La Picarde Rosalie Lamorlière, dernière servante de Marie-Antoinette

À Paris en ce moment se tient une pièce de théâtre consacrée à une Picarde : Rosalie Lamorlière, née à Breteuil dans l'Oise en 1768. Méconnue, elle fut la dernière servante de Marie-Antoinette à la Conciergerie juste avant que la dernière reine de France ne soit guillotinée.

"La pauvre fille n’a pas d’histoire." C’est ainsi qu’un célèbre historien du 19e siècle, G. Lenotre, résumait la vie de Marie-Rosalie Lamorlière. Pourtant cette jeune Picarde née à Breteuil en 1768 a eu un destin incroyable, que Ludovic Miserole, passionné d’histoire, s’est employé à retracer. Une plongée dans les archives, une enquête de terrain, un véritable travail de bénédictin pendant près de 10 années. Pour enfin lui consacrer une biographie : "Rosalie Lamorlière, dernière servante de Marie-Antoinette" aux éditions French Pulp.

Difficile aujourd'hui de retrouver dans le Breteuil actuel la moindre trace de la vie de Rosalie, et pour cause : la ville a été pratiquement rasée par les Allemands en 1940.
 


Premier contact glacial avec la reine

Quand Marie-Rosalie part à Paris, elle a environ 22 ans. La Révolution éclate. C’est à ce moment qu’elle modifie son nom : elle abandonne Marie, qui fait trop référence à "l’Autrichienne", et le De (Lamorlière) qui n’était pourtant pas du tout une particule dans son cas. Une fois dans la capitale, elle devient domestique à la Conciergerie. C’est là qu’elle voit la reine Marie-Antoinette pour la première fois, le 1er août 1793, quand celle-ci, arrivant du Temple, est placée en cellule.

Le premier contact entre les deux femmes est plutôt froid : Rosalie propose à la reine de l’aider à se dévêtir pour la nuit, et la reine lui répond :

Depuis le temps que je suis en prison, j’ai appris à me servir toute seule.


Pourtant, les deux femmes vont nouer une relation de proximité. Relation presque sans parole d’ailleurs, car la reine est surveillée 24 heures sur 24 et n’a aucune intimité. Pour preuve cette autre anecdote, que relate Ludovic Miserole : le 16 octobre 1793, au moment de partir à l’échafaud, la reine veut se changer car sa robe est tâchée de sang. Au garde qui l’observe, elle demande de se retourner un instant. Il refuse. La reine jette un regard à Rosalie, et celle-ci se place entre la reine et le garde, pour la dérober au regard indiscret le temps qu’elle change de linge.
 

"Mam'zelle Capet"

Rosalie a côtoyé d’autres personnages historiques à la Conciergerie : Madame du Barry, Robespierre, Philippe-Egalité… À tous, elle manifeste une grande humanité, ce qui lui vaut le surnom de "Mam’zelle Capet", pour le moins périlleux en ces temps troublés ! Rosalie servira six ans en tout à la Conciergerie. Après quoi elle continuera à être tour à tour domestique, cuisinière ou couturière.

En 1801 elle a une fille, de père inconnu, dont elle ne s’occupera jamais. Cette partie de son histoire reste un mystère à ce jour. En 1824, affligée d’une violente sciatique, elle entre à l’Hospice des Incurables, (qui deviendra ensuite l’hôpital Laënnec). Sa pension est payée par des proches de Marie-Antoinette. C’est là qu’elle finira ses jours, à l’âge de 80 ans.

Elle est enterrée dans une fosse commune au cimetière du Montparnasse. Mais c’est au cimetière du Père Lachaise qu’il faut chercher son nom : sur le monument funéraire de sa fille, qui a fait graver "À la mémoire de ma mère, Rosalie Dellamolière, dernière personne placée 76 jours auprès de feu la reine Marie-Antoinette dans sa captivité pour le besoin de tout son service dont elle s’acquitta avec douceur et respect. Décédée le 2 février 1848 à l’âge de 80 ans. Priez pour elle", le "Dellamolière" étant une erreur de transcription. 

Un unique portrait d'elle

Bien qu’ayant conservé précieusement quelques souvenirs de la reine (notamment des morceaux de tissu ayant appartenus à Marie-Antoinette cousus dans sa robe), Rosalie n’aimait pas beaucoup parler de ces 76 jours passés à la Conciergerie. Elle n’aimait pas être réduite à ce simple rôle de dernier témoin, et voulait peut-être aussi préserver les derniers moments d’intimité de la reine. Elle a néanmoins accepté de confier ses souvenirs par deux fois, de vive voix, à des historiens venus la questionner en 1824 et 1836.

Ludovic Miserole n’en a pas encore fini avec Rosalie Lamorlière. Il recherche notamment qui était le père de sa fille, née en 1801, et s’il peut retrouver l’unique portrait de Rosalie qui aurait été peint à la Conciergerie. Peut-être dort-il au fond d’un grenier… Il a par ailleurs retrouvé la trace de l’une de ses arrière-petite-nièce, décédée en 1912 à Paris.

La pièce de théâtre intitulée "la dernière étreinte" consacrée à la relation entre la reine et Rosalie se joue ce mois les 21 et 28 octobre au théâtre Déjazet, à Paris.
 
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