L'Ehpad d'Arnèke subit de plein fouet l'épidémie de coronavirus, malgré des précautions prises avant les sommations gouvernementales. Six patients sont déjà décédés cette semaine. Le directeur espère, sans certitude, que l'épidémie a "atteint son pic" dans l'établissement.
"Les nouvelles ne sont pas bonnes", écrit Frédéric Delautre sur Facebook hier vendredi 10 avril. Le directeur de l'Ehpad Van Kempen à Arnèke, entre Saint-Omer et Hazebrouck (Nord), communique avec les familles des résidents via le réseau social.
Depuis le début du mois d'avril, six personnes de l'établissement sont décédées, dont quatre au moins du coronavirus. Sur 80 résidents, une vingtaine serait atteints du virus. Des chiffres difficiles à encaisser pour l'établissement qui avait pourtant pris toutes les mesures nécessaires avant qu'elles ne soient demandées par le gouvernement.
"Nous avons interdit les visites dès le 8 mars et confiné les résidents dans leur chambre dès le 22 mars au matin, donc nous avions environ 5 jours d'avance sur le gouvernement", explique Frédéric Delautre. À ce jour, la résidence n'a aucune explication sur la manière dont le virus est arrivé.
"On ne sait pas qui a amené le virus... et c'est peut-être mieux"
Le personnel soignant continue de travailler malgré les difficultés, dont la culpabilité d'être à l'origine de la propagation du virus dans l'Ehpad. "On ne sait pas qui a amené le virus... et c'est peut-être mieux", estime son directeur. La messe est dite chaque jour dans cet établissement aussi fréquenté par des prestataires et bien sûr les salariés.
"... Nos soignants craquent, j’ai vu beaucoup de nos salariés pleurer ces derniers jours (...) les yeux rougis certes, chacun se ressaisit afin de se rendre disponible et efficace."
Frédéric Delautre aux familles des résidents le 10 avril 2020.
Ce samedi, trois salariés ont été testés positifs au Covid-19 et six à sept sont en arrêt maladie car ils présentent des symptômes de la maladie.
En pleine crise, l'Ehpad renforce sa protection
Pour surmonter cette épreuve, l'établissement a embauché une personne supplémentaire affectée exclusivement à la désinfection plusieurs fois par jour des sols, clinches, interrupteurs… Avant leur prise de poste, les salariés revoient les consignes de sécurité et s'équipent en masques et de combinaisons. Une cellule de soutien psychologique a été mise en place pour les soignants en difficulté face à la situation.
Une bonne nouvelle est aussi arrivée ce samedi midi : l'ARS Hauts-de-France a informé la résidence Van Kempen que des dépistages massifs des résidents et des salariés allaient être effectués. "Nous sommes très satisfaits, d'autant que beaucoup d'entre nous peuvent être asymptomatique", remarque Frédéric Delautre.
Le CHU de Lille a débuté vendredi 10 avril les dépistages dans un Ehpad du centre-ville. Pour l'établissement d'Arnèke, aucune date précise n'est donnée mais le directeur s'attend à des tests rapides.
Dépistage #COVIDー19 : le #CHU_Lille installe une équipe de prélèvement mobile pour aider les #EHPAD du territoire dans le dépistage des résidents.?La qualité du prélèvement conditionne la validité des résultats.
— CHU de Lille (@CHU_Lille) April 10, 2020
?Première sortie à la résidence au vert feuillage.@hautsdefrance pic.twitter.com/aTkgMVGVVG
Le soutien des familles est déterminant dans la gestion de la crise
Frédéric Delautre prend soin d'échanger autant que possible avec les familles. Il sait qu'il peut compter sur leur soutien, y compris celles qui viennent de perdre un proche. En communiquant via Facebook, l'Ehpad veut assurer un lien le plus étroit et le plus transparent possible. Ce soutien permet au personnel soignant de déculpabiliser face aux situations tragiques auxquelles ils font face.
"Nos premières pensées seront (comme j’ai déjà pu leur exprimer) à l’intention des familles et de leurs proches, qui outre la douleur de la perte d’un être cher se trouvent confrontés à l’obligation d’organiser de façon précipitée leurs obsèques dans des conditions qui à coup sûr rendra un travail de deuil encore plus difficile."
Frédéric Delautre sur Facebook le 10 avril 2020.
Quant à l'avenir, l'Ehpad a beau consulter de nombreux médecins, impossible de savoir si le pic est déjà atteint. "On ose espérer qu'il est atteint, mais sans aucune certitude bien sûr". Dans les Hauts-de-France, environ deux cents personnes sont mortes en Ehpad depuis le début de l'épidémie.