RC Lens : entretien avec Arnaud Pouille, directeur général du club, "Garder notre ADN et essayer d'aller titiller les plus gros"

A l'occasion de notre émission spéciale Enquêtes de région sur le Racing club de Lens, le directeur général du club nous a accordé un entretien. Arnaud Pouille est en fonction depuis 2017. Cet homme de territoire fréquente le Stade Bollaert depuis son enfance. Il nous répond entre souvenirs et stratégie d'investissement.

France 3 : Joseph Oughourlian est président du RC Lens. Vous en êtes le directeur général. On dit parfois qu'il est l'investisseur et vous l'homme de territoire. C'est ça la répartition entre vous ?

Arnaud Pouille : Oui, c'est un peu comme ça qu'on se répartit les rôles. Joseph est le propriétaire, il est également propriétaire d'autres clubs. Il a aussi sa profession. Il investit dans beaucoup de sociétés. Il ne peut pas toujours être là. Donc, oui, c'est vrai qu'au quotidien, je suis là. Je suis présent.

Vous êtes un Ch'ti pur sucre. Il représente quoi ce club pour vous ?

AP : Beaucoup de souvenirs déjà. Moi, ça fait une quarantaine d'années que je viens ici. Depuis 5-6 ans, c'est un mélange de plaisir et d'ambition. Quand on est au service du club, on se remémore les souvenirs et on essaie d'en créer de nouveau pour les futures générations.

Vous étiez tout minot quand vous êtes venu la première fois ?

AP : Oui, j'avais 10 ans. À l’époque, ça s'appelait les "secondes". Il y avait des grilles devant. Votre père venait et il vous lâchait. Vous alliez vous accrocher aux grilles. Vous essayiez d'obtenir des autographes. Pendant ce temps-là, il prenait un verre à la buvette derrière. Il vous récupérait à la fin du match. C'était sympa.

Il n'y a pas très longtemps dans la presse, vous avez dit que le RC Lens était une "anomalie". Ça veut dire quoi ?

AP : Il y a un territoire important ici sur le bassin minier, mais quand on regarde la ville, c'est une 30aine de milliers de personnes. (…) Sur la carte de France, c'est une anomalie… Même sur la carte d'Europe. Il n'y a pas très longtemps, on était classé comme le club qui avait la plus forte valeur de joueurs, c'est un critère économique, avec le plus petit territoire. (…) Statistiquement, on n'est pas sur des ratios communs.

Impossible de parler du RC Lens sans évoquer Gervais Martel, l'ancien président du club. Voici l'extrait d'un reportage réalisé entre 1988, son arrivée à la tête des Sang et Or, et le titre de champion de France en 1998 : 

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Gervais Martel arrive à la présidence du RC Lens en 1988. Dès les premières heures de son mandat, il évoque l'importance des investisseurs régionaux. ©FTV

Gervais Martel est parti en 2017. Il est encore inspirant pour vous ?

AP : Oui, parce que Gervais a cette fibre locale et passionnée. Dans ces métiers-là, et je pense encore plus chez nous, il faut avoir la passion. Entre les images du titre en 1998 et son discours sur la recherche de partenaires en 1988, il y a une dizaine d'années. On voit bien que ce sont des choses qui se construisent petit à petit et qui prennent du temps.

En 5 ans, vous avez réussi à redresser ce club du RC Lens. C'est une source de satisfaction ?

AP : Oui, après c'est aussi une source parfois d'inquiétude. Une partie de mon boulot au quotidien, c'est de me rappeler qu'on a vécu des émotions tous ensemble, mais aussi de bien garder les pieds sur terre…

C'est fragile ?

AP : C'est fragile. C'est un monde compétitif, très dur, empreint de jalousie et de rapport de force. Il faut vraiment garder les bons souvenirs mais aussi se rappeler que, dans le sport, ça va vite.

Il faut aller chercher des investisseurs sur le territoire et au-delà. En septembre, vous avez annoncé Side-Invest, la Région et l'Association familiale Mulliez à hauteur de 20 millions d'euros. Est-ce que ça va suffire ?

AP : Oui, c'est une première étape et je trouve que c'est bien. Après, ce qui est encore mieux, c'est que ce soit des partenaires régionaux. C'est dans notre fibre. On essaye de porter haut les valeurs de la région. Et puis, c'est novateur dans le sens où la Région, IRD (l'organe de gestion) et l'AFM cherchaient à créer quelque chose autour d'investissement public-privé. Je trouve que ça nous va bien. Ça nous correspond. Qu'on soit leur premier investissement, j'ai envie de dire : tant mieux ! On essaiera de leur donner entière satisfaction.

Est-ce qu'il y a vraiment le potentiel financier dans la région pour vous apporter ce soutien ?

AP : Le sport, ce n'est pas que de la finance. Heureusement ! Sinon on n'aurait pas fini deuxième (du championnat l'an dernier). Le sport, c'est aussi de l'identité. Oui, c'est devenu un business. (…) Ce qu'il faut, c'est qu'on travaille tout ça et que, autour de l'argent qui est investi, on continue à rester Lens. Garder notre ADN et essayer d'aller titiller les plus gros.

C'est pour ça qu'il est question d'actionnariat populaire ici à Lens ? Elle vous plaît cette idée ?

AP : Oui, c'est quelque chose qui plaît, mais qu'il faut bien faire. Ça dépend aussi des cultures nationales. (…) On est sur un modèle un peu particulier qui est en train de migrer. Avant, tout était public jusqu'à la fin des années 1990. Maintenant, c'est privé, un mix public-privé parfois. Il faut qu'on aborde bien ce virage.

Chez nous, il y a une particularité : ce qu'il y a de bien vient des supporters souvent, très souvent, les idées d'animation, d'accompagnement du club… Donc oui, la porte est ouverte. On les attend. On discute avec eux. On les attend aussi sur leur proposition de solution. Le mariage entre une propriété privée et une propriété plus collective avec des supporters, on y travaille, mais ils ont aussi une part du boulot à faire.

Des supporters actionnaires, ça irait bien à l'image d'un club comme Lens !

AP : Ça irait bien, d'autant qu'en ce moment, on est en train de discuter avec les collectivités sur un rachat potentiel du (stade). Racheter le stade sans avoir les supporters actionnaires, ça serait un peu particulier. On vient de la compagnie des mines. Ça a toujours été collectif. Il faut que ça le reste quelque part. C'est notre ADN. On ne peut pas se trahir en fait.

Où en est-il le rachat du stade ?

On attend l'évaluation du ministère des Finances. On l'attend avec impatience. On a bien discuté. Il y a des contraintes. Mais il y a des discussions qui sont saines.

Vous êtes prêts à mettre combien sur la table ?

Ah ça… (rires)… Je laisse à la fois Joseph (Oughourlian) et le maire de Lens communiquer… Ou le Président de la Région.

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pouille itv rc lens ©France Télévisions

Découvrez ci-dessus l'interview intégrale d'Arnaud Pouille, président du RC Lens.

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Le club mythique qui véhicule toutes les valeurs des Hauts-de-France : travail, solidarité, convivialité, est à l’honneur dans le magazine de reportages de France 3 Hauts-de-France.

"RC Lens, une épopée des Hauts-de-France"
présenté par Ophélie Masure 

Ce mercredi 22 novembre à 23:10 sur France 3 Hauts-de-France ou à 
à découvrir ici après la diffusion. 

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