Entre mars et juin 2020, de nombreux professionnels de santé en libéral, en incapacité de travailler normalement, ont bénéficié d’aides de l’État. La moitié d’entre eux se voient réclamer un remboursement partiel. La colère gronde, chez les dentistes notamment, qui en appellent à Emmanuel Macron.
Rembourser les aides reçues pendant la crise sanitaire, cette demande met les soignants libéraux très en colère. Ils ne s'attendaient pas à cette soudaine décision de l'Assurance Maladie de modifier le mode de calcul des aides accordées.
53% des dentistes et 45% des médecins généralistes sont concernés par ce "trop-perçu". Le montant moyen du remboursement à effectuer est, en moyenne, de 4200€ chez les dentistes et de 1200€ chez les généralistes.
Retour sur les faits
16 mai 2020, le pays est à l’arrêt, confiné. Pendant près de deux mois, des professionnels de santé en libéral, comme les dentistes, ont eu interdiction d’exercer leur activité, tout en ne bénéficiant pas du statut de « fermeture administrative ». Leurs charges continuent donc de tomber et leurs salariés ne bénéficient alors pas du chômage partiel. Après d’âpres négociations, les chirurgiens-dentistes parviennent à faire partie des professionnels de santé bénéficiaires des aides de l’État pour compenser la perte d'activité.
Un mode de calcul très spécifique est alors instauré, se basant sur trois périodes bien distinctes (16 mars-30 avril, 1er mai-31 mai, 1er juin-30 juin) et sur une comparaison entre les charges fixes de 2019 et celles de 2020.
Les praticiens qui le souhaitent peuvent ainsi faire une demande en ligne. La Caisse Primaire d’Assurance Maladie indique alors aux libéraux bénéficiaires que « seuls 80% de l’aide accordée peuvent être touchés dans un premier temps, permettant ainsi de corriger les erreurs éventuelles de déclaration ».
De nombreux professionnels de santé font la demande pour la première période, leur activité étant réduite à néant. Puis à partir du 11 mai 2020, les restrictions sont levées, la reprise d'activité autorisée. Les cabinets dentaires, notamment, voient exploser les demandes de soins et doivent faire face à cette vague d’urgences après des semaines de fermeture.
Un nouveau mode de calcul défavorable aux praticiens libéraux
À l’été 2020, un changement du mode de calcul est soudainement décidé par l'Assurance Maladie, selon les praticiens de santé libéraux. L’aide ne concerne finalement pas une partie de la période allant du 16 mars au 30 juin 2020 mais l’intégralité. Changement de donne pour les professionnels de santé libéraux dont l’activité avait repris en flèche à partir du mois de mai.
En effet, le DIPA, l'aide accordée, prend finalement en compte la chute d'activité des soignants libéraux au même niveau que la reprise forte qui a suivi pour certains d'entre eux. Un changement qui signifie donc un remboursement partiel des sommes allouées pour certains praticiens.
Colère des dentistes
La colère gronde chez certains chirurgiens-dentistes qui recevoient une notification de demande de remboursement au lieu du solde des aides accordées initialement. Ils estiment cette injonction à rembourser injuste.
J’appelle cela un hold-up conventionnel ! Nous avions négocié avec l'Assurance Maladie une aide par période. Les parois bien étanches entre les différentes périodes ont soudainement sauté ».
Le Dr Alain Dary, dentiste à Toulouse, ajoute : C’est une punition faite aux professionnels de santé pour avoir été présents pendant la crise sanitaire. Certains dentistes ont travaillé très tard le samedi soir et pris des gardes le dimanche pour recevoir des patients en urgence. Ces aides, qui étaient bien des aides et non des avances sur trésorerie, ont été intégrées aux charges sociales et aux impôts. Et soudainement, on nous reprend ces sous pour avoir trop travaillé en mai et en juin. Nous sommes très en colère que l’Assurance Maladie soit revenue sur ce qui avait été négocié, à savoir cette aide (dite DIPA) pour couvrir les charges fixes.
Plus de 31 000 praticiens en chirurgie dentaire en France ont reçu des aides. 16 610 sont impactés par ce nouveau mode de calcul, en leur défaveur.
L'Assurance Maladie se défend d'avoir effectué des changements
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) d'Occitanie, contactée par France 3, indique "ne pas avoir modifié le mode de calcul en cours de route. Elle ajoute que "certains professionnels ont effectivement bénéficié d’un trop-perçu en 2020. Il y a pu avoir des erreurs de déclaration, de bonne foi, lors de cette période compliquée, l’incompréhension des professionnels de santé concernés est compréhensible. C’est la raison pour laquelle les modalités de calcul vont être réexpliquées".
L’Union Dentaire en appelle aujourd’hui au président de la République, Emmanuel Macron, "pour intercéder auprès de l’Assurance Maladie et faire stopper ces demandes de remboursement". Elle se dit prête à lancer une action juridique si nécessaire.
Pour l'heure, l'Assurance Maladie a simplement accepté "d'échelonner le remboursement sur 12 mois".