"Quand tu sais que c'est un miracle", ex-cavalière gravement blessée, elle rêve de JO avec les Paralympiques

Coline Grabinski a toujours été une compétitrice. Enfant, elle pratique l’équitation et plus particulièrement le saut d’obstacles. De 12 à 18 ans, elle participe aux compétitions de concours complet. A 25 ans, une chute sur une barrière lui brise les vertèbres, elle ne marchera plus jamais naturellement. Mais aujourd'hui, elle brille en triathlète et rêve des Jeux Paralympiques 2024. Arrivera t-elle à boucler le budget pour se qualifier?

Qui aurait cru qu’à bientôt 35 ans (elle les aura le 25 mars prochain) Coline serait une athlète de haut niveau ? Elle se souvient parfaitement de ce jour où elle est tombée sur une barre d’obstacle.

Mais moi, je me suis accrochée à son Oui, il m’a donné la chance d’y croire

Coline Grabinski

"Vais-je remarcher ?"

"Je me vois à terre, consciente, en train de rassurer les personnes autour de moi, tout va bien, ne vous inquiétez pas, ce n’est pas grave. J’ai découvert depuis, que j’ai une forte capacité à gérer la douleur.  " Lors de l’arrivée des pompiers, ils lui demandent si elle peut bouger les orteils, les jambes. C’est à cet instant qu'elle se rend compte que quelque chose ne va, que c’est bien plus grave que ce qu’elle imagine, car elle ne peut plus bouger ses membres inférieurs.

Emmenée aux urgences, avant de passer au bloc opératoire, elle pose deux questions au neurochirurgien qui va l’opérer : " Vais-je remarcher ? Vais-je pouvoir à nouveau faire du sport ? " il a répondu oui. " Il a dit oui, mais sans préciser si j’allais savoir remarcher seule, si ce serait avec un déambulateur, des aides… Mais moi, je me suis accrochée à son Oui, il m’a donné la chance d’y croire ".

durée de la vidéo : 00h13mn00s
Une para-triathlète qui rêve de Paris 2024 ©France Télévisions

>>> Voir ou revoir l'émission consacrée à Coline Grabinski en cliquant sur l'image

Que lui est-il arrivé précisément ?

Elle s’est fracturé deux vertèbres lombaires et sa moelle épinière a été fortement comprimée. Alors, tous les nerfs qui vont du bassin jusque dans ses jambes dysfonctionnent et les contractions des différents muscles se font de façon inégale, non automatiquement et difficilement.

Ses muscles ont de ce fait moins de force et ne se développeront jamais énormément même avec une grosse charge d’entraînement. Il faut savoir que dans cette situation, les facteurs extérieurs comme le stress, les changements de température impactent également beaucoup sa force musculaire, elle est plus rapidement fatiguée quand elle produit un effort.

Ce qui me choquait le plus, c’est que mon handicap était si peu visible, que des inconnus se permettaient de me parler ouvertement de mes séquelles, ils me faisaient remarquer que je boitais sans prêter attention à ma difficulté à l’entendre après cette épreuve de la vie

Coline Grabinski

Notre jeune battante ne lâche rien. Direction Berck-sur-Mer et le centre Jacques Calvé. Elle y reste 10 mois (de novembre 2014 à août 2015). "J’ai vécu ma rééducation comme un sportif de haut niveau.10 mois intenses à fond et quand je suis sortie je réussissais à marcher avec des releveurs de pied et des bâtons de marche et encore des douleurs." Elle était debout alors qu’elle avait 80% de chance de sortir en fauteuil.

Car il faut bien comprendre que la marche naturelle, c’est terminé pour Coline. Pour marcher, et à plus forte raison courir, cela nécessitera toute sa vie une concentration de tous les instants pour que son cerveau transmette l’information aux jambes, car Coline est atteinte de paraparésie qui est une forme atténuée de la paraplégie.

"Parfois quand je cours avec des amis, ils me parlent, me posent une question, je suis incapable de leur répondre tant je suis concentrée sur l’enchaînement de mes foulées".

Bien sûr, le retour à la maison n’est pas facile. Il faut reprendre sa place dans la vie. Elle se retrouve confrontée au regard des autres "Ce qui me choquait le plus, c’est que mon handicap était si peu visible, que des inconnus se permettaient de me parler ouvertement de mes séquelles, ils me faisaient remarquer que je boitais sans prêter attention à ma difficulté à l’entendre après cette épreuve de la vie…"

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Coline s’accroche, elle travaille dans l’Oise à Beauvais pour la direction départementale des Territoires de l’Oise (DDT Oise) où elle est adjointe au service de l’eau de l’environnement et des forêts. Un métier qu’elle aime particulièrement même si il est prenant : elle travaille environ 40 heures par semaine.

Et le sport me direz-vous ?

Figurez-vous qu’elle s’y est remis très vite. Pour l’anecdote, elle est remontée à cheval, c’était important pour elle. Coline n’a pas repris la compétition, mais elle ne s’interdit pas d’en refaire plus tard.

Coline est une femme combattante. Alors, elle se met à la natation, sport qu’elle pratiquait un peu, mais qui est le plus facile avec son handicap. Elle le fait en club, avec des valides. Elle fait aussi un peu de vélo, car elle aime bien. Et courir ? "C’est une galère sans nom pour réussir à enchaîner les foulées, mais j’aime bien relever les défis, et à tous les 100 mètres réalisés, c’était une victoire".

Quand je monte sur le podium, je suis la femme la plus heureuse du monde

Coline Grabinski

Sa reconstruction physique, morale, mais aussi mentale est incroyable.

