En s’appuyant sur près d’une soixantaine de témoignages, la journaliste et autrice Catherine Siguret, avec la participation du père de la victime, retrace la longue quête de vérité qui a entouré le meurtre d’Elodie Kulik en janvier 2002.
"Il y a plus de vingt ans que je me bats [...], j'aimerais bien maintenant pouvoir me reposer", la citation signée Jacky Kulik est, parmi toutes, celle qu’a choisi la maison d’édition pour évoquer l’esprit de cet ouvrage. L’affaire Élodie Kulik ou le combat d’un père, qui sort ce jeudi 20 octobre, porté par la journaliste et écrivaine Catherine Siguret, avec qui il collabore, retrace dans toutes ses aspérités ce drame qui a profondément marqué la Picardie et la vie de la famille Kulik.
Le 12 janvier 2002, le corps de la jeune femme, directrice bancaire à Péronne dans la Somme, avait été retrouvé dans un champ de Tertry.
Cet essai témoigne de l’engagement immense d’un père à faire en sorte que les coupables soient identifiés et jugés. "Un combat qui n’est pas encore terminé", précise-t-il dans un souffle à l’autre bout du fil. Car 20 ans après la découverte du corps sans vie de sa fille, la procédure judiciaire n’est toujours pas terminée. Willy Bardon, condamné en appel à trente ans de réclusion criminelle en juillet 2021, s’est pourvu en cassation. La décision de la Cour est attendue d’ici la fin de l’année.
Témoigner de ce qu’il s’est passé dans un livre c’est quelque chose que j’ai toujours eu en tête. C’est une façon pour moi de rendre hommage à ma fille, à mon épouse, à ma famille toute entière.
Jacky Kulik, père de la victimeà France 3 Hauts-de-France
Jacky Kulik poursuit : "Catherine a écrit de façon prodigieuse mon ressenti. C’était important de montrer qu’il y a beaucoup de malheurs dans ce monde, que des gens brisent des vies et des familles entières, et que la justice est trop laxiste. Ça fait 20 ans que ça dure et ce n’est pas encore fini, ce n’est pas possible. Il faut savoir dire stop."
Rappel des faits
Qu’a-t-il bien pu se passer la nuit du 10 janvier 2002 en Picardie ? C’est la question que se sont longtemps posée les enquêteurs malgré les nombreux indices présents sur la scène de crime. Alors qu’Elodie rentrait chez elle après un dîner avec un ami, sa voiture est retrouvée au matin, dans un fossé, son corps abandonné sur un chemin de terre. "Elle a été traquée, violée, suppliciée jusqu'à la mort, après avoir lancé un ultime appel de détresse aux pompiers", peut-on lire en guise de résumé du livre.
Avant d'être tuée, la jeune femme avait eu le temps d'appeler avec son téléphone portable les pompiers qui avaient distingué, derrière la voix de la victime, au moins deux voix d'hommes dôté d'un fort accent picard. Mais les pistes n'avaient rien donné. Dix ans plus tard, l'enquête avait connu un tournant grâce à l'identification par recoupement d'ADN d'un suspect, Grégory Wiart, mort dans un accident de voiture quelques mois après le meurtre. Willy Bardon était l'un de ses amis.
La voix de ce dernier avait été reconnue sur l'enregistrement par l'ancienne compagne de Grégory Wiart et cinq des six hommes placés en garde à vue en même temps que lui en janvier. En première instance la cour d’assises d’Amiens, puis, en deuxième instance, la cour d’appel de Douai, l'ont condamné à 30 ans de réclusion criminelle pour viol en réunion, enlèvement, séquestration, suivi de la mort d’Élodie Kulik.
Une affaire historique
Outre des chiffres astronomiques (20 000 pièces de procédure, 30 000 requêtes téléphoniques, plus de 5 500 prélèvements ADN effectués sur les hommes de la région et près de 20 ans de procédure), l’affaire a marqué l’histoire judiciaire française par son procédé. Dix ans après le début de l’enquête, un jeune lieutenant-colonel travaillant sur l’affaire, Emmanuel Pham-Hoai, découvre dans la bibliographie scientifique, qu'un violeur et tueur en série qui sévissait près de Los Angeles aux Etats-Unis a été identifié grâce à l’ADN de son fils, et s’en inspire.
L’affaire Élodie Kulik est la première enquête résolue en France grâce à l’ADN par parentèle. Cette technique permet de relier l'ADN suspect aux ADN issus d'une même parenté et figurant potentiellement dans fichier national automatisé des empreintes génétiques. La technique sera alors inscrite dans les textes de loi.
Pour plus d'informations, sachez que l'autrice du livre, Catherine Siguret, sera notre invitée dans le 19/20, ce mardi 25 octobre.