La préfecture de l'Oise a rendu un avis favorable fin mai pour autoriser la société Biogaz 60, composée du maire déchu et d'un collectif d'agriculteurs, d'implanter un méthaniseur à Auneuil. Cette nouvelle ne passe pas auprès de l'association ACIMA, du conseil municipal, qui craint nuisances et pollutions.
L'avis favorable de la préfète de l'Oise, Catherine Séguin, concernant l'implantation d'un méthaniseur à Auneuil, ne passe pas auprès de l'association ACIMA (Association contre l'implantation du méthaniseur à Auneuil) et de la municipalité.
Cette décision surprend Alexandra Marinho, membre de l'association. "Je pense que la nouvelle préfète vient d'arriver donc peut-être qu'elle a voulu prendre un risque ? On ne sait pas." Au contraire, l'Auneuilloise s'attendait à ce qu'elle "prenne la continuité de l'ancienne préfète, qui a suivi le dossier de A à Z".
D'autant plus que, selon elle, "la nouvelle préfète ne connaissant pas le dossier depuis le début, on aurait espéré qu'elle s'appuie sur sa collègue précédente".
Nuisances routières et risques environnementaux
Alexandra Marinho estime qu'il existe notamment des risques pour l'environnement et des risques routiers. Autre point soulevé, le fait que le lieu où le méthaniseur devrait être installé se situe sur "une zone ZNIEFF" protégée par "Natura 2000".
Il se trouve aussi "sur un captage d'eau qui fournit Beauvais à 17 % d'eau potable. On ne peut pas faire de site industriel dans notre campagne, ce n'est pas possible. 5 hectares, c'est énorme, ce n'est pas quelque chose de petit à la portée de chacun".
Elle met également en avant les nuisances au niveau du trafic routier "puisque ça va être sans cesse, des camions et des tracteurs, mais aussi des nuisances de l'odeur". Elle rappelle qu'Auneuil se situe "en plein vent d'ouest donc on a assez de nuisances comme ça, il y a déjà beaucoup d'entreprises qui en apportent".
Alexandra Marinho le martèle à plusieurs reprises : "on veut garder le pays de Bray comme il est actuellement, aussi joli que cela et pas industrialisé".
Pas contre la méthanisation
Face à l'implantation de ce méthaniseur, plusieurs sentiments s'enchaînent. D'abord, la colère, "à cause de la manière avec laquelle ça a été fait". Elle affirme que l'association n'est pas contre la méthanisation. Mais l'emprise au sol qu'il y a, ramène des souvenirs douloureux. "Auneuil, c'est quand même un petit village qui a été inondé cinq fois en 20 ans, qui a quand même été classé en catastrophe naturelle, donc on y pense forcément", avance-t-elle.
"On pense aussi à nos habitations, à nos enfants, à nous. On est autant en colère qu'inquiets parce qu'on pense à notre vie d'après, comment elle va être ? Et en même temps, la colère dans le sens où tout a été caché dans la manière de faire et de présenter le projet".
L'association ne se sent pas non plus écoutée. "On a fait plusieurs manifestations, on a été à toutes les réunions, on a donné notre point de vue : comme quoi, on était contre, on a rassemblé du monde" et "la population a également montré qu'elle n'en voulait pas".
L'ancien maire, Hans Dekkers, un des acteurs de ce projet, a perdu son poste en mars 2023 dans le contexte de ces farouches oppositions. Le nouveau conseil municipal - dont fait partie l'ancien maire - a récemment revoté à la majorité contre l'implantation du méthaniseur à Auneuil, tout comme l'an dernier, sous la précédente mandature.
"À vol d'oiseau, il est à 300 mètres des premières habitations"
Odile Demary, adjointe au maire chargée des sports et de la jeunesse, ajoute même que ce méthaniseur est à vol d'oiseau "à 300 mètres des premières habitations" et pointe du doigt le trafic routier "qui va être énorme au niveau des camions. Il faut 97 tonnes pour remplir ce méthaniseur chaque jour. La circulation va être dense."
Comme Alexandra Marinho, "ce n'est vraiment pas le principe du méthaniseur qui nous dérange, c'est son implantation", affirme Oldile Demary, qui souligne que "la population est aussi contre" ce projet "que le conseil municipal".
L'adjointe au maire espère que l'ACIMA "ne va sûrement pas en rester là" et fait "savoir que le conseil la soutiendra. On soutiendra nos habitants aussi".
"Nos échanges lors de nos réunions ont été plus que constructifs"
Du côté des associés à l'initiative du projet, tout a été mis en œuvre pour convaincre les opposants. La décision de la préfète n'est d'ailleurs pas vécue comme une "victoire" mais comme "le juste retour d'un travail que nous avons mené depuis 2019 sur l'instruction d'un dossier, sur toutes les réponses techniques que nous avons apportées à chaque demande de la Préfecture et de l'État", détaille Faustine Lucet, agricultrice et actionnaire de Biogaz 60.
Elle assure que tout a été fait dans la transparence et de façon la plus méticuleuse possible. Et quand on lui fait part du sentiment d'une partie de la population de ne pas être écoutée, elle dit être "désolée qu'ils le pensent comme ça". Au contraire, "nos échanges lors de nos réunions ont été plus que constructifs". Faustine Lucet estime que le dossier a répondu à tous les éléments demandés, aux questionnements, même concernant le risque de pollution.
"Il y a des contrôles qui nous sont demandés de façon régulière, qui sont posés par la préfecture. Il y a un cahier des charges, des registres, comme toute entreprise."
Faustine Lucet, agricultrice et actionnaire de Biogaz 60
Mais reste un point de discorde sur lequel aucun parti ne veut changer de position, c'est le déménagement du projet vers un autre lieu. "Ça, c'était impossible pour nous. On peut voir pour améliorer les contours, mais ne pas faire le projet, s’il a toutes les raisons d’exister, sur ça on ne peut pas trouver de point d’accord", affirme-t-elle.
Pour Faustine Lucet, "ce sera au moment de l'exploitation, qu'ils pourront voir que ce qu'on leur a proposé lors de l'instruction est juste."
Alors, face à ces positionnements fermes des deux côtés, l'ACIMA indique qu'elle ne "lâchera rien et il y aura certainement un probable recours qui sera fait". Néanmoins, même si des recours en justice sont possibles pour l'opposition, ils ne seront pas suspensifs.
Avec Paul-Guillaume IPO / FTV