La capture du CO2, une technologie qui permettrait de "stocker jusqu’à 20% de nos émissions au niveau mondial"

Jusqu'au 12 décembre, gouvernements et experts du climat sont réunis à Dubaï pour la COP 28, une conférence internationale annuelle ayant pour but de trouver des solutions au changement climatique et notamment aux émissions de gaz à effet de serre. Pour limiter celle du dioxyde de carbone, une technologie innovante est en train de se développer en Picardie : sa capture et son stockage en profondeur sous terre.

2023 est l'année la plus chaude jamais enregistrée. Les émissions de gaz à effet de serre dont le dioxyde de carbone (CO2) en sont la cause. Lorsque ce gaz est émis depuis une source fixe, comme une usine, on peut le capturer avant qu'il ne soit relâché dans l'air. "Un processus industriel assez complexe" que souhaite mettre en place la France dans un futur proche, indique Laurent Fontanelli, géologue titulaire de la chaire Géo Agro Énergies à l'université UniLaSalle de Beauvais.

Le but est de capturer et de stocker ce CO2 industriel, à 800 mètres sous le sol, dans des roches aux caractéristiques particulières. "Des espaces vides ou des espaces libres entre les grains de la roche vont permettre d’y insérer un fluide comme le CO2. C’est l’une des propriétés que l’on recherche dans les roches. Et de la perméabilité pour pouvoir faire circuler ce fluide à l’intérieur ", explique Yannick Vautier, géologue, directeur du collège Géosciences UniLaSalle.

On ne fait que le chemin inverse pour y stocker du gaz qui parfois y était naturellement présent.

Yannick Vautier, géologue, directeur du collège Géosciences UniLaSalle

Ces formations géologiques sont bien connues des scientifiques, car on y puise déjà des gaz comme le méthane, donc aucun risque pour le sous-sol. "On utilise des propriétés qui naturellement l’ont déjà été par notre planète. Ces roches, ce sont aussi celles dans lesquelles nous sommes allés puiser des gaz depuis décennies. Et nous ne faisons que le chemin inverse pour y stocker du gaz qui parfois y était naturellement présent. Ce n’était pas le même. C’était par exemple du méthane et aujourd’hui c’est du CO2 qu’on intègre dans ces réserves en profondeur pour qu’il y reste à tout jamais."

Comment ? Grâce à l'une des autres propriétés de ces blocs géologiques. Avec "la chimie des roches", le CO2 injecté "réagit avec son milieu, de telle sorte qu'il se minéralise et qu'il soit piégé à tout jamais dans la roche, dans le temps", explique Yannick Vautier.

Cette réaction dépend du type de roche. Avec celles sédimentaires, ça prend plusieurs milliers d’années. Mais les caractéristiques en profondeur font que le système reste étanche et ne permet pas au CO2 de remonter, informe le géologue. Avec les roches volcaniques, les réactions chimiques sont beaucoup plus rapides, quelques années à peine.

Une technologie qui va se développer dans les 10 ans à venir

À Beauvais, des chercheurs étudient ces roches, pour faire avancer cette technologie encore expérimentale, mais dont le potentiel est énorme. "Ce sont les chiffres officiels du GIEC, on pourrait arriver à stocker jusqu’à 20 % de nos émissions au niveau mondial. Donc, il restera toujours 80 % d’émissions à réduire. On ne peut pas évidemment tout stocker. Aujourd’hui, on stocke environ 40/45 millions de tonnes, ce qui représente 1/1000ᵉ de nos émissions, ce qui est très peu", évoque Laurent Fontanelli.

En France, aucun site de stockage géologique du CO2 n'existe encore. Trois doivent voir le jour d'ici à quatre à dix ans, la prospection commencera dès 2024. "Il y a une volonté de faire ça pour un déploiement massif dans la période 2028-2034. À UniLaSalle, on forme des jeunes sur cette thématique de capture et de stockage de CO2 pour le futur. Ce sont des nouveaux métiers qui vont se développer puisque c’est toute une industrie que l’on veut mettre en place en France, en Europe et au niveau mondial."

La France espère stocker 4 à 8 millions de tonnes de CO2 pour 2030

Mais pour les industriels, cela n'est pas un permis de polluer. "Ça ne veut pas dire que cette technique va remplacer la réduction des émissions. Au contraire, c’est une solution qui va permettre d’être employée pour des émissions qu’on ne peut pas du tout réduire."

Toute la filière du stockage de CO2 reste à développer. "L’idée de la France, c’est de capturer/stocker environ 4 à 8 millions de tonnes pour 2030. Et environ, 15 à 20 millions pour 2050", annonce Laurent Fontanelli. Cette université est la seule en France à proposer des cours sur cette technologie.

Avec Claire-Marine Selles / FTV

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