La Cour de cassation va examiner ce mercredi le pourvoi du géant du pneu, qui conteste l’arrêt de la cour d’appel d’Amiens. Cette dernière a donné raison aux ex-Conti qui contestent le motif économique de leur licenciement.
C'est le deuxième combat des "ex-Conti", celui des grands principes, qui se joue devant la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire. "L'enjeu est celui du co-emploi qui permet aujourd'hui dans le droit français de faire porter la responsabilité sociale de la fermeture d'une filiale et d'un licenciement collectif, à la société-mère qui en a pris la décision", résume Me Fiodor Rilov, avocat des ex-salariés. L'arrêt dépassera le cas de Continental, car il adressera un message aux multinationales qui pratiquent "l'optimisation sociale" en ouvrant et fermant des usines sans vouloir en assumer la responsabilité, estime l'avocat.
La Cour de cassation a été saisie en novembre 2014 par Continental qui souhaite pouvoir faire voler en éclats cette notion de "co-emploi", une particularité du droit français. Le fabricant de pneumatiques venait de subir un échec devant la cour d'appel d'Amiens à propos du licenciement de 683 salariés de cette usine de pneus située dans l'Oise, au terme d'un dur conflit social.
Pour la justice, ces licenciements annoncés au printemps 2009 n'avaient "pas de justification économique". La cour, retenant la notion de co-emploi, avait condamné solidairement la maison-mère et sa filiale. Continental avait dû s'acquitter du versement de 29 millions d'euros d'indemnités.
Devant la Cour de cassation, le 18 mai dernier, l'avocate de l'équipementier allemand s'est employée à démontrer que la filiale française était bien une entité distincte et à critiquer le "co-emploi", en indiquant que "la France est l'un des rares, si ce n'est le seul pays au monde, à avoir cette notion".
"Une mère abusive"
Pour elle, la maison mère allemande ne s'est pas impliquée de manière "pathologique" dans les affaires de Continental France et ne mérite donc pas d'être traitée comme une "mère abusive". L'avocat général, qui représente le ministère public, a lui aussi remis en question cette notion de "co-emploi", "des plus délicates" surtout "dans le cadre d'une concurrence mondialisée" entre multinationales. Mieux vaut selon lui s'en remettre au droit de la responsabilité civile pour faire face à des sociétés-mères "prédatrices".Si la Cour de cassation rejette le pourvoi, Continental aura épuisé les recours de la justice française et les condamnations seront définitives. Si elle accueille le pourvoi, l’affaire sera renvoyée devant une nouvelle cour d’appel.