Dans une lettre destinée au Premier ministre, de nombreux députés et anciens ministres se sont positionnés pour ne pas dissocier les soins palliatifs de l'aide active à mourir. C'est ce deuxième volet qui clive particulièrement les débats.
Près de 200 personnalités politiques, dont une grande partie de députés ont participé à la rédaction d'une lettre destinée à Matignon. De la majorité présidentielle ou du PS, les signataires appellent François Bayrou à ne pas "dissocier les soins palliatifs de l’aide active à mourir", selon France Info.
Pour rappel, le Premier ministre avait affirmé sur LCI ce lundi 27 janvier scinder les "deux sujets" afin de "pouvoir voter sur chacun de ces deux textes différemment". "Les soins palliatifs, pour moi ce n'est pas un droit, c'est un devoir", a-t-il déclaré, tout en qualifiant l'aide à mourir de "débat de conscience". Il annonçait que cette partie sur l'élargissement des soins palliatifs serait examinée dans un premier temps, mais sans préciser pour autant une échéance sur l'aide à mourir.
C'est après cette déclaration que des personnalités politiques comme Yaël Braun-Pivet, la présidente de l'Assemblée nationale et des anciens ministres ont décidé de rédiger cette lettre. Ils craignent l'abandon du projet de loi clivant sur l'aide à mourir, comme aucune perspective n'a été donnée. Dans la missive consultée par France Info, il est demandé à François Bayrou d'inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale la version initiale du texte. L'examen avait été suspendu après la dissolution.
Un projet de loi qui divise
Comme dans le reste de la France, le projet de loi sur la fin de vie reste un sujet clivant en Picardie. C'est plus particulièrement le volet concernant l'aide à mourir qui divise chez les soignants et politiques. Invitée dans le journal du 19h-20h de France 3 Picardie ce lundi 27 janvier, Julie Oncle, cheffe du service des soins palliatifs au CHU d'Amiens-Picardie, revenait sur la dissociation de l'aide à mourir et l'élargissement des soins palliatifs dans le projet de loi sur la fin de vie.
Elle précise : "Le distinguo, il est important. Nous, on le souhaitait dès le début des réflexions, pour deux raisons : d'une part, en scindant, ça nous permet de prendre le temps d'apporter une clarté au débat". Et d'un autre côté, "on souhaite en soin palliatif davantage développer notre discipline et avoir davantage de moyens pour coller le plus possible aux demandes des patients et des familles."
La cheffe du service des soins palliatifs au CHU d'Amiens-Picardie atteste de la difficulté en tant que soignant de se positionner concernant l'aide à mourir.
Le constat qui fait consensus, c'est qu'on meurt encore mal en France et qu'il est important d'augmenter les moyens, il y a encore 21 départements qui n'ont pas d'unités de soins palliatifs.
Julie OncleCheffe du service des soins palliatifs au CHU d'Amiens-Picardie
Interrogée sur l'implication directe du corps médical dans cet acte, elle déclare : "c'est problématique, l'année dernière, on avait travaillé au sein de nos équipes, car ça va à l'encontre de l'éthique du soin parce que donner la mort ça n'est pas un soin. Donc les soignants sont en grandes difficultés par rapport à ce qui est proposé."
"Donner le choix à la personne qui souffre"
Invités dans l'émission Dimanche en politique le 26 janvier dernier, deux députés des Hauts-de-France ont exprimé des avis divergents sur ce sujet de société. Jocelyn Dessigny, député RN de l'Aisne, explique ne pas avoir voté concernant la deuxième partie du texte sur l'euthanasie et le suicide assisté lorsque celui-ci était débattu en juillet dernier, juste avant la dissolution. Il la jugeait "trop floue", avec des "lignes rouges franchies" et "des dérives". Il avait par contre voté la première partie sur les soins palliatifs. Il ajoute : "Pour le suicide assisté, la loi Claeys-Leonetti répond déjà quasiment à la totalité des cas."
Pour la députée Renaissance du Nord, Brigitte Liso, "Il ne faut pas opposer soins palliatifs et aide à mourir, l'un ne peut pas aller sans l'autre." Elle ajoute aussi que la loi Claeys-Leonetti "n'est pas suffisamment mise en action. Néanmoins, il faut pouvoir aller plus loin, pouvoir donner le choix à la personne qui souffre, qui a une fin de vie inéluctable, de pouvoir choisir la fin de sa vie et dans l'apaisement."