« J’ai décidé de vivre heureux mais pas caché » : Monsieur le maire d’Estevelles devient Madame la maire

C’est la première fois en France qu’un maire déclare sa transidentité en plein exercice. Élu dans la commune d’Estevelles, près de Lens, dans le Pas-de-Calais, il a annoncé sa transition pour devenir une femme. Alain Szabo, 63 ans, s’appellera donc désormais Estelle Szabo. Un choix soutenu par le conseil municipal de la commune.

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Dès ce vendredi 14 avril, Alain Szabo devient Estelle Szabo, Monsieur le maire d’Estevelles devient Madame la maire : "J’ai décidé après une très longue réflexion de m’engager dans un parcours transidentitaire de changement de genre."

L’annonce a été faite mercredi soir au conseil municipal. "J’étais sur une intention très forte de démissionner, voire de déménager. Le proverbe dit : vivons heureux, vivons cachés.. et finalement j’ai décidé de vivre heureux mais pas caché", explique l’édile*, qui a reçu l’appui de la majorité des élus de la commune pour continuer son mandat malgré son parcours de transition, une première en France.

On peut avoir une différence et avoir des fonctions publiques et politiques qui peuvent être acceptées. Aujourd’hui je suis fier d’avoir eu confiance en moi.

Estelle Szabo, maire d'Estevelles

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Avant cela, Alain Szabo a consulté le ministère de l’intérieur pour s’assurer qu’il pourrait continuer d'être maire malgré son processus de transition et son changement d’identité, qui devrait être officiellement prononcé par le tribunal de Béthune bientôt. Une fierté pour Estelle Szabo : "On peut avoir une différence et avoir des fonctions publiques et politiques qui peuvent être acceptées. Aujourd’hui je suis fier d’avoir eu confiance en moi."

Dysphorie de genre

Alain a reçu le soutien de son épouse et de ses quatre enfants pour devenir Estelle : "Peut-être que la transition la plus difficile, c’est la transition familiale : annoncer à ses proches, à ses enfants ce qu’on est, alors que pendant 63 ans ils nous ont aimé, mais pas tout à fait sous la même forme. J’ai de la chance, j’ai le soutien de mon épouse avec qui je resterai marié, toute la famille me soutient."

J’ai de la chance, j’ai le soutien de mon épouse avec qui je resterai marié, toute la famille me soutient.

Estelle Szabo, maire d'Estevelles

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Selon ses propres termes, Alain Szabo vit depuis toujours une dysphorie de genre : "c’est la souffrance de ne pas être dans le bon genre. Ça n’a rien à voir avec l’orientation sexuelle, c’est quelque chose de beaucoup plus psychologique et cérébral, qui naît dans la petite enfance, et qui doit être diagnostiqué par un psychiatre." L’élu reconnaît avoir refoulé cela pendant des années : "j’ai eu une vie normale d’homme, avec un parcours assez riche. J’ai une belle histoire et cette belle histoire elle continue, je ne suis pas dans la rupture avec mon passé, mais dans la continuité." Désormais, fini le costume cravate, Estelle portera des robes. Sa transformation passe aussi par une prise d’hormones, des opérations chirurgicales, de l’orthophonie, ou encore de la dermatologie.

"Ça ne change rien à mon travail"

Les agents municipaux ont été informés jeudi matin : "j’ai évidemment été un peu surpris au début car on ne s’y attendait pas. Mais ça ne va rien changer à mon travail", déclare Franck Lohez, animateur périscolaire, "le plus important c’est que monsieur le maire, enfin madame la maire maintenant, se sente bien dans sa peau". Un sentiment partagé par Cécile Caboche, responsable du service administratif : "ça ne va rien changer à ma façon de travailler. Il faut respecter ses choix."

Je n’y vois aucun inconvénient. S’il se sent mieux dans sa peau comme cela, tant mieux.

Une habitante d'Estevelles

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Mêmes réactions dans les rues de la commune. Les quelques habitants que nous avons rencontrés respectent aussi le choix de leur maire : "ça ne me choque plus à l’heure actuelle, avec tout ce qu’on voit à la télé et sur les réseaux", reconnaît un homme à vélo, tout comme cette dame croisée dans le centre ville : "Je n’y vois aucun inconvénient. S’il se sent mieux dans sa peau comme cela, tant mieux. Je viens d’en parler avec une amie, qui n’est pas du tout choqué non plus." Tous les Estevellois ont été informés du changement d'identité de leur maire par un courrier reçu dans leur boîte aux lettres. 

*L'interview a été réalisée jeudi matin, et l'intéressé parlait encore de lui au masculin. 

L’idéal ce serait qu’on n'en parle pas, que ça devienne quelque chose de naturel. Mais aujourd’hui ce n’est pas encore le cas donc je trouve que c’est un beau geste politique puisqu’il y a eu un vote de confiance au conseil municipal, ça va dans le bon sens. Statistiquement on devrait avoir 30 à 40 maires trans en France, donc il y a encore beaucoup de coming-outs à venir. Je les encourage à le faire, à ne pas avoir peur, et à montrer que la société française est finalement très bienveillante.

Marie Cau, maire de Tilloy-lez-Marchiennes, transgenre

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