Échec de WN, ex-Whirpool, à Amiens : l'ancien PDG Nicolas Decayeux rejette "l'entière responsabilité du dossier"

En 2017, Nicolas Decayeux proposait de reprendre le site de Whirlpool à Amiens. Mais deux ans plus tard, son entreprise WN a été placée en liquidation judiciaire. Très critiqué par les salariés et les financeurs publics pour sa gestion, l'industriel publie un livre pour donner sa vérité.

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C'est en juin 2019 que l'aventure WN est définitivement arrêtée. Le tribunal de commerce d'Amiens décide du placement en  redressement judiciaire de la société. Le groupe Ageco lui succède et reprend le site avec seulement 44 salariés.

Deux ans plus tôt pourtant, toutes les planètes semblaient alignées : Nicolas Decayeux, alors chef d’entreprise picard respecté, président du Medef local, avait proposé un projet de reprise par la diversification des productions qui avait séduit salariés comme investisseurs (État, région, métropole) : voitures électriques, casiers connectés, équipements de scooters. Et la conservation de 200 emplois.

Une reprise qui fait rêver

À l'époque, tout le monde voulait croire à ce sursaut de l'industrie amiénoise en souffrance, dont Whirlpool était devenu le symbole depuis l'annonce en janvier 2017 d'une délocalisation de son site vers la Pologne, mettant en péril 290 emplois.

Emmanuel Macron, une fois élu président de la République, avait même promis une aide de quatre millions d’euros à WN et Whirlpool un chèque à son successeur de sept millions d’euros. En 2018, sur France 3 Picardie, Nicolas Decayeux estimait même que l’entreprise serait rentable à partir de 2020. Mais rien ne s'est passé comme prévu. Et finalement, aucun des produits n’a été développé à grande échelle.

Un échec qui fait jaser

Pointé du doigt par les salariés comme par les autorités pour sa gestion (absence de clients, un salaire de 23 000 euros qu'il se versait alors que l'entreprise ne générait pas de profit) et ses promesses non tenues, Nicolas Decayeux a choisi de répondre aux accusations. Dans l'ouvrage Leçons de savoir perdre et gagner - Manuel de survie à l'attention des entrepreneurs et des industriels (NBE Editions), il livre sa version de l'histoire.

Selon l'éditeur, cet ouvrage fait "l'analyse rétrospective d'une mise au rencart d'un outil industriel" et "retrace les principaux événements d'un gâchis préjudiciable à tous les protagonistes impliqués, afin d'en tirer un enseignement profitable à tous".

Le livre publié jeudi 16 septembre passe mal auprès d'anciens salariés et représentants syndicaux : "C'est encore redonner un coup de couteau, c'est encore piquer les salariés", selon Frédéric Chantrelle, ancien délégué syndical CFDT Whirlpool. Christophe Beaugrand, porte-parole des anciens salariés de WN confirme : "J'ai certains collègues qui prennent ça comme une provocation. Je pense plutôt qu'il prépare sa défense", faisant référence à la convocation de Nicolas Decayeux le 9 décembre prochain devant le tribunal d'Amiens pour banqueroute et détournement d'actifs.

 Je me suis lancé dans l'opération WN, un projet citoyen, parce que j'avais une vraie conviction de défendre l'industrie en France.

Nicolas Decayeux

Jeudi 16 septembre, il a répondu aux questions de Zohra Hamdane sur le plateau de France 3 Picardie :

Comprenez-vous l'amertume des anciens salariés? Que dîtes-vous à ceux qui vous ont fait confiance et qui pour certains ont connu trois licenciements en trois ans ?

"Je leur dit que je suis comme eux, tout à fait triste à l'échelle de ce dossier. Mais il ne faut pas non plus me faire porter l'entière responsabilité du dossier. J'avais un métier, j'étais chef d'entreprise et je me suis lancé dans l'opération WN, un projet citoyen, parce que j'avais une vraie conviction de défendre l'industrie en France."

Le 9 décembre vous êtes convoqué au tribunal d'Amiens pour banqueroute et détournement d'actifs. Cela fait référence aux 23 000 euros de salaire que vous auriez touchés. Reconnaissez-vous ce montant ?

"Oui. J'avais une rémunération brut de ce montant. Je reconnais ce salaire. Pour accepter le dossier Whirlpool, la contrepartie des aides du gouvernement était ma démission de tous mes mandats opérationnels au sein du groupe Decayeux. Et j'ai accepté de baisser ma rémunération de 23%."

Sept mois pour monter une usine, ce n'est pas beaucoup. (...) J'étais vraiment en pleine lancée.

Nicolas Decayeux

Où est passé l'argent public ? 

"Quand vous créez une industrie, ça coûte beaucoup d'argent. Pour la société WN, il n'y a pas eu un transfert d'actifs. Il y a eu la création d'une société. On a mis à ma disposition une dalle en béton et des équipes de salariés, dont je devais pratiquer la reconversion professionnelle. Pour ça, j'avais un projet de création de différentes activités sur trois ans. Mais comme je n'avais pas de chiffre d'affaires, il fallait absolument le financer. C'était un projet à 21 millions d'euros. Les protagonistes État, région, Whirlpool, se sont engagés à ce que je puisse financer ces trois ans. Pourquoi me suis-je arrrêté ? C'est parce qu'à un moment donné, on a arrêté ces financements."

Dans votre livre, vous estimez que l'État, la région, Whirlpool n'ont pas joué leur rôle. Que leur reprochez-vous ?

"De s'être arrêtés. On était en plein lancement de l'entreprise, les équipements étaient installés. Sept mois pour monter une usine, ce n'est pas beaucoup. Installer des machines mécaniques, mettre en place des chaînes de montage, former des salariés, ce n'est vraiment pas beaucoup. J'étais vraiment en pleine lancée. On avait monté en l'espace de trois semaines un atelier pour monter des ascenseurs, on était en capacité de fabriquer des voitures sans permis et on fabriquait ces fameux shopping box. Et je ne parle pas de tous les dossiers techniques que je cite dans le livre, que nous étions en train d'industrialiser. Parce que les gens de Whirlpool, c'était vraiment des super champions de l'industrie."

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