Dégradations, manque d'intimité, incivilités : les propriétaires de parcelles des hortillonnages d'Amiens plaident pour un tourisme plus raisonné

Chaque année, les hortillonnages d'Amiens attirent plus de 200 000 visiteurs. Mais il existe un revers à la médaille : la multiplication des visites peu ou pas encadrées entraîne des incivilités et des dégradations qui agacent les propriétaires de parcelles.

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Écrin de nature idéal pour une sortie en famille, en couple ou entre amis, les hortillonnages d'Amiens sont devenus incontournables pour les touristes. Cette année, la fréquentation est remontée au niveau d'avant la crise sanitaire, et l'a même dépassé au mois de juillet.

Le site est devenu une telle promotion pour la ville qu'on en oublie un détail important : il est entièrement privé, partagé entre 1 300 propriétaires. Et s'ils ne sont pas opposés au tourisme, certains d'entre eux constatent que la hausse de la fréquentation et la multiplication des offres de visites riment avec une augmentation des incivilités.

L'agacement des propriétaires

Marcel Lopez, qui y vit depuis plus de soixante ans, a fini par installer un paravent pour cacher sa terrasse à la vue des visiteurs, et des caméras un peu partout sur sa propriété. "Certains détruisent les rives, d'autres se permettent de cueillir les fleurs, et j'ai même eu des vols de légumes !, assure-t-il. J'ai mis des panneaux de sens interdit, ça a éliminé à peu près 50% des gens. Il y a ceux qui sont corrects, qui font marche arrière et qui s'en vont en voyant les panneaux, mais il y en a d'autres qui passent quand même, et certains qui m'insultent quand je leur dis quelque chose."

Barques, canoës gonflables, paddles, il voit passer toutes sortes d'embarcations devant chez lui, hors des circuits habituels, à toute heure. "Au 15 août, grâce à mes caméras, j'ai compté 75 embarcations dans l'après-midi ! Là, on arrive en fin de saison, ça se calme un petit peu, mais ça va repartir vers le 15 septembre."

Pour un tourisme plus vertueux

Pour limiter les nuisances, l'association de sauvegarde des hortillonnages, pionnière dans les visites guidées, a instauré certaines règles. "On part sur un parcours fléché, défini et bien encadré. Les visites ont lieu le matin et l'après-midi, avec une coupure pour permettre aux propriétaires de déjeuner en toute quiétude. On pourrait commencer les visites dès 7h et les finir à 21h, mais on essaye d'encadrer au maximum, affirme Antoine Caux, secrétaire adjoint de l'association. On avoisinera les 12 000 visiteurs en fin de saison. On pourrait faire beaucoup plus, mais on cherche à se raisonner, car le but n'est pas de faire du chiffre et d'accumuler de l'argent. La finalité de ces visites, c'est de récolter des fonds pour acheter du matériel pour permettre aux propriétaires de rénover leurs parcelles." Tous les bénéfices de l'association sont effectivement réinvestis dans l'entretien et la sauvegarde du site. 

Un fonctionnement vertueux, plébiscité par les propriétaires, mais qui n'est pas appliqué par tous les prestataires qui proposent des visites. "Ce qu'on condamne, la multiplication des prestataires privés qui offrent des promenades tarifées sans aucune règlementation, explique Bruno Bréart, président de l'association SOS Hortillonnages. Il n'est pas rare de rencontrer une douzaine de passagers dans une petite barque en PCV, sans gilets de sauvetage."

L'association créée en 2019 milite pour une règlementation des visites touristiques sur le site, par le biais par exemple d'une autorisation préfectorale, et pour la mise en place d'une taxe sur les embarcations. "On recherche le meilleur compromis possible pour assurer la promotion du site, mais aussi sa sauvegarde, puisque c'est un site historique et environnemental sensible, qui nécessite un entretien."

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