Elle se met donc au paratriathlon en 2018. En 2019, elle remporte son premier titre de championne de France (catégorie PTS4 déficience modéré). "Pour moi, c’est le plus beau titre que j’ai remporté, quand je monte sur le podium, je suis la femme la plus heureuse du monde ! Personne n’a autant le sourire que moi à ce moment-là".

Quelle victoire, quelle revanche pour Coline qui conserve le maillot tricolore trois années de suite.

20 h d'entraînement par semaine

Elle s’entraîne sans relâche, 20 heures par semaine, avant et après le travail. Elle s’est bien sûr entourée pour y arriver. Son kinésithérapeute, Vincent Beaune, l’a suivie dès sa sortie du centre de rééducation. Il l’a tout de suite considérée comme une sportive et non comme une personne handicapée. Il l’a soutenue, lui a redonné confiance quand elle n’y croyait plus et elle sait qu’elle n’aurait jamais réussi à courir à nouveau sans lui. Et pourtant, il lui a avoué bien après : "Je n’y croyais pas, je t’ai accompagnée mais je ne pensais pas que tu y arriverais" nous raconte-t-elle en éclatant de rire.

Je lui demande quelle est la personne qui l’inspire. Elle me répond : "Mon coach de course à pied, Jean-Marc Gossart. Il est aussi préparateur physique dans le monde du rugby et fait de l’ultra-trail. Son rôle n’est pas facile, car il doit tout combiner avec moi. Prendre en compte mon travail, mon stress car j’ai des fortes responsabilités dans mon job, la fatigue qui s’accumule plus rapidement. Au début c’était drôle, il ne voyait pas l’extraordinaire dans ce que je faisais."

Coline n’est pas une athlète comme les autres, vous l’aurez compris. Dans le cadre des séances d’entraînement, son coach ne peut pas établir un plan de travail sur plusieurs semaines voire mois, trop de facteurs entrent en compte au quotidien.

Athlète de haut niveau et internationale malgré tout

Alors, elle se donne à fond, et se donne tous les moyens. Aujourd’hui licenciée au Triathlon Club de Liévin (62), on peut dire qu’elle est athlète de haut niveau grâce à ses performances en France mais aussi lors de compétitions internationales où son palmarès s’enrichit en remportant des médailles dans la catégorie PTS3 (déficience importante). Cependant, elle n’en a pas le statut (le nombre de place est limité), d’où ses entraînements matin et soir, d’où la prise en charge financière personnelle pour participer aux compétitions. C’est pour cela, qu’aujourd’hui, elle ne sait pas encore si elle pourra faire les Jeux Paralympiques de Paris.

"Je suis obligée de tout calculer financièrement. J’ai bien sûr quelques partenaires qui me suivent et je les en remercie, mais ce n’est pas suffisant pour participer aux épreuves qualifiantes qui sont loin. Avec mon entraîneur, on prend donc le temps de réfléchir sur les possibilités et le nombre est limité."

Comme Coline n’aime pas le mot impossible et que bien sûr, comme tous les athlètes, elle rêve de faire les Jeux de Paris, les compétitions qualifiantes s’amenuisent au fur et à mesure du temps qui passe. Cependant, il y en a une qui va avoir lieu bientôt lieu et c’est son club qui l’organise. Le 30 mars prochain à l’Arena Sport Couvert est organisée la 3ème édition du Liévin Triathlon Indoor Festival. L’épreuve porte cette année le label coupe du monde pour les valides et "participer à une compétition de ce niveau à la maison pour ma reprise de la compétition, on peut dire que c'est une très belle reprise de la saison 2024 " nous dit Coline. L’heure est donc à l’entraînement afin de préparer au mieux cette saison qui va démarrer.

Quand tu sais que c'est un miracle de te lever du lit le matin et de faire trois pas...à postériori oui...c'est une belle chose qui me soit arrivée dans la vie

Coline Grabinski

À l’entendre me parler avec une telle passion, une telle joie, un tel enthousiasme, j’ai hésité à lui poser une dernière question, mais je l’ai fait quand même. Je lui ai demandé si, avec dix années de recul, cet accident de cheval avait changé sa vie en positif ou pas. Voici la réponse de Coline :

"Quand tu sais que te lever du lit le matin, faire trois pas c’est un miracle, que grâce à ton handicap tu peux rebondir dans le sport, que tu vis des moments incroyables…Je savoure tout ce chemin parcouru, toutes ces petites victoires quotidiennes, ces petits progrès chaque jour, sincèrement je ne regrette rien et à postériori oui, malgré des moments atroces, c’est une belle chose qui me soit arrivée dans la vie".

Les Jeux Paralympiques en quelques mots

Les premiers Jeux Paralympiques de l’histoire ont eu lieu à Rome en 1960, juste après les Jeux officiels. 15% de personnes vivent sur la planète avec un handicap. La devise des Jeux Paralympiques est « Mind, Body, Spirit » (Esprit, Corps, Ame), mais pour tous ces athlètes la devise des JO pourrait aussi être la leur : Plus Vite, Plus Haut, Plus Fort.

Les derniers Jeux Paralympiques d’été (ceux de Tokyo) ont attiré 4 milliards de téléspectateurs à travers le Monde.

Du mercredi 28 août au dimanche 08 septembre 2024, les Jeux Paralympiques de Paris rassembleront 4400 athlètes. C’est en 2016 à Rio que le Para Triathlon était inscrit pour la première fois au programme. Les athlètes enchaînent consécutivement : 750m de natation, 20km de cyclisme, et 5km de course à pied. Le grand départ sera donné du Pont Alexandre III les 1er et 2 septembre prochains à Paris, c’est là que nous donnons rendez-vous à Coline.

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