Psychoses, AVC, embolies pulmonaires potentiellement mortelles, la consommation du protoxyde d'azote détourné de son usage fait des ravages à Toulouse comme partout en France. De plus en plus de phénomènes d'addiction sont constatés chez les jeunes.
En ville, sur le bord des trottoirs, sur les ronds-points, des bonbonnes bleue jetées au sol se multiplient. Elles contiennent à l'origine du protoxyde d'azote. Un gaz hilarant, euphorisant de plus en plus utilisé en soirée, mais dont les effets peuvent être dramatiques sur la santé physique et mentale.
Un phénomène qui concerne Toulouse mais pas seulement.
Prévention | L'@ARS_HDF rediffuse cet automne sa campagne pour sensibiliser les 15-25 ans et leur entourage aux risques liés à la consommation de protoxyde d'azote
— ARS Hauts-de-France (@ARS_HDF) November 22, 2024
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Gaz euphorisant
Un gaz que connaissent bien des jeunes interrogés aux abords d'un établissement scolaire de Toulouse. Tous n'en ont pas consommé. Mais tous semblent le connaître. "Je connais des gens de mon entourage qui en prennent. Ils recherchent le plaisir, pour oublier. Ça leur fait du bien", indique une jeune fille. "C'est une sensation, comme si tu étais dans un autre monde. J’en connais deux ou trois qui en prennent, pas plus. Ils ont autour de 20 ans", témoigne un autre.
À l’origine, ces bonbonnes sont destinées à l'alimentation. On les retrouve à la vente dans certains commerces mais bien sûr aussi sur les réseaux sociaux. "Tu en trouves à 10, 15, 20 euros sur des groupes snap", affirme une adolescente. Mais ce gaz, considéré comme festif, a de graves conséquences sur la santé. Les pouvoirs publics tentent d'alerter.
#Prévention #Santé
— Préfecture de la région Hauts-de-France et du Nord (@prefet59) December 16, 2024
L’usage détourné du protoxyde d’azote (dit « gaz hilarant ») entraîne des conséquences sévères sur la santé.
Au moins 120 cas graves recensés en Hauts-de-France en 2023.
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Paralysies, embolies pulmonaires
Maryse Lapeyre-Mestre est pharmacologue et directrice du centre d'addictovigilance de Midi-Pyrénées. "Ce gaz est utilisé dans les soirées étudiantes, des écoles supérieures, des universités. C'est un gaz qui a des effets euphorisants, désinhibant. On le trouve très facilement. C'était un usage récréatif il y a quelque temps, Et puis il y a eu une bascule avec une augmentation de la fréquence des usages et certains sont devenus accros".
Elle alerte sur les effets délétères sur la santé. "On a vu arriver des jeunes gens avec des neuropathies inexpliquées. Des gens qui ne tenaient plus debout avec des paralysies, des picotements dans les membres. Le point commun c'était une consommation excessive de protoxyde d'azote. Ce produit s'accumule et agit sur les nerfs", explique-t-elle.
Et les dangers ne s'arrêtent pas là. Une consommation fréquente peut aussi entraîner d'autres troubles dont certains peuvent être mortels. "On a des AVC, des thromboses veineuses profondes, des embolies pulmonaires, des troubles psy qui évoluent en psychoses", prévient Maryse Lapeyre-Mestre.
Phénomène d'addiction
Elle a vu les pathologies s'enchaîner pour certains jeunes gens. "On va traiter quelqu’un pour une thrombose. On le soigne. Et puis on le revoit plus tard pour une embolie pulmonaire potentiellement mortelle".
De récréatif, le phénomène est devenu addictif pour certains. Les médecins se voient souvent confrontés au déni de consommation excessive. "Pour certains patients, un suivi en addictologie serait nécessaire mais ils ne considèrent pas qu'ils manquent de contrôles sur leur consommation", a constaté Maryse Lapeyre-Mestre.
L’augmentation du nombre des consommateurs est inquiétante
- 13,7 % des 18-24 ans ont consommé au moins une fois dans leur vie du protoxyde d’azote
- 3,2 % des 18-24 ans en ont consommé au cours de l’année
Propos recueillis par J.Valin et E.Coorevits