Hausse des accidents de motos dans la Somme : "les causes ne sont plus les mêmes", selon la fédération des motards en colère

30% des tués sur les routes de la Somme sont des motards. Un tiers de ces accidents mortels sont liés à la vitesse, un quart à un manque d'attention. Les motards dénoncent un comportement inadapté des usagers de la route.

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Le premier semestre 2024 est marqué par une forte hausse de l'accidentalité sur les routes de la Somme avec une augmentation de 64% du nombre de personnes décédées par rapport à 2023.

On déplore ainsi 158 accidents de la route faisant 23 morts et 195 blessés dans le département. L'année dernière, à la même période, on comptait 129 accidents, 14 morts et 168 blessés.

Particulièrement exposés au risque d'accident, les motards représentent moins de 2% des usagers de la route mais 30% des tués sur les routes de la Somme. Depuis le début de l’année, sept motards sont morts sur les routes, 28 blessés dont 11 hospitalisés.

Face à l'ampleur du phénomène, le préfet du département a décidé de renforcer les contrôles routiers tout au long de l'été. Deux opérations spécifiques "2 roues" seront organisées chaque semaine par les forces de l'ordre.

Les motards, des usagers vulnérables

Malgré ces chiffres alarmants, la fédération française des motards en colère (FFMC) veut rester prudente.

"Comparer des chiffres d'un mois sur l'autre comme cela est fait, est à mon sens une erreur, relève Didier Renoux, délégué général de la FFMC. L'analyse doit se faire sur des grandes tendances et non pas sur de courtes périodes. Les facteurs qui peuvent influer sur ces chiffres sont tellement variables d'une année sur l'autre, à commencer par le facteur météo. Imaginons que si en mars 2023, la météo était mauvaise et qu'elle était excellente en 2024, il est évident que les usagers des deux roues motorisés auraient eu plus tendance à sortir et utiliser leur véhicule, et donc, l'exposition au risque était naturellement supérieure. D'ailleurs, depuis pas mal d'années, des analyses montrent que la tendance est plutôt à la baisse, même s'il est important de le rappeler, un tué, c'est toujours un tué de trop".

La vulnérabilité des usagers des deux-roues motorisés expliquerait leur état de victimes. "L'élément qui n'échappe à personne, c'est l'absence de carrosserie, rapporte Didier Renoux. Les deux-roues motorisés sont des usagers vulnérables à considérer comme tels. Dans une voiture, la carrosserie même déformée permet d'amortir les chocs, ainsi que la ceinture de sécurité et les air bags. Il y a beaucoup plus de choses qui sont équipables dans une voiture pour maintenir la sécurité des passagers que sur un deux-roues motorisé." 

L'inattention, principale cause des accidents mortels

Jusqu'à maintenant, un accident mortel à moto survenait essentiellement lors d'une collision avec un autre véhicule. La vitesse, la consommation d'alcool et de stupéfiants restent les principales causes d'accidents sur les routes de la Somme. Mais la principale est l'inattention. Elle vient en tête des cinq tués en Mars 2024  "Toutes les choses qui résultent d'un comportement inadapté est un facteur déclenchant de l'accident et le cumul de facteurs déclenchant provoque l'accident. Un seul facteur, c'est ce qu'on appelle le 'presqu'accident', plusieurs facteurs cumulés vont pouvoir provoquer l'accident".

Aujourd'hui la physionomie des accidents de la route tend à changer. "On a une augmentation ubuesque des face-à-face, remarque Philippe Leduncq, ancien responsable de la FFMC Somme, parce que les gens ne conduisent plus, ils font autre chose que de conduire et les premières victimes forcément, ce sont les motos. Moi, je roule en moto tous les jours et des voitures en face, j'en évite presque tous les jours. Le comportement des gens a changé parce que les véhicules ont changé. On a les smartphones, on a les tablettes sur les tableaux de bord, en fait, les gens ont réduit la vitesse à 80 km/h mais ils font tout sauf conduire et ça, c'est un comportement qu'il faut analyser, parce que les causes ne sont plus les mêmes".

Des comportements inadaptés

"On était persuadé que le téléphone au volant était la cause de tout, constate Philippe Leduncq, mais aujourd'hui, on peut revoir nos copies avec le kit main libre. Le cerveau ne fonctionne pas comme ça. Quand vous téléphonez avec le kit main libre, vous êtes en train de visionner la personne qui vous parle. On n'a pas la même attention. Tenir un téléphone dans la main ou être en kit main libre pour moi, c'est la même chose. Ça donne une déviance de la trajectoire et c'est comme ça qu'on se retrouve en face-à-face."

On a une augmentation ubuesque des face-à-face, parce que les gens ne conduisent plus, ils font autre chose que de conduire et les premières victimes forcément, ce sont les motos.

Philippe Leduncq, ancien responsable de la FFMC Somme

"Moi, je viens de changer de moto, elle est récente et donc bardée d'électronique. Je passe mon temps à lire le tableau de bord plutôt que de regarder devant. Ça induit un comportement différent et donc moins d'attention à la route" reconnaît-il.

Faut-il former les motards au fonctionnement de ces nouveaux engins ? Faut-il éduquer les usagers de la route dès le plus jeune âge ? Faut-il concevoir des blocages sur l'électronique embarqué dès que le véhicule est en mouvement ? Des pistes de réflexion émergent. 

Priorité à l'éducation, pas à la sanction

"Ce sont les comportements de façon générale, motard compris, qu'il faut améliorer par l'éducation, affirme Didier Renoux. Ce que la FFMC demande, c'est un continuum éducatif de façon à avoir des comportements adaptés qui tiennent compte du fait que les pratiques sont différentes selon les usages. Ça, c'est la priorité qui concernerait tout le monde, motards, automobilistes, piétons, cyclistes, etc... La priorité devrait être à l'éducation et pas à la sanction des comportements inadaptés".

Par ailleurs, c'est connu, les motards sortent moins en hiver qu'en été. De ce fait, le nombre d'accidents est logiquement moins élevé à cette période de l'année. C'est donc au retour des beaux jours qu'ont lieu la plupart des accidents mortels. Les plus fréquents se font en plein jour, par beau temps et en ligne droite. Ainsi, pour se remettre en selle, il est conseillé de rejoindre les opérations "reprise de guidon" mises en place par la gendarmerie. 

"La solution passe par un système éducatif continu, affirme Philippe Leduncq. Cela peut être un stage de conduite ou une rencontre. Il faut mettre les gens en face de leur responsabilité et les faire essayer, qu'ils comprennent leur comportement à eux. Il n'y a qu'eux qui peuvent les modifier. On ne le fera pas à leur place. Tous ces outils-là de formation mis bout à bout chaque année, tout ça, c'est efficace, Ça ne règle pas tous les problèmes mais comme je le dis toujours, quelqu'un qui ne sait pas se conduire, ne sais pas conduire".

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