Second jour du procès Doisy. Sept ans de prison requis contre la principale accusée et six ans pour son ex-mari

Accusés de 42 délits, Christelle Doisy et son ex-mari Frédéric Descours ont comparu au tribunal d'Amiens ce vendredi 13 septembre. En ce second et dernier jour de procès, les réquisitions du procureur sont tombées. Par ailleurs, on en sait plus sur la fille au pair maltraitée et les enfants du couple.

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Au cours de ce second et dernier jour de procès dans l'affaire Christelle Doisy, accusée d'innombrables escroqueries, le procureur d'Amiens a requis 7 ans de prison pour la principale accusée et 6 ans pour son ex-mari, Frédéric Descours, avec mandat dépôt.

Pour rappel, pendant la première journée, la femme est restée muette, affirmant être sous le coup de l'amnésie. "Je suis dans le flou. J'ai beau forcer ma mémoire, je n'y arrive pas", s'était-elle excusée, malgré les conseils de son avocat de parler. "Je pense qu'elle est véritablement de bonne foi", affirmait Me Delarue.

De son côté, son ex-mari, Frédéric Descours, un ancien de la Marine nationale, également accusé, veut qu'on lui reconnaisse le statut de victime et refuse d'être soumis à une expertise psychologique. "En réalité, il était là, mais il était dans un état complètement second. L'administration de substances lui a fait perdre toute intentionnalité", décrivait Me Maallaoui hier.

Cette seconde journée a permis d'en savoir plus sur les deux enfants du couple et la fille au pair qui a subi plusieurs mois de sévices. Christelle Doisy a continué de plaider l'amnésie : "ça a l'air lourd ce que vous dites mais je ne me souviens pas", a-t-elle affirmé pendant l'audience aujourd'hui.

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Une sombre histoire de manipulation

Le cas de Lauranne M., qui se dit victime du couple, a été de nouveau soulevé. Mais qui est-elle exactement ? Elle rencontre Christelle et Frédéric à l'âge de 18 ans. À cette époque-là, la jeune femme est encore pleine de rêves et fréquente une école d'équitation, sa passion, dans sa Belgique natale. Elle rejoint le couple en pensant "participer à la création d'une ferme biologique au Panama où elle aurait la charge du volet équitation", explique Me Bricout, son avocate, au micro de France 3 Hauts-de-France ce vendredi 13 septembre. 

Mais très rapidement, le couple Doisy-Descours se livre à un véritable jeu de manipulation psychologique à coups de soumission chimique pendant plusieurs mois. "Ils ont été jusqu'à lui dire qu'en réalité, les parents qu'elle a connu ne sont pas les siens, que son père a été assassiné par un homme et par sa mère, qui sont en prison. Mais qu'avant d'être emprisonnés, son père, pendant une quinzaine d'années, a abusé d'elle sexuellement".

Pire encore, "ils sont allés jusqu'à lui faire rencontrer un hypnotiseur pour que cette histoire soit ancrée en elle. Elle se pensait rejetée, victime de sa famille et prise au piège. C'est la raison pour laquelle elle était restée auprès d'eux. Ils lui ont dit qu'elle leur était redevable pour cette protection de témoins qu'ils avaient mis en place avec un avocat, de la somme de 130 000 euros", poursuit Me Bricout.

Jeudi déjà, Lauranne M. a pu expliquer les sévices subis qui l'ont mené à une tentative de suicide : changement d'apparence, de façon de se vêtir, cheveux coupés et teintures, perte de poids... "Tantôt elle était gavée pour prendre quatre kilos, tantôt elle était affamée pour en perdre et correspondre au poids des passeports", détaille Me Bricout.

Le couple a même procédé à une "soumission chimique en lui administrant des anxiolytiques de façon permanente". Tout ceci l'a isolée de sa famille et de ses amis : "ce qu'a vécu cette jeune femme, c'était l'objet d'une économie de couple qui agissait systématiquement de concert, qui l'envoyaient à la cave avec les enfants pour opérer de manière tranquille". L'avocate relate que sa cliente aurait subi des "briefings" où, chaque jour, Frédéric Descours l'asseyait "pendant 15, 20, 30 minutes" sur un tabouret "pour lui dire ce qui n'a pas été. Cette tactique d'humiliation est propre, je crois, à la carrière militaire de ce monsieur qui a toute sa responsabilité".

>>> À lire aussi : Premier jour du procès Doisy, la principale accusée muette : "Je suis dans le flou. J'ai beau forcer ma mémoire, je n'y arrive pas !"

"Des enfants qui n'ont pas du tout été sociabilisés"

Me Bricout ne dédouane pas Christelle Doisy, mais il est difficile pour elle comme pour sa cliente, d'entendre Frédéric Descours "se positionner en victime dans ce dossier de façon égale à ce qu'a pu subir Lauranne". Aux yeux de l'avocate, Lauranne M. est la "véritable victime". Me Pilon, avocate du département de la Somme, chargée de l'aide sociale à l'enfance, abonde en ce sens.

Autre point important soulevé, les deux enfants du couple, sans état civil clair et placés dans une famille d'accueil par l'ASE (Aide sociale à l'enfance) depuis 2016, année de leur interpellation. Pourtant, pendant le procès, Frédéric Descours a affirmé avec véhémence être un "bon père". Me Pilon rapporte d'autres propos de l'ex-mari de Christelle Doisy, selon qui les enfants sont "hyperadaptables", ce qui est "merveilleux" à ses yeux. "On ne peut pas considérer qu'être hyperadaptable est quelque chose de merveilleux et aidant dans la vie de quelqu'un", rétorque-t-elle.

Elle décrit des enfants qui ont été "impactés" et qui auraient "éventuellement assisté" à ce qu'a subi Lauranne, ce qui suffit, pour elle, à caractériser l'infraction. "Ce sont des enfants qui n'ont pas du tout été sociabilisés, quoi qu'on nous en dise. On a cette jeune femme qui est venue nous expliquer qu'ils jouaient dans une cave, n'avaient pas accès au jardin alors qu'il y en a un".

De plus, les deux enfants âgés désormais de 11 et 13 ans ont vécu 10 déménagements en l'espace de cinq ans. "Je pense que c'est désolant de ne pas voir un père capable, au moins à un moment ou un autre, de nous dire : oui, ça a dû être un minimum impactant pour eux. Il y a huit ans de passés et on n’a toujours pas cette avancée-là", déplore-t-elle.

Les débats ont été suspendus à 19h, la décision du Tribunal correctionnel devrait être rendue dans la soirée, mais il se pourrait également que l'affaire soit mise en délibéré pour la semaine prochaine. 

Avec Mickaël Guiho / FTV

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