Mohamed Manoubi, qui a récemment ouvert un salon de coiffure à Albert, dans la Somme, a déposé plainte. Il dit avoir découvert une tête de porc grillée, laissée sur le pallier de son commerce.
Si c'est une blague, elle est de bien mauvais goût. Mohamed Manoubi, nouveau coiffeur du centre-ville d'Albert (80) depuis le 4 août, se retrouve résumé à ses origines tunisiennes, en ce dimanche 11 septembre. "Ce matin vers 7h30, je commençais à travailler, laver les serviettes.... et j'ai vu un truc noir devant l'entrée, raconte-t-il. Je me suis avancé et j'ai vu la tête de cochon. Mettez-vous à ma place..."
Un reportage d'Inès Tayeb, Marie Benoist et Cédric Delangle avec Mohamed Manoubi, coiffeur et Amélie Defrance ;
Dans la foulée, Mohamed Manoubi appelle les gendarmes, qui arrivent un quart d'heure plus tard et prennent des photos. Le coiffeur porte plainte et fait une déposition.
Une enquête a été ouverte. Le maire d'Albert, Stéphane Demilly, aurait très rapidement rencontré l'épouse de Mohamed Manoubi (l'intéressé n'était pas chez lui à ce moment) pour se renseigner sur l'affaire.
"Je suis dégoûté"
Mohamed en est certain : "J'ai été victime d'un acte racial". Il n'avait pas subi d'attaque directe depuis son arrivée à Albert. Mais selon lui, "avec le terrorisme et tout ce qu'il se passe, il y a une grosse haine qui monte contre les métissés, les arabes, les gens convertis à l’Islam..."Installé depuis dix ans en France, Mohamed Manoubi "tient le coup". "Dommage pour certains, je suis arabe, tunisien,... Les terroristes, ce sont des gens carrément nés en France et qui foutent la France en l'air, alors que nous on est venu ici avec un savoir-faire", défend-il.
Il le dit très naturellement : le coiffeur est "passé par la case prison", condamné à deux ans d'incarcération. "En novembre 2015, la juge d'application des peines m'a donné une chance pour être réinséré et elle est aujourd'hui très contente", explique le coiffeur.
D'abord en semi-liberté avec un contrat de travail dans un salon de coiffure, il dit avoir économisé pendant huit mois pour monter son propre projet professionnel "sans aides de la famille ou des banques" : "J'ai travaillé comme un dur, depuis un mois et demi ça marche super bien, les clients sont super satisfaits... et voilà ce qui se passe aujourd'hui. Je suis dégoûté."