux et intercommunaux déposent un préavis de grève pour le 31 décembre : "nos demandes ne sont pas extravagantes"

Pour la première fois en presque 40 ans, une grève des agents communaux et intercommunaux aura lieu au sein de la ville de Compiègne. Ce sont les représentants syndicaux UNSA du Centre de supervision intercommunal qui en sont à l'origine. Et les revendications de ce service sont nombreuses.

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La colère gronde chez les agents municipaux et intercommunaux de la ville de Compiègne. Au sein du Centre de supervision intercommunal (CSI), l'UNSA a déposé un préavis de grève pour le 31 décembre 2022. Une première à la mairie de Compiègne depuis les années 1980. 

Ce service, situé à Margny-lès-Compiègne; est unique en son genre. "C'est un dispositif relativement inédit en France, explique Thomas Baillon, représentant UNSA. Celui-ci est constitué de plusieurs communes, les agents travaillent avec un mur de 15 mètres de long sur 39 écrans et plus de 400 caméras fonctionnelles". 

Le Centre de supervision est constitué de 13 agents. "De ces 13 agents, il faut déduire le responsable de service et le technicien qui opère sur la maintenance de l'infrastructure". Sur les 11 opérateurs restants, 7 sont en grève, avec le technicien en plus. En tout, 100% des titulaires sont en grève. Les contractuels n'ont pas été inclus pour leur "éviter toute difficulté de renouvellement de leur CDD". 

Indemnité horaires de travail de nuit, revalorisation des salaires

Le Centre de supervision a plusieurs revendications. Il dénonce les indemnités horaires de travail de nuit "qui sont à hauteur de 17 centimes brut, c'est dérisoire". Thomas Baillon ajoute que "les agents travaillent de 18h à 4 heures du matin, seules 6 heures sont retenues en heure de nuit" ce qui donne une indemnité de travail de nuit de "1,02 euro brut, c'est inadmissible, ça ne nous permet même pas de payer une baguette avec l'inflation !". Pour lui, tout cela "doit être revu tant sur le plan local que gouvernemental". 

Autre point de discorde : les indemnités de travail des jours fériés et dimanche. "Cette indemnité est à hauteur de 74 centimes d'euro par heure de travail". Pour un agent qui travaille sur une vacation de 10 heures, il ne percevra que 7,40 euros brut. 

Une demande de revalorisation des salaires a également été formulée. "Les régimes indemnitaires au CSI sont disparates : ils ne sont pas alloués à certains agents, d'autres ont un régime indemnitaire très bas ou plus importants". Pourtant, l'ensemble des agents réalisent les mêmes missions et travaillent dans le même sens. "On travaille main dans la main, il n'y a pas de division chez nous, je pense que c'est ce qui les dérange.

On veut une justice sociale : on a une inflation galopante et, dans la fonction publique territoriale, nous sommes les fonctionnaires les moins bien payés. Les agents territoriaux commencent au SMIC. Il faut revaloriser les salaires et reconnaître notre travail.

Thomas Baillon, opérateur vidéo au CSI et représentant UNSA

"Nous constatons de plus en plus un manque de reconnaissance"

Thomas Baillon en est certain. Si lui et ses collègues discutaient de leur situation avec n'importe quel Français, "ils seraient outrés". D'ailleurs, il entend souvent "où passent nos impôts ? Et nous n'avons pas beaucoup de réponses à leur apporter. On leur explique qu'en tant que fonctionnaires, on se fait taper dessus par différentes politiques et nous sommes payés de manière dérisoire". 

Lui et les représentants syndicaux pointent également du doigt le manque de reconnaissance croissant au sein de l'agglomération de Compiègne. "Lorsqu'on explique à l'agglo comment fonctionne le service, on a l'impression de venir d'une autre planète". Le service a été créé il y a huit ans "et ne fait qu'évoluer : on aura 600 caméras et, dans un an, on aura 15 communes rattachées". Il note aussi que le service a "de bonnes statistiques d'élucidation, nous participons avec les forces de l'ordre, les enquêteurs".

