L'arrêté de transfert de la maternité de Creil vers Senlis annulé par le tribunal administratif : "c'est une belle victoire, maintenant on va se battre pour le retour du site"

Le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté de transfert de la maternité de Creil vers Senlis pris le 8 janvier 2019 par l'Agence régionale de santé. La fermeture de la maternité de Creil avait suscité à l'époque une forte mobilisation des élus et personnels soignants.

Jeudi 7 juillet 2022, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté de transfert de la maternité de Creil vers Senlis pris le 8 janvier 2019 par l'Agence régionale de santé (ARS).

Cet arrêté, qui autorisait le transfert des activités de soins en néonatologie avec soins intensifs et de réanimation néonatale du site de Creil vers le site de Senlis, au sein du groupe hospitalier public du sud de l’Oise, n'est, pour le juge, pas compatible avec le schéma régional de santé qui prévoit actuellement deux maternités pour la zone de Creil-Senlis et n’envisage pas la suppression d’une des deux implantations.

Une satisfaction pour le maire de Creil qui contestait l'arrêté en question. "C'est une belle victoire, ce 7 juillet sera à marquer d'une pierre devant le site du GHPSO (groupe hospitalier public sud de l’Oise) à Creil", se réjouit Jean-Claude Villemain.

L'ARS prend acte de la décision

Ceci étant, compte tenu des impératifs de santé publique et de continuité des soins, le tribunal administratif estime que cette annulation doit être différée au 6 janvier 2023. L’ARS dispose ainsi d’un délai de six mois pour modifier le schéma régional de santé afin de permettre la délivrance d’une autorisation de transfert de la maternité qui lui soit conforme, ou pour organiser un retour de la maternité sur le site de Creil. "On va se battre pour cette deuxième éventualité, appuie le maire de Creil. Nous allons demander au directeur général de l'ARS l'organisation d'un comité de pilotage pour un retour de la maternité à Creil, tout en gardant celle de Senlis. La position que nous défendons : c'est deux entités, deux bassins de populations et donc deux maternités."

De son côté, l'ARS indique qu'elle prend acte de la décision du tribunal et qu'elle note par ailleurs que le juge a annulé l'arrêté du 8 janvier 2019 à compter du 6 janvier 2023 sur un motif uniquement juridique. "La situation pointée par le juge démontre simplement que la décision de transférer les accouchements sur le site de Senlis n’était ni prévisible ni programmée par l’ARS lors de la préparation et de l’adoption du schéma régional de santé, mais qu’elle a dû être prise au regard des circonstances intervenues après l’adoption du schéma", précise-t-elle.

Une décision pour un "parcours de soins mieux organisé"

En fin d'année 2018, élus et personnels de santé s'étaient mobilisés pour protester contre la fermeture de la maternité de Creil vouée à fusionner avec celle de Senlis. Un projet annoncé en 2017 par la direction du groupement hospitalier public du sud de l'Oise pour pouvoir optimiser les effectifs, les spécialistes (pédiatre, anesthésiste, gynécologue) n'étant pas assez nombreux, selon elle, pour maintenir les deux sites.

"Le regroupement des accouchements à Senlis permet d'avoir un parcours de soins mieux organisé et plus lisible pour les patientes", justifiait l'ARS lors de l'officialisation du transfert, mettant en lumière les "problèmes de recrutement médical nécessaire à la prise en charge des patientes sur deux sites distincts." Le projet avait reçu l'avis favorable de la commission médicale d'établissement du GHPSO et de la commission spécialisée pour l’organisation des soins (CSOS) Hauts-de-France, qui représente les acteurs de santé de la région.

À l'époque, Jean-Claude Villemain, le maire de Creil condamnait déjà cette décision. "Je suis là pour répondre aux besoins d'une population et on détruit ce qu'une population a pour avoir accès rapidement à la santé", avait-il déclaré.

Pour pouvoir accoucher, les futures mamans qui habitent à Creil, 1 500 chaque année, doivent donc se rendre à Senlis, soit à une douzaine de kilomètres. Une aberration pour le chef des urgences de l'hôpital de Creil, Loïc Pen, qui décide de démissionner de son poste en décembre 2018. "40% des habitants du plateau creillois n'ont pas de véhicule. Donc ce sera vers nous que les femmes enceintes se tourneront quand viendra le moment pour elles d'accoucher. C'est un bel exemple de macronisation du service public", nous confiait alors celui qui deviendra en 2022 candidat Nupes aux élections législatives.

Emmanuel Macron demande de rouvrir le dossier

Malgré cette forte mobilisation, la direction du groupe hospitalier et l'ARS maintiennent leur décision. En janvier 2019, la Ville de Creil et la communauté d'agglomération Creil Sud Oise décident alors d'attaquer en justice l'arrêté du 8 janvier. Le déménagement du matériel s'effectue quand même en dépit de l'occupation du hall d'entrée pour empêcher ce transfert.

Mais l'affaire n'est pas entérinée pour autant. En avril 2019, le président de la République, Emmanuel Macron, indique avoir demandé au préfet de l'Oise de rouvrir le dossier et de créer un comité de suivi. Le docteur Paul Cesbron, président du comité de défense de la maternité, et décédé depuis, se félicitait de cette décision. D'autant qu'un mois plus tard, ce sont de graves dysfonctionnements qui sont pointés du doigt à la maternité de Senlis. Des risques que les représentants du personnel avaient pourtant pressenti.

Un an après la fusion, la direction se voulait rassurante sur le fonctionnement du service. La maternité s'est agrandie : 8 nouvelles chambres et un nouveau service de réanimation néonatale avec 16 lits supplémentaires. Avec la fermeture de la maternité de Creil, Senlis a donc doublé son nombre d'accouchements : la maternité a réalisé 3 000 naissances en 2019.

Pour le moment, la prise en charge des parturientes [femmes en train d'accoucher NDLR] et les accouchements se poursuivent sur le site de Senlis. L'ARS indique qu'elle analysera, dans les deux mois, "la suite à donner à ce dossier, en lien avec l’établissement et en prenant en compte cette demande de modification du schéma régional de santé."

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