En grève, les salariés de Storengy menacent de couper le gaz dans les Hauts-de-France : "on ne lâchera rien"

Depuis le 7 mars, des salariés de Storengy, filiale d'Engie, à Gournay-sur-Aronde dans l'Oise bloquent l'accès à l'entreprise. Opposés à la réforme des retraites, ils menacent de couper l'approvisionnement en gaz dans les Hauts-de-France.

"On est remonté comme des pendules, on ne lâchera rien." Ils sont déterminés et surtout en colère. Les salariés de Storengy, filiale d'Engie, à Gournay-sur-Aronde dans l'Oise bloquent l'accès au site depuis mardi 7 mars 5 heures du matin. "On tourne à peu près à 80 % de grévistes. On a un barnum, on fait un filtrage, aucune entreprise extérieure ne peut rentrer", détaille Frédéric Ben, salarié et responsable gaz à la CGT Énergie. 

Depuis le mercredi 8 mars, les salariés des 11 sites Storengy en France ont coupé une partie de l'approvisionnement du pays. Les grévistes de Chémery dans le Loir-et-Cher, le plus grand stockage de gaz d'Europe, sont allés fermer 12 puits sur une centaine. Ces puits permettent de faire transiter le gaz de la nappe souterraine vers la station de traitement, avant émission sur le réseau de transport de GRT Gaz. "En moyenne, on a baissé de 40 % les débits sur l'ensemble des stockages en France", affirme le syndicat.

La société a confirmé l'information à l'AFP, mais assure que les clients ne sont pas affectés pour l'instant. Plus aucun gaz naturel liquéfié (GNL) n'est par ailleurs déchargé des navires depuis mardi 7 mars, les quatre terminaux méthaniers portuaires du pays étant bloqués par les grévistes.

Couper le gaz aux gros industriels

Si l'alimentation du réseau français de gaz est pour le moment maintenue, les volumes envoyés sont donc désormais réduits. Un ralentissement assumé par les salariés de Storengy qui entendent avoir un impact : "Baisser de 40 % le soutirage, cela ne va pas couper le gaz de madame Michaud. On défend le service public de l'énergie, c’est dans notre âme. Mais baisser les volumes, cela pourrait, à terme, mettre en difficulté les gros industriels qui ont des contrats effaçables. Ils pourraient ne plus être alimentés pour soulager le réseau. [...] De sources sûres, nos directions ont peur que ça arrive". Si une telle situation est amenée à se produire, ces "gros industriels" devraient alors avoir recours à d'autres énergies, bien plus onéreuses, telles que l'électricité, le fioul ou encore le charbon. "On veut toucher à l'économie, au portefeuille", assume le syndicaliste.

Les Hauts-de-France bientôt dans le noir ?

Mettre la pression sur le gouvernement. Les grévistes ne cachent pas leur motivation, ni même, pour certains, leur épuisement : "On souhaite maintenir les piquets de grève sans débordement, mais on n'est pas à l'abri que ça arrive. On n'est pas beaucoup de salariés sur les stockages souterrains. Dans l'Oise, à Gournay-sur-Aronde, on est une cinquantaine de salariés, n’importe lequel de ces salariés sait où aller pour arrêter le stockage. Pour l'instant, on maîtrise, mais on ne sait pas combien de temps."

Si les vannes du site isarien étaient coupées, c'est l'ensemble des Hauts-de-France qui seraient plongées dans le noir. En effet, le site alimente, à lui seul, toute la région en gaz. Une situation unique en France car les autres sites de stockage Storengy du territoire sont maillés. De quoi faire du site picard un lieu stratégique pour les frondeurs : "S'il y a une coupure de gaz sur la région, ça va engendrer une réaction en chaîne de tous les acteurs. Pour remettre en service le gaz, il faut aller chez chaque usager à deux reprises. Il faut des moyens énormes, on n'est pas dimensionné pour faire ça. Il faut 3 mois minimum."

Les conséquences de ce scénario catastrophe pourraient être bien plus importantes : "Si les gens n'ont plus de gaz, ils vont aller chercher des radiateurs électriques, ce qui entraînerait une grosse pointe sur toute la région et une surchauffe de la centrale de Gravelines. On aurait un effet domino et plus du tout d'énergie électrique. [...] Notre but, ce n'est pas d'être des terroristes, mais si le gouvernement ne prend pas la mesure, ça arrivera peut-être parce qu’il y a des salariés qui sont à bout."

Quelles revendications ?

Des salariés au bord de l'implosion, à en croire ce responsable CGT, et qui sont donc fermement opposés à la réforme des retraites. "On veut combattre cette réforme des régimes des retraites qui est injuste et injustifiée. [...] C'est hors de question qu'on travaille jusqu'à 64 ans pour avoir au mieux les 25 meilleures années. Nous, nous sommes au régime particulier, on cotise à 15 % de plus que le régime général. On veut finir à 60 ans, avec l'équivalent de 75 % du dernier salaire comme pension et une reconnaissance de la pénibilité des métiers. On bloquera le site jusqu'au retrait de la reforme."

Les salariés se sont donc organisés. Certains ont posé des congés, d'autres des RTT et tous alternent les heures de grève. Une caisse de solidarité a également été mise en place. Un moyen de maintenir un salaire tout en bloquant le site Storengy de Gournay-sur-Aronde.

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