Alors, certes, ils agissent dans l'ombre, mais ils souhaiteraient être considérés davantage, notamment par la nouvelle direction à la sécurité "qui nous a été imposée et qui est complètement inexistante". Il dénonce le fait qu'elle n'ait pris "contact avec aucun agent du service dont elle ne connait aucun nom. Le nouveau directeur s'est présenté une fois au responsable et ça a tourné au recadrage quand il a évoqué nos difficultés que nous subissons depuis des années déjà". 

Au moment du dépôt du préavis, je leur ai rappelé leur obligation qui est de négocier avec nous en temps de préavis de grève. Ils ont dû déclencher une réunion en urgence mais lors de cette réunion, rien de concret ne nous a été présenté. C'est inadmissible car ça montre qu'ils sont indifférents à nos difficultés.

Thomas Baillon, opérateur vidéo au CSI et représentant UNSA

Des réquisitions balayées d'un revers de la main 

Le maire de Compiègne a indiqué dans les colonnes du Courrier Picard qu'ils "pourront faire une réquisition".  Mais pour Thomas Baillon, "Phillipe Marini démontre une fois de plus son ignorance d'un point de vue du droit public, il ne peut émettre des réquisitions des agents territoriaux que dans des événements particuliers" comme des catastrophes naturelles, entre autres. 

En dehors d'une situation de catastrophe, seul le gouvernement et le préfet peuvent le faire "s'il y a trouble à l'ordre public". Ce qui n'est pas le cas ici, selon le responsable UNSA. "D'abord, nous ne faisons pas partie des services indispensables et en plus nous ne sommes pas sur son territoire". Et même en qualité de président de l'agglomération, "il ne possède aucun pouvoir de police du maire. De ce fait, il n'a pas les compétences et les pouvoirs pour émettre les réquisitions". 

"Nous demandons que notre santé soit préservée"

Une autre difficulté tracasse les agents intercommunaux : la santé. "Les agents qui travaillent de nuit n'ont pas de régularité dans la visite médicale". Au lieu d'une visite par an, "on en a une tous les deux ans, et il n'y a pas de vérification de l'acuité visuelle" alors que les agents sont constamment face à la lumière bleue des écrans. "Plus on vieillit, plus on doit augmenter l'option du filtre de lumière bleue. Nous savons que la lumière a un impact sur le niveau de sécrétion de mélatonine" ce qui rend difficile le sommeil. 

La collectivité a aussi pris la décision "de diviser par deux la prise en charge du régime indemnitaire" des congés maladie, passant de 90 à 45 jours. L'agent en arrêt ne recevra donc que la moitié de son traitement. D'autre part, à partir de 11 jours d'arrêt de travail "la prime de fin d'année devient dégressive, alors qu'elle a une importance sur le pouvoir d'achat des agents, c'est une injustice sociale complète !", déplore Thomas Baillon. 

Pas de mouvement de grève depuis les années 80

Une déclaration d'occupation du domaine public sur Margny-lès-Compiègne, à proximité du bâtiment du CSI, a été déposée auprès de la préfecture de l'Oise qui n'y a mis "aucune restriction". "Il y aura des barnums, des chaises, des sonores, un barbecue, le mouvement est fait pour ça, pour nous faire entendre", explique le représentant syndical. 

Des agents de différents services communaux et intercommunaux vont rejoindre le mouvement. Le préavis de grève leur a d'ailleurs été ouvert. "D'autres seront en famille au vue de la date mais nous ont apporté leur soutien, ils sont solidaires et trouvent notre mouvement juste". 

Depuis les années 1980, il n'y a pas eu de mouvement social au sein de la mairie de Compiègne. Pour Thomas Baillon, cela indique un "sentiment de peur au sein de cette collectivité, les organisations syndicales ont peur de vouloir enclencher ce type de mouvement social alors qu'ils ont les mêmes constats que nous". 

Et après ? Pas question de lâcher pour Thomas Baillon et son syndicat. "Je pense que ce ne sera pas le dernier, ce n'est que le premier et ça aura un effet boule de neige sur différents services". Contacté à propos de la grève, le cabinet du maire de Compiègne explique que "le CSI fonctionnera le week-end du 31" et n'a pas fait d'autre commentaire. 

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