Remboursement des aides Covid-19 par les dentistes : "Là, j’ai vraiment l’impression de me faire braquer"

De nombreux professionnels libéraux de santé ont bénéficié d'aides pendant leurs mois de fermeture au printemps 2020. Aujourd'hui l'Assurance Maladie leur réclame d'en rembourser une partie. Comme beaucoup de ses collègues, Pierre Schmidt dentiste à Calais est en colère.

"Vous connaissez le dicton : donner, c’est donner. Reprendre, c’est voler !" Pierre Schmidt est chirurgien-dentiste à Calais depuis 1991 et aujourd'hui il est en colère. Entre mars et juin 2020, de nombreux professionnels de santé libéraux comme les dentistes se sont retrouvés en incapacité de travailler normalement. Alors que la France est confinée, ils ont interdiction d'exercer leur activité. Leurs charges continuent pourtant de tomber et leurs salariés ne bénéficient pas du chômage partiel.

Après de difficiles négociations, les chirurgiens-dentistes intègrent la liste des professions de santé bénéficiaires des aides de l’État pour compenser la perte d'activité (le DIPA). La moitié d’entre eux se voit désormais réclamer un remboursement partiel.

Pierre Schmidt lui, a reçu environ 11 000 euros d'aides pour la période concernée, ce qui correspondait globalement à ses charges. "L'Assurance Maladie me réclame maintenant près de 2000 euros, c'est incompréhensible. J'ai eu zéro revenu pendant cette période. En Belgique les confrères reçoivent 20 euros de frais Covid par patient, nous absolument rien et là on nous demande même de rembourser une partie des aides. Pour certains collègues, c'est même la totalité qui est réclamée."

Qu'est-ce que le DIPA?

Le DIPA (Dispositif d’Indemnisation de la Perte d’Activité) - plus simplement appelé aides Covid - a été mis en place au printemps 2020 pour faire face aux difficultés financières des professionnels de santé libéraux en raison de la baisse d’activité liée au premier confinement. 

Les déclarations et les premiers versements se sont faits début mai 2020 pour la période du 16 mars au 30 avril 2020. Le dispositif a ensuite été étendu, progressivement mois par mois, au mois de mai, puis finalement au mois de juin. Les acomptes versés étaient au maximum de 80% des sommes à percevoir afin de tenir compte d’éventuelles erreurs de déclaration. Le calcul définitif et le versement du solde devaient être finalisés par les CPAM fin 2020.

Qu'est-ce qui se passe?

Pour le syndicat Union Dentaire dont Pierre Schmidt est le délégué départemental du Pas-de-Calais et secrétaire général national, le nouveau directeur de la CNAM, Thomas Fatome, nommé en juillet 2020, est revenu sur les principes de ce calcul institué par son prédécesseur. Les chiffres devaient être analysés période par période alors qu'à présent, elle inclut la période du mois de juin 2020 dans le comparatif. Ainsi, même si le professionnel de santé n'a demandé aucune aide en juin 2020, le travail effectué ce mois-ci est comptabilisé dans le nouveau calcul de l'Assurance Maladie. Selon ce syndicat c'est la raison principale pour laquelle l'État veut récupérer tout ou partie de l'aide octroyée pour payer les charges fixes durant la période de fermeture. 

Si ça continue on va nous accuser de fraude !

Pierre Schmidt, dentiste à Calais

"Déjà l'Assurance Maladie avait commencé par dire que les dentistes avaient mal renseigné leurs déclarations, précise Pierre Schmidt, si ça continue on va nous accuser de fraude vous allez voir !" Le chirurgien-dentiste calaisien le reconnait son activité avait repris en flèche à partir du mois de mai, comme pour la plupart de ses collègues. Mais pour lui ce changement dans le mode de calcul, c'est la preuve du profond mépris de l'Assurance Maladie à l'égard des professionnels libéraux de santé. "On a tous fait des gardes, on était en première ligne dès le début du Covid. J'avais rien du tout, pas de masque mis à part quelques vestiges qui restaient de l'époque de la grippe H1N1, pas de blouse. Il a fallu se débrouiller et on l'a fait." Pierre Schmidt met en garde le gouvernement : "la prochaine fois, il ne faudra pas venir nous chercher, on restera chez nous !"

Vers un étalement des remboursements ?

Contactée par France 3 Occitanie, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM), indique "ne pas avoir modifié le mode de calcul en cours de route. Elle ajoute que "certains professionnels ont effectivement bénéficié d’un trop-perçu en 2020. Il y a pu avoir des erreurs de déclaration, de bonne foi, lors de cette période compliquée, l’incompréhension des professionnels de santé concernés est compréhensible. C’est la raison pour laquelle les modalités de calcul vont être réexpliquées". 

A l'heure actuelle le bras de fer entre l'Assurance Maladie et l'Union Dentaire se poursuit. "Ils nous ont royalement proposé d'étaler sur douze mois les remboursements, précise Pierre Schmidt, si rien ne change on sera donc la seule profession à devoir rembourser une partie des aides versées. L’État ferait-il la même chose aux restaurateurs, professionnels du tourisme et des loisirs, à tous ceux qui sont touchés par cette crise et qui ont pu bénéficier d’une aide financière pour ne pas couler ?" Le syndicat a déjà envoyé plusieurs alertes en ce sens au Ministère de la Santé et à l'Assurance Maladie. Il prévoit maintenant une procédure juridique tant au niveau national que local et en appelle au président de la République Emmanuel Macron.

 

 

 

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