"Il faut trouver une solution pour le chat, et effectivement, le piégeage du chat à plus de 300 mètres de toute habitation, ce serait une bonne chose". Cette phrase, prononcée par le président de la fédération des chasseurs, a créé une grosse polémique. Pétition, menaces, insultes...
Lors d’un live sur le site d’un e-magazine, le patron des chasseurs propose de piéger les chats à 300 mètres de toute habitation à la campagne. Harcelé et menacé de mort sur les réseaux sociaux, Willy Schraen et toute sa famille ont été placés sous protection policière.
1. « Le chat tue beaucoup, beaucoup plus d’animaux que les chasseurs », explique Willy Schraen
Lundi 4 mai, le président de la fédération nationale des chasseurs est invité à un live par un e-magasine de chasse Chassons.com. Le thème : quid de la chasse et des chasseurs après le confinement. Quelles activités de chasse seront-autorisées dans les zones rouges ou dans les zones vertes, le prix du permis sera-t-il le même cette année, Willy Schraen, originaire du Pas-de-Calais, élu conseiller municipal à Bayenghem-les-Eperlecques en 2014, répond une heure vingt durant aux questions des chasseurs internautes.
Presque une heure après le début de cet échange, le journaliste de l’e-magazine chasse.com relaie une nouvelle question : « Le premier animal qui nuit à la biodiversité est le chat... est-ce que la chasse à un rôle à jouer par rapport à ça ? »
A l’image, on voit le président surpris par le thème évoqué, manifestement un peu hors contexte selon lui mais se prête à la réflexion. « Qu’est-ce que tu veux que je réponde, commence-t-il. La loi a changé, le chat est devenu un animal de compagnie, il n’a pas le statut d’être humain mais on a fait quand même les premiers pas. (...) Évidemment qu’on a un problème avec les chats.(...) Le chat est un chasseur, il chasse toute la nuit. »
Willy Schraen recentre alors sa réflexion sur les chats errants à la campagne. Je « veux que la ruralité et la biodiversité se porte bien et aujourd’hui dans cet équilibre, on a un problème chat. (...) Le chat tue beaucoup beaucoup plus d’animaux que les chasseurs, c’est même pas à comparer (...) » Et de suggérer : « Le piégeage du chat à plus de 300 mètres de toute habitation, ce serait une bonne chose ».
Pour aussitôt enterrer l’idée avec une pointe d’ironie : « Mais je le sens bien, on est attaqué de toute part : on nous reproche la chasse, on nous reproche la corrida, on empêche les combats de coqs, on nous reproche plein de choses, alors maintenant si on piège les chats je vous dis pas à quoi ça va ressembler. »
2. Hugo Clément relaie l’interview du patron des chasseurs sur le Net et les réseaux sociaux s’enflamment
« Vous avez un chat et un jardin ? ». C’est par cette formule qu’Hugo Clément, journaliste sur France 2, commente trois jours plus tard l’interview du patron des chasseurs sur son site Facebook. Il en publie l’extrait le plus polémique.
Connu pour ses engagements écologiques, le journaliste présente la proposition de « ce monsieur en jaune » comme visant à piéger entre guillemets tous les chats domestiques, en ville comme à la campagne. Il accuse aussi le patron des chasseurs de « mettre le recul de la biodiversité sur le dos des chats. » : "Certes, les chats sont un problème pour certaines espèces d’oiseaux. C’est pour cela que les associations demandent de limiter leur nombre en les stérilisant massivement. Mais mettre le recul de la biodiversité sur le dos des chats est particulièrement cocasse venant de l’espèce humaine et plus particulièrement de la fédération nationale de chasse qui continue de défendre l’abattage d’espèces d’oiseaux menacés."
Intéressant. Le président de la fédération nationale des chasseurs propose de piéger les chats domestiques qui s’éloignent à plus de 300 mètres des habitations. https://t.co/qhrJvcKxM6
— Hugo Clément (@hugoclement) May 6, 2020
Sur les réseaux sociaux, la déclaration de Willy Schraen est rapidement interprétée comme une véritable incitation à tuer les félins, ce qui suscite un véritable tollé auprès des défenseurs de la cause animale. Extraits : "Je propose de pieger les chasseurs qui s'approchent a moins de 300 mètres d'une habitation", "On a là un type qui donne le feu vert aux pulsions violentes d'individus armés. En France. En 2020. Sans aucune répercussion judiciaire.", "Mais c’est incroyable ça ! Ils n’ont pas de limites dans la connerie ????"
Et après ça, les chasseurs vont nous demander de les respecter...?
— Aloysius Bertrand (@AloysiusScarbo) May 6, 2020
Qui n'aime pas les bêtes n'aime pas gens
— Véro rhubarbe (@vero_trl) May 6, 2020
Ce mec est taré!
Certains messages vont très loin et sont de véritbales appels à la violence envers les chasseurs. Une pétition est même lancée (près de 70000 signatures ce jeudi) pour que Willy Schraen soit jugé pour ses propos : "Il doit être puni pour ses dires, et nous espérons que les choses seront très vite clarifiées."
La ligue de protection des oiseaux, la LPO, s’aligne, elle, sur le constat des chasseurs et « appelle à responsabiliser les propriétaires de chats pour mieux protéger la petite faune sauvage. »
3. Harcelé et menacé de mort, Willy Schraen est désormais protégé par des gendarmes
En quelques jours, la haine franchit un nouveau seuil. Injures et de menaces de mort remplacent la colère dans les messages sur les réseaux sociaux. Les internautes ne cachent même pas leur identité.
Depuis mardi, Willy Schraen a été placé sous protection policière comme toute sa famille. C’est la gendarmerie qui l’a contacté et lui a proposé ce soutien. Certains groupuscules extrémistes extrêmement violents et actifs sont prêts à passer à l’acte selon eux.
4. La contre-attaque judiciaire
« On dort pas la nuit, moi, ma femme et mes enfants, on écoute les bruits, même s’il y a une protection... tout le monde a très peur. Sidéré dans un premier temps par ce déchaînement de haine, Willy Schraen a décidé de porter plainte. « J’ai relu écouter une centaine de fois ce que j’ai dit, je ne vois pas quelle polémique j’ai ouvert(...)
J’amènerai devant la justice tous les auteurs de ces message, tous autant qu’ils sont. Faut que ça s’arrête un moment, que n’importe quel abruti caché derrière son clavier ou sous une page Facebook a l’impression de devenir le roi du monde parce qu’il insulte quelqu’un ou qu’il le menace de mort, ce n’est plus acceptable et ce n’est plus possible de vivre comme ça. »