Dans le village de Saint-Leu d'Esserent dans l'Oise, Guy Jaillard est facteur d'instruments. Depuis plus de 40 ans, il fabrique et répare des instruments à vent traditionnels ou oubliés. Plus qu'un travail, il garde intacte sa passion de faire revivre la musique d'antan.
Dans son petit atelier, niché dans le village de Saint-Leu d'Esserent dans l'Oise, Guy Jaillard conserve de fabuleux trésors. "Ça c'est une chalémie flamande, montre-t-il en sortant l'instrument de son étagère. C'est une copie du XVe siècle."
Rangés non loin de là, des flûtes, des clarinettes, et autres chalumeaux... "En instrument traditionnel, on a aussi le Pibgorn, c'est un instrument gallois. Ensuite, là-bas on a la bombarde, qui est un hautbois bien sûr breton."
Sa première trompette à 17 ans
Nul besoin de le dire, Guy Jaillard est un passionné. C'est à l'âge de 7 ans, que la musique entre dans sa vie. Depuis tout petit, il arpente les brocantes à la recherche de nouveaux instruments. Quelques années plus tard, il rencontre un facteur d'instruments et devient son élève. "À 17 ans, j'ai fabriqué ma première trompette d'harmonie en partant de feuilles de métal", nous confie-t-il. C'est le déclic. De sa passion, Guy Jaillard en fera son métier.
Avec toujours le même amour pour les matières, pour le bois notamment, il fabrique et répare les instruments de musique depuis 40 ans. "Ce qui me plaît le plus c'est de prendre un morceau de bois et de réaliser un instrument de musique entièrement de mes mains, indique-t-il. On voit ainsi le morceau qui évolue au fur et à mesure, on essaye de deviner à quoi il va ressembler."
Ce qu'apprécie surtout Guy Jaillard, ce sont les odeurs. Chaque bois a sa particularité : "travailler du buis, c'est l'odeur du pain chaud, l'ébène de Tanzanie c'est comme du pain d'épice, de la vanille, de la cannelle... C'est formidable."
Réinventer les pièces invisibles
Au début des années 2000, l'arrivée d'internet casse les prix du marché de la musique. Guy Jaillard décide alors de faire revivre les instruments oubliés. Un défi qui nécessite un travail de recherche à partir de peintures, de tapisseries, de vitraux anciens. Et même un peu de mathématiques... "On extrapole en fin de compte, en fonction de l'homme à l'époque. On projette sur un mur l'instrument et puis on calcule pour avoir à peu près sa longueur théorique", explique-t-il.
Et si extrapoler les formes est relativement simple, Guy doit aussi réinventer les pièces invisibles, comme sur un pipasso dont le modèle date du début du XVIIIe siècle. "La difficulté de cet instrument, c'était l'anche qui se trouve sur le hautbois, montre-t-il. C'est une pièce en roseau et le problème c'est que l'on n'avait pas le modèle."
Alors Guy a dû se lancer dans un travail d'historien, presque d'archéologue, pour retrouver tous les détails de chaque instrument. Grâce à une grande maîtrise technique du bois, du métal et du cuir, il fait revivre la musique d'antan. "Dans ce métier, ce qui est beau c'est quand l'instrument est fini, que l'on a les premières notes qui sont justes et que l'on arrive à jouer. Là c'est 5 minutes de bulle, où on est dans notre espace, dans notre monde, et où on se fait plaisir."