Difficile de trouver un pharmacien ce mardi dans le Nord Pas-de-Calais. Environ 9 sur 10 ont décidé de fermer pour protester contre un décret qui remet en cause leur monopole.
##fr3r_https_disabled##Des milliers de pharmaciens (environ 4000) dans les rues de Lille. Une manifestation sans précédent. Leur dernière mobilisation remonte aux années 1990. "On est là avec notre coeur, avec nos tripes, ce n'est pas une promenade de notables", assure Jean-Marc Lebecque, un pharmacien du Pas-de-Calais, en tête de la manifestation.
En blouse blanche, un brassard noir au bras, derrière une banderole proclamant "Dérèglementation mobilisons-nous, Votre officine fermée pour dire non", plus de 4.000 pharmaciens selon les organisateurs, 3.700 selon la police, quittent peu avant 11H00 les abord de la préfecture. Le cortège, devancé par des fumigènes verts et une camionnette blanche barée d'une affiche disant "Des médicaments contrôlés, pas des lasagnes au cheval", traverse
le centre de la capitale des Flandres, en direction de l'Agence régionale de santé (ARS).
98% des 1.600 pharmacies du Nord-Pas-de-Calais sont fermées aujourd'hui
Sur son passage, les rideaux de toutes les pharmacies sont baissés. "98% des 1.600 pharmacies du Nord-Pas-de-Calais sont fermées aujourd'hui",
se félicite Jean-Marc Lebecque, pharmacien à Marck, près de Calais, et co-président du Syndicat des pharmaciens du Pas-de-Calais USPO.
"On ne défend pas un pré carré mais une certaine idée de la santé", affirme-t-il.
Les bonbons en GMS, l'aspirine en officine !
Les plus âgés de ses confrères avouent n'avoir manifesté qu'une seule fois dans leur vie, "en 1990, à propos de la rémunération des marges". Pour les plus jeunes, qui scandent avec enthousiasme "Les bonbons en GMS (grande surface, ndlr), l'aspirine en officine", c'est une première mardi.
Les pharmaciens en grève protestent contre un projet gouvernemental de réforme des professions règlementées. Outre la "menace" qui pèse sur le monopole de la vente de médicaments, ils s'opposent à l'ouverture éventuelle du capital des sociétés
d'exercice libéral (SEL) et à l'arrivée d'actionnaires non pharmaciens dans leurs officines.
"Le médicament n'est pas un produit banal", assure Eric Dantoing, pharmacien à Cysoing (Nord): "en France, nous avons un système de délivrance des médicaments et d'accès aux soins efficace, géré par des professionnels qui ont une obligation de formation", souligne-t-il.
Tous soulignent les dangers de la vente de médicaments sans ordonnance en grandes surfaces. "Combien de fois, je vois arriver des gens qui me disent avoir pris un gramme de Doliprane, et comme ça n'a servi à rien, ils en ont pris en autre", raconte Jean Witté, 33 ans, pharmacien à Fourmies (Nord).
"Il faut leur dire que ce n'est pas le médicament qu'il leur faut, mais personne ne le fera en grande surface", met-il en garde, avant d'ajouter : "on peut se tuer le foie en 24 heures avec du paracétