En cette journée mondiale de sensibilisation à l’autisme, Emmanuel Macron a annoncé une extension des possibilités de sorties pour les personnes autistes et leurs proches. Du côté des familles, cette décision, qui vient un peu tard, va permettre de relâcher les tensions.
C’est paré d’un ruban bleu, couleur symbole de l’autisme, qu'Emmanuel Macron s’est adressé ce matin en vidéo aux "personnes qui vivent avec l’autisme".
Dans son allocution de 6 minutes, il a notamment annoncé une bonne nouvelle selon lui : "Vous allez pouvoir sortir un peu plus souvent avec une attestation qui sera faite spécialement pour vous".
La secrétaire d’Etat aux personnes handicapées Sophie Cluzel a précisé en fin de journée que l’attestation resterait la même, mais qu’il faudrait se munir en plus de justificatifs comme un certificat médical ou une notification de droit d’une maison départementale des personnes handicapées (MDPH). Des consignes seront passées aux forces de l’ordre pour prendre en compte ces situations. Une souplesse sera accordée pour des sorties fragmentées dans la journée.
#COVID19 #AutismDay2020 ? | Une journée mondiale de l'autisme placée sous le signe de la mobilisation dans le cadre de la crise sanitaire.
— Handicap_gouv (@handicap_gouv) April 2, 2020
Rappel des mesures et des dispositifs de soutien aux personnes ?@EmmanuelMacron @Elysee @s_cluzel @CCompagnon_https://t.co/6dThEgmW7z
Une mesure plus qu’attendue par les familles concernées. Pour Alexandra, maman de Sarah, 11 ans et atteinte de troubles autistiques, cette annonce vient juste officialiser ce qu’elle faisait déjà : "Je ne vous cache pas que je n’ai pas attendu qu’il nous annonce ça pour sortir avec la petite, c’est ingérable sinon".
Comme beaucoup de parents, elle trouve cette décision prise le 2 avril plutôt opportuniste : "Si il n'y avait pas eu la journée de l’autisme, est-ce qu’il aurait fait ça ?"
On ne sort pas pour le plaisir de sortir, on sort pour éviter les crises
Pour éviter les crises et dès qu’elle en a besoin, elle sort avec sa fille, munie de son attestation sur laquelle elle coche la case "raisons médicales"."Il faut voir dans le détail ce qu’on pourra faire, mais si ça nous permet officiellement de sortir pour éviter les crises ça sera un soulagement. C’est vraiment ce genre de mesures qu’on attend ! Aujourd’hui, on se sent hors la loi alors qu’on ne sort pas pour le plaisir de sortir, on sort pour éviter les crises et éviter de devoir aller aux urgences qui n’ont pas besoin de ça en ce moment".
Elle commence à trouver le temps long. D'habitude, il n’y a qu’au mois d’août et pendant les vacances de Noël qu’elle se retrouve sans prise en charge pour Sarah.
Même si elle arrive un peu tard, cette dérogation "va être une bonne nouvelle pour beaucoup de familles", explique Ingrid Dordain, présidente de l’association SATED (Soutenir l’autisme en Hauts de France). "En Espagne, ça a été accordé dès le début, beaucoup l’attendaient parce que ça va permettre d’enlever une anxiété aux familles, de pouvoir sortir sans avoir l’air coupable".
En tant que maman, elle accueille cette décision avec soulagement, même si sa fille autiste, Lucie, ne veut plus sortir pour l’instant. "Chaque sortie est négociée car elle a peur de sortir".
Soulager les parents
Pour les parents d’enfants autistes, l’adaptation est encore plus rude. Ils doivent redoubler d’effort pour expliquer cet environnement nouveau, pourquoi les rues sont vides, pourquoi il n’y a presque plus de circulation et pourquoi les magasins sont fermés. Afin de les soulager un peu, l’Unité de d’Accueil Temporaire Innovante (UATI) de Belloy-sur-Somme, maintient son activité, mais en s’adaptant.5 places sont disponibles par jour au lieu de 8, les locaux sont désinfectés tous les jours et les professionnels de santé portent des masques délivrés par l’Agence Régionale de Santé (ARS). Ici, les personnes sont accueillies pour deux nuits minimum, le temps pour leurs proches de souffler un peu. L’extension des possibilités de sorties ne devrait pas les toucher directement. La structure possède un jardin et les encadrants ne s’imaginent pas sortir en groupe d’une dizaine en cette période de confinement.
Mais pour Margaux Labouche, coordinatrice de l’UATI, la mesure devrait beaucoup aider les familles : "Ça va leur permettre d’avoir une solution pour désenclencher les situations de crises. Nous on le voit d’un bon oeil car on va pouvoir se concentrer sur les familles les plus en difficulté". L’UATI de Belloy sur Somme a accueilli pour le moment 17 jeunes depuis le début du confinement.
Plus de deux semaines après le début du confinement, le gouvernement a fini par entendre les demandes des associations. Il s’adapte lentement aux contraintes des personnes en situation de handicap. En début de semaine, une attestation de déplacement dérogatoire simplifiée destinée aux personnes en situation de handicap intellectuel ou mental a été publiée.