D'après les syndicats, l'académie prévoit de fermer 63 classes l'année prochaine, tous niveaux confondus.
Les syndicats d'enseignants ont reçu des indications concernant la nouvelle carte scolaire pour 2018 dans la Somme. L'académie prévoirait de fermer 63 classes de premier degré l'année prochaine. Pour la première fois depuis des années, les quatre syndicats représentatifs se sont réunis en intersyndicale pour décider des actions à mener pour protester.
"On n'avait jamais connu une telle carte scolaire dans le département ! (...) Depuis cinq ans, on avait réussi à faire baisser les effectifs dans presque toutes les écoles du département, en arrivant à un nombre d'élèves par classe acceptables.", explique Maxime Paruche, secrétaire départemental SE-UNSA et professeur des écoles à Albert. "Et là, on s'aperçoit que les conditions de travail, pour nous comme pour les élèves, vont de nouveau être dégradées !"
► Tableau : l'école de vos enfants est-elle concernée ?
Carte Scolaire 2018 dans la Somme by France Bleu on Scribd
Transfert de moyens
En cause d'après les syndicats, la politique du ministère qui vise à dédoubler les classes de CP et de CE1 dans les écoles classées prioritaires. "Si on avait les moyens de le faire, on applaudirait des deux mains !", ajoute l'instituteur. "Mais on n'a pas les moyens, donc il faudrait reporter ou étaler sur plusieurs années. Mais là, en effet, c'est problématique au niveau de la communication politique..."
Car il s'agissait d'une promesse de campagne d'Emmanuel Macron. Une promesse que le ministère de l'Éducation nationale s'efforce de mettre en place le plus rapidement possible... mais pas de la bonne manière d'après ce syndicat.
Le collège pas épargné
"Le problème, c'est qu'on déshabille Paul pour habiller Jacques. C'est normal de mettre d'avantage de moyens dans l'éducation prioritaire, mais là, on les retire ailleurs, et en quantité.", souffle-t-il. "Le ministère a créé 15 postes dans le département, mais pour mettre en place cette politique, il y en avait besoin de 80. Alors, faites le calcul... Ils récupèrent ces moyens en fermant 63 classes."
Les classes de collèges sont également concernées par ce transfert de moyens : 29 postes doivent y être supprimés. "Le collège Guy Mareschal à Amiens perd un quart de sa dotation globale... Ça laisse même présager la fermeture de l'établissement dans les prochaines années."
Classes surchargées
Une décision qui pourrait avoir de lourdes conséquences sur les conditions de travail. Les élèves des classes supprimées seront répartis dans d'autres classes, augmentant de fait le nombre d'élèves par classe. Difficile dans certaines écoles, même si elles ne sont pas classées prioritaires.
"Et on nous encourage à inclure de plus en plus dans les classes-types des élèves handicapés de classes ULIS. C'est une très bonne chose. Mais cette inclusion doit se faire dans de bonnes conditions, dans une classe qui compte près de 30 élèves, c'est compliqué.", souligne Maxime Paruche.
L'académie nuance
"Pour l'instant, rien n'est fait !", précise tout de même Jean Hubac, directeur d'académie, pour répondre aux parents d'élèves qui ont bloqué l'école de Friville-Escarbotin, concernée par la nouvelle carte scolaire. "On prévoit des phases de dialogues avec les élus, les équipes des écoles et les parents d'élèves. On est dans une phase d'appréciation pour réajuster ce que nous prévoyons aujourd'hui."
Il rappelle également que si des classes vont fermer, d'autres vont ouvrir ailleurs, où les besoins sont considérés comme plus importants. "Pour la rentrée 2018, on prévoit quelques fermetures dans le Vimeu, qui ne sont pas compensées dans ce territoire par des ouvertures car il ne gagne pas d'habitants de manière significative." Mais d'autres territoires pourraient bénéficier de ces ouvertures.
L'académie prend des mesures en fonction de la démographie, qui évolue rapidement. "Concrètement, dans le département de la Somme en 2018 on a 800 élèves en moins dans le premier degrés, et sur les quatre dernières années, on en a eu 2 000 en moins. On voit bien qu'on a une tendance générale à la baisse."
Le projet de carte scolaire doit être officiellement présenté en comité technique le 1er février, mais l'ensemble des organisations syndicales a décidé de boycotter cette réunion. Une autre doit avoir lieu le 9 février. Les syndicats comptent s'y rendre, mais lance un appel à la mobilisation ce jour-ci.
Le cas épineux des enfants placés de Crécy-en-Ponthieu
Depuis plusieurs années, la commune de Crécy-en-Ponhtieu accueille des enfants faisant l'objet d'un placement judiciaire. Ces enfants, retirés à leur famille temporairement ou définitivement, nécessitent une attention particulière. "Parfois, ça se passe bien, mais parfois, pardonnez-moi l'expression, mais ils pètent les plombs, parce que la décision de justice les mine", explique Gérard Lheureux, maire de la commune et ancien enseignant."Ils sont en difficulté évidente, alors il faut à tout prix maintenir les moyens dans cette école", indique Maxime Paruche. Or, l'inspection académique envisage d'y supprimer une classe. Une mesure qui ferait passer les classes d'un peu moins de 22 élèves en moyenne à plus de 26. "Et comme on n'est pas en REP, chez nous, les CP de seront pas dédoublés", déplore le maire. "Les enseignants vont se retrouver à gérer des effectifs plus élevés, avec des enfants en souffrance et qui ont parfois des comportements très durs."
Gérard Lheureux a écrit à l'inspection académique à l'instant où il a appris la nouvelle. "Je suis prêt à les rencontrer, et à les recevoir à Crécy pour qu'ils comprennent la situation." Objectif : maintenir à tout prix les moyens consacrés à cette école. "C'est mieux pour ces enfants d'être accueillis dans des structures comme celles-ci. Les enseignants font un travail remarquable. Et ils subissent un peu ce qui se passe, ils ne s'y attendaient pas. On aimerait que notre cas soit pris un peu plus en considération. Même si on est pas classé REP, on a besoin de moyens. La plupart des gens ne savent même pas ce qui se passe dans cette école !"
Le nombre d'enfants placés fluctue au gré des décisions de justice, allant de 20 à 30 en même temps. "Ils sont en grande détresse physique et comportementale. (...) Il y en a un l'autre jour qui a piqué une crise, et il faut le calmer, sans alimenter sa colère, ça demande du dialogue, de l'affection, du temps. (...) Mais c'est une bataille permanente pour expliquer le cas particulier de Crécy."