Après le tollé politique provoqué par l'annonce du Premier ministre d'utiliser l'article 49 alinéa 3 de la Constitution pour faire passer le projet de réforme du système de retraites, François Ruffin demande une dissolution de l'Assemblée.
Le bras de fer continue entre le gouvernement et l'opposition. Avant même d'être dévoilé complètement, le projet de loi sur les retraites a provoqué pendant plusieurs semaines des manifestations à travers le pays et a divisé les syndicats.
Bras de fer législatif
En signe de contestation, l'opposition (notamment les députés Insoumis) ont opté pour la "stratégie de l'obstruction", en déposant 22 000 amendements, ralentissant considérablement les débats.Alors le 29 février, le Premier ministre Édouard Philippe a dégainé une arme constitutionnelle controversée : l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, le fameux "49.3", qui permet au gouvernement de faire passer un texte sans vote des députés. La réforme du système de retraites est donc considérée comme adoptée, et le processus législatif pour faire adopter le texte continue.
Dans la foulée, deux motions de censure ont été déposées, par l'opposition de droite et celle de gauche. Mais elles n'ont pas reçu suffisamment de soutien : pour être adoptée, il aurait fallu la signature d'un dixième des membres de l'Assemblée.
Ruffin interpelle les marcheurs
Qu'à cela ne tienne, François Ruffin demande d'aller plus loin : d'après le député LFI de la Somme, il faut dissoudre l'Assemblée nationale. Évoquant un "fossé entre l'Assemblée et dehors", il estime que les députés de la majorité ne sont plus soutenus par les électeurs. "La légitimité des marcheurs s'est effritée, voire elle a disparu. (...) On remet à plat le contrat social entres les Français, on passe en force contre les syndicats, contre le Conseil d'état, et contre les deux tiers des Français qui sont hostiles à cette réforme", a-t-il déclaré sur Franceinfo ce mercredi matin. "C'est un jeu dangereux."Le député Insoumis va jusqu'à mettre "au défi les 298 députés du groupe En Marche", sur les réseaux sociaux et dans les médias. "S'il y en a un seul qui remet son mandat en jeu, qui dit "je démissionne, on refait une élection", s'il y en a un seul qui prend ce risque-là, je le prends avec lui et je remets mon mandat en jeu."
D'après lui, la dissolution de l'Assemblée nationale est aujourd'hui le seul moyen de redonner au gouvernement sa légitimité. "Si Emmanuel Macron l'emporte, dans ce cas-là, il revient avec une majorité légitimée, régénérée, et son projet est légitime."
Plus de 20 ans sans dissolution
Mais c'est bien là le hic : cette proposition, de la part d'un député, est tout au plus une suggestion. Dans la Vème République, le seul qui détient le pouvoir de dissoudre l'Assemblée nationale, c'est le président de la République. "Il ne va pas le faire, et il sait pourquoi il ne va pas le faire", déplore François Ruffin. "Il prendrait une déculottée, il prendrait une raclée. (...)" Le député Insoumis en est convaincu : "S'il y a de nouvelles élections législatives, il n'aura pas de majorité, il faudra qu'il y ait cohabitation et qu'il gouverne autrement."L'année dernière déjà, la présidente du Rassemblement national Marine Le Pen avait exigé qu'Emmanuel Macron dissolve l'Assemblée nationale, à l'issue des élections européennes. Si à l'époque cette demande était restée lettre morte, une enquête d'opinion de l'IFOP-Fiducial réalisée à la veille des élections affirmait que 50% des inscrits étaient favorables à une dissolution parlementaire.
Le dernier président à avoir eu recours à la dissolution parlementaire est Jacques Chirac, en 1997. Cela avait abouti à une majorité de gauche et à la nomination de Lionel Jospin comme Premier ministre.