Depuis 2016, Stéphanie Lugrin est à la tête de la police municipale d'Amiens, composée de 200 agents. Elle raconte son parcours, son quotidien et la place des femmes au sein de cette profession.
"Porter la parole des femmes qui sont très nombreuses à exercer des professions que l’on pourrait penser plutôt attribuées à des hommes." Voilà ce qui a poussé Stéphanie Lugrin, directrice de la police municipale d’Amiens, à partager son expérience.
D'une carrière d'historienne à l’armée
À l'origine, rien ne destinait cette Grenobloise d'origine à porter l'uniforme. "Depuis toute petite, mon rêve c’était de devenir professeure d’histoire. J’adorais cette matière et je n’imaginais rien d‘autre comme carrière", sourit-elle. Après une faculté d’histoire, un CAPES en poche et même une année d’enseignement, son parcours semble tout tracé.
Mais Stéphanie Lugrin se laisse tenter par une proposition : créer des parcours pédagogiques sur le thème de la Résistance, pour le musée des troupes de montagne, le musée des chasseurs alpins de l’armée de terre. "Je rentrais dans l’armée, je devenais militaire et en contrepartie, on profitait de mon expérience d’historienne."
Rejoindre la police municipale pour être au "service" de la population
Après être devenue officier de communication institutionnelle et avoir servi 15 ans sous les drapeaux, Stéphanie Lugrin se met en quête d’un autre métier. "Il est arrivé un moment où j’ai eu envie de me poser, d’avoir des enfants et cette vie était moins compatible avec la vie de famille que j'imaginais."
"Pas question d’abandonner l’uniforme", "retrouver les mêmes valeurs", "servir la population". Le poste de cheffe de la police municipale d’Amiens, décroché en 2016, coche toutes ces cases.
L’idée, c’était d’apporter une nouvelle dynamique. Les polices municipales en France connaissaient une évolution et on avait envie à Amiens de porter ce service-là. Mon profil militaire paraissait séduisant à cette époque.
Stéphanie LugrinDirectrice de la police municipale d'Amiens
Stéphanie Lugrin, aujourd'hui âgée de 42 ans, est donc à la tête d’une équipe composée de 200 agents municipaux, dont 90 policiers. "On est là pour faire appliquer la réglementation, mais aussi pour servir nos usagers et leur permettre d'être bien, dans leurs vies, au quotidien."
Faire face aux évolutions du métier
Sur ses sept années d’exercice, une période l’a particulièrement marquée : le Covid. "Les policiers ont dû maintenir une présence importante sur le terrain pour contraindre les gens : à rester chez eux, à porter le masque, à présenter des papiers quand ils sortaient [...] On s’est trouvés dans une situation où l'on a dû être plus durs avec les gens. C’est un gros travail de réparation que l'on mène, depuis le Covid, pour rétablir une relation de confiance avec nos usagers."
La cheffe de la police municipale dresse un autre constat, au fil des années : les violences intrafamiliales se banalisent. "On a pu constater un changement : ce qui était tabou au début, a été mis en lumière et devient presque du quotidien."
Nous n’avons pas de prérogative pour travailler chez les gens, notre travail s’arrête au domaine public et désormais, on y retrouve ces problèmes qui étaient plutôt des problèmes de huis clos familiaux. On a dû adapter nos méthodes de travail.
Stéphanie LugrinDirectrice de la police municipale d'Amiens
Un taux de féminisation de 25 % à la police municipale d'Amiens
Interrogée sur son quotidien au sein d'une profession qui reste majoritairement masculine, Stéphanie Lugrin dit avoir réussi à trouver sa place en appliquant un principe : "La question de la légitimité passe d'abord par l’exemplarité."
Christèle Lefebvre, directrice adjointe, dans la police municipale depuis 30 ans, partage ce point de vue : "On a des choses à prouver en tant que femmes, notamment face à certains personnels qui pourraient être machistes, mais on arrive à être solidaires, fermes, justes. Il faut être dans la démonstration de manière permanente, asseoir sa légitimité pour montrer qu’on a des connaissances, une expertise et une forme d’empathie."
Au quotidien, elles travaillent avec trois autres adjoints. "On discute, on échange, on a des points de vue qui ne sont pas toujours identiques. On a une sensibilité féminine qui nous amène peut-être à traiter certaines situations différemment, mais nous avons la chance d'être dans un milieu professionnel où la bienveillance et la confiance sont là", conclut Stéphanie Lugrin.
Retrouvez le témoignage complet de Stéphanie Lugrin ci-dessus et les autres épisodes de l'émission Hauts Féminin sur la plateforme france.tv.