David Ruamotu est cadre de santé formateur à l'institut de formation en soins infirmiers du CHU Amiens-Picardie. Il s'est porté volontaire avec 37 autres soignants des Hauts-de-France pour participer à l'aide sanitaire mise place en Guadeloupe et en Martinique sévèrement touchées par la Covid-19.
Quand il a appris dimanche 8 août qu'une aide sanitaire se mettait en place, David Ruamotu n'a pas tergiversé : "On était trois ou quatre cadres de santé formateurs à s'être posé la question, si logistiquement c'était faisable. En 10 secondes, on s'est dit oui. C'est une aventure humaine et professionnelle à vivre".
Dans les Hauts-de-France, trente places étaient à pourvoir. Les dossiers ont d'abord été étudiés par l'agence régionale de santé : "le lundi matin, on a reçu un appel pour nous dire que notre candidature avait été retenue et pour nous demander plus d'information sur nos compétences, si notre domaine d'expertise serait utile aux Antilles". Le choix définitif a été fait au ministère de la Santé et "le lundi soir à 21h30, on a reçu un mail de confirmation de départ pour le lendemain à Paris".
38 volontaires des Hauts-de-France
Finalement, le contingent des Hauts-de-France est plus important que prévu : trente-huit volontaires, dont vingt-deux infirmiers et cadres de santé, huit médecins, six aide-soignants et deux manipulateurs radio.
L'avion a décollé mardi soir à 17 heures et s'est posé en Guadeloupe à 20h30, heure locale. Le cadre de santé formateur du CHU d'Amiens a bénéficié d'un "super accueil de la part des Guadeloupéens. On avait une banderole quand on est arrivés à l'aéroport. On sait pourquoi on vient, à quel point ils en ont besoin et cette attention nous a vraiment touchés".
A l'aéroport, les 274 soignants de métropole sont répartis en fonction des hôpitaux.
Le mercredi matin, la première journée de David a débuté par une réunion au CHU de Pointe-à-Pitre avec les responsables de l'établissement, histoire de prendre la mesure de la situation sur l'île : "ils étaient alarmants. Ils ont environ 15 jours de décalage avec la Martinique. Mais ça commence à flamber plus vite qu'en Martinique, donc on est peut-être plus vraiment à 15 jours. Ils venaient d'ouvrir un service covid qui s'est rempli en moins de 24 heures. Donc avec les cadres d'hier, on en a ouvert un deuxième.".
Ouvrir des services covid semble d'ailleurs la priorité : "Toutes les programmations chirurgicales non-essentielles ont été déprogrammées. Ils ont quand même conservé les interventions d'urgence. Tous les services qui peuvent être transformés en services covid le sont".
On sait à quel point c'est difficile
Il faut dire que les Antilles affichent des taux d'incidence record, frôlant les 2000 cas pour 100 000 habitants. Martinique et Guadeloupe sont désormais totalement reconfinées pour tenter de ralentir les arrivées de patients à l'hôpital.
"Il y a un fort afflux au niveau des urgences. Hier, il y avait beaucoup d'appels pour savoir s'il y avait des places disponibles en hospitalisation pour les désengorger. Et ça c'est une situation un peu similaire sur les vagues qu'on a pu vivre en métropole. On sait à quel point c'est difficile, à quel point moralement et mentalement, c'est éreintant".
Le Picard n'a pu que constater l'extrême fatigue des soignants guadeloupéens : "Quand on est arrivés, ils avaient le sourire parce qu'ils étaient contents de nous voir. Mais une fois passé cet accueil, on sent vraiment la fatigue au sein du personnel soignant. Elle est palpable".
Des journées longues et denses
Quand un soignant attrape le covid, il est arrêté au moins dix jours. Les collègues remplacent les absents sur des repos ou des congés, ce qui accentue l'épuisement physique et moral. Or, à l'image de l'ensemble de la population (le taux de couverture vaccinale n'est que de 31,3 % selon l'ARS de Guadeloupe), les personnels de l'hôpital de Pointe-à-Pitre sont réticents à la vaccination : "C'est culturellement sensible. Il y a des enjeux que je ne comprends pas.", avoue David Ruamotu, dont les questions sont restées sans réponse.
La mission du volontaire va durer quinze jours. Une quinzaine à renforcer les équipes des cadres de santé dans toute la logistique d'organisation des différents services. Il s'attend à des journées longues. Si la première s'est terminée à 19 heures, celle des autres cadres de santé s'est achevée à 23 heures.
Et il faut être polyvalent : "quand il faut transférer des patients, on n'a pas forcément les brancardiers disponibles, donc on donne un coup de main aux équipes. (...) J'ai beau être cadre, je suis aussi infirmier de base, je peux travailler dans différents services : chirurgie, cardiologie, soins intensifs. J'ai une collègue cadre qui a été prise comme infirmière en réanimation".