Réintroduction des néonicotinoïdes : "la moins pire des solutions," estime la députée de la Somme Cécile Delpirou

La réintroduction des néonicotinoïdes pour la culture de la betterave a été validée à majorité par l'Assemblée nationale ce 6 octobre, dont 15 des 16 députés picards. Si François Ruffin se distingue par son "non", Cécile Delpirou, suppléante de Barbara Pompili, explique pourquoi elle a voté pour.

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Les députés ont donné ce 6 octobre leur accord pour réintroduire temporairement néonicotinoïdes dans la culture de la betterave sucrière. Le produit, interdit depuis 2018, est décrié par les défenseurs de l'environnement, car il est notamment nocif pour les abeilles. Ce projet de loi "relatif aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire pour les betteraves sucrières", a été adopté lors d'un vote solennel par 313 voix pour et 158 contre.

En Picardie, région de betterave sucrière, 15 des 16 députés de l'ex-région ont voté contre le projet de loi. "Le contrôle et l'évaluation doivent se faire le plus souvent possible, tous les ans ça me paraît le bon timing pour sortir de cette situation. L'objectif que l'on partage tous, je crois, c'est de sortir des néonicotinoïdes en sauvegardant quand même notre économie et nos territoires," a justifié Jean-Louis Bricout, député (PS) de la 3e circonscription de l'Aisne, sur laquelle on trouve notamment la sucrerie Téréos à Origny-Sainte-Benoîte.

Oui à une réintroduction "temporaire et restreinte"

Mais si François Ruffin, député (Picardie debout) de la 1ère circonscription de la Somme, se distingue en étant le seul Picard à voter "non", celui d'une autre élue samarienne attire l'attention. Cécile Delpérou (LaREM), qui a remplacé Barbara Pompili lors de la nomination de cette dernière au ministère de la Transition écologique en août 2020. La députée actuelle a en effet donné son feu vert pour la réintroduction, alors que sa prédécesseure était l'une des supporters de son interdiction lors du vote de l'Assemblée en 2016.
 
"Nous ne nous sommes pas concertées. Barbara Pompili est suffisamment occupée comme ça au ministère, explique Cécile Delpirou, qui rappelle toujours être en faveur de l'interdiction de 2018. J'ai étudié la question, je me suis fait ma propre idée, en gardant bien en tête que j'étais députée de la Somme, territoire particulièrement concernée par la culture de la betterave."
 

La députée LaREM estime que ce projet de loi est "la moins pire des solutions" pour sauvegarder les emplois de la filière - qui représente 46 000 emplois directs en France - et une certaine indépendance économique.
 

Cette réintroduction est temporaire et restreinte, elle ne concerne que la culture de la betterave et ne fera l'objet d'aucune autre dérogation. On a des garanties concernant la recherche d'alternatives aux néonicotinoïdes. J'ai voté "oui" une fois après m'être assurée que tous tous ces garde-fous étaient mis en place.

Cécile Delpirou, députée (LaREM) de la 2e circonscription de la Somme


"Énormément d'emplois indirects dépendent de cette production française de sucre, que ce soit dans le secteur des cosmétiques, des boissons ou de la fabrication de gel hydroalcoolique," énumère Cécile Delpirou. "Il me semblait important de conserver cette filière française en bonne santé, où les betteraves produites sont mieux-disantes que beaucoup de betteraves importées," ajoute l'élue samarienne.

Trois ans de dérogation, "un moindre mal"

Julien Dive va plus loin. Dans son anaphore clamée le 6 octobre au palais Bourbon, le député (LR) de la 3e circonscription de l'Aisne estime que "ce qui tue les abeilles, ce sont les mauvaises pratiques des apiculteurs. Ce qui tue les abeilles, c'est l'activité humaine et l'artificialisation des sols. Ce qui tue les abeilles, c'est le mauvais nourrissement des ruches, la transhumance qui est opérée par des apiculteurs qui n'ont pas les bonnes pratiques ou qui n'ont pas la bonne formation. Si on veut trouver une solution pérenne pour l'ensemble de la filière betterave sucrière - trouver de bonnes alternatives et les tester - un délai d'un an me semble insuffisant".
 

Un an, ça ne donne aucune visibilité à une usine sucrière, comme celle d'Origny-Sainte-Benoîte, c'est insuffisant pour assurer des embauches ou la pérénnité des emplois. Il faut laisser un peu plus de temps. Trois ans, c'est un moindre mal. Je pense qu'il ne faudra pas aller au delà, par contre il faut être exigeant et c'est tout l'enjeu de ce conseil de surveillance.

Julien Dive, député (LR) de l'Aisne


Les betteraves issues de semences non-enrobées d'insecticides sont atteintes de jaunisse, en raison du développement d'un puceron vert qui affablit les plantes. La réintroduction de semences enrobées avec des néonicotinoïdes doit permettre de protéger les rendements sucriers.

Les néonicotinoïdes ont été interdits en 2018 par un vote de l'Assemblée en 2016. Par le vote de ce 6 octobre gouvernement revient donc en arrière, en s'appuyant sur le règlement européen sur les phytosanitaires qui permet de déroger à l'interdiction, potentiellement pendant trois ans jusqu'en 2023.
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