Les conseillers prud’homaux d'Abbeville s'inquiètent du possible transfert de leurs activités vers Amiens

Le ministère de la Justice envisagerait de déplacer les sections encadrement et agriculture du tribunal des prud’hommes d’Abbeville vers Amiens dès la rentrée judiciaire du 1er janvier 2023. Pour les conseillers prud’homaux, c'est le signe d'une fin programmée pour le tribunal.

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"Cette mesure nous paraît aller à l'encontre d'une justice de proximité, à l'écoute des justiciables et jugeant en toute équité." Dans une lettre adressée à la première présidente de la Cour d'Appel d'Amiens, le président et le vice-président du Conseil des Prud'hommes d’Abbeville ne cachent pas leurs inquiétudes. 

Le ministère de la Justice envisagerait, en effet, de déplacer les sections encadrement et agriculture du tribunal des prud’hommes d’Abbeville vers Amiens. Un transfert qui serait effectif dès la rentrée judiciaire du 1er janvier 2023. Deux des cinq sections seraient alors fermées et il ne resterait que les conseillers chargés de juger les activités diverses, l'industrie et le commerce.

Pour les conseillers prud’homaux d'Abbeville, c'est le signe d'une disparition progressive du tribunal. "Il en résultera un affaiblissement global de la structure qui, devenant une annexe du conseil de prud'hommes d'Amiens, ne tardera pas à voir l'ensemble de ses moyens humains et matériels transférés à Amiens dans un souci de « rationalisation » et « d'économie »", indiquent-ils dans un communiqué. 

Des délais de jugements trop longs selon un rapport

L'année dernière, dans un rapport, un groupe de travail sénatorial évoque la nécessité d'une justice prud'homale plus efficace sachant que les délais de jugement moyens dépassent les 16 mois en France. Il relève aussi que les deux tiers des jugements des conseils de prud'hommes sont frappés d'appel, contre moins d'un cinquième des tribunaux de grande instance, traduisant un manque d'acceptabilité des décisions des conseils de prud'hommes. 

Ces éléments sont contredits par les présidents et vice-président du Conseil des Prud'hommes d’Abbeville qui indiquent qu'au cours des dix dernières années, le délai de jugement moyen des sections visées à Abbeville est de 10,3 mois. Également, pour la section encadrement, de 2009 à 2019, seuls 29 % des jugements ont été frappés d'appel et pour la section agriculture, 18,78 %. "Nous sommes bien loin des deux-tiers de la moyenne nationale !", s'indignent-ils. 

Une décision d'autant plus surprenante que la section encadrement prend une importance grandissante au sein du conseil. "Au cours des dix dernières années, de 2009 à 2019, la section encadrement totalisait un peu plus de 7% du total des nouvelles affaires au conseil des prud'hommes d'Abbeville. Lors des trois dernières années (2017, 2018, 2019) la moyenne s'est élevée à 12%", écrivent-ils. 

Pour le président du département : "cet éloignement n'est pas acceptable"

Les conseillers prud’homaux mettent également l'accent sur l'ancrage local indispensable, notamment en Picardie Maritime, dont les entreprises présentent "des activités et un contexte économique particuliers". Une position que soutient Stéphane Haussoulier. Le président du conseil départemental de la Somme a adressé un courrier au ministre de la Justice, demandant à ce que l'ensemble des activités des Conseils des prud'hommes d'Abbeville et Péronne soient maintenues.

"Dans un département marqué par des indicateurs socio-économiques très dégradés, des difficultés de mobilité d'une grande partie de la population, cette même population qui a déjà souffert d'une désertification administrative et économique avec la fermeture de nombreuses administrations ces dernières années, cet éloignement n'est pas acceptable. Il comporte le risque de dissuader les justiciables de faire valoir leurs droits", indique-t-il. 

Ce serait en effet un nouveau coup porté à la justice de proximité, alors qu'Abbeville avait déjà dû se priver de son tribunal de grande instance en 2007.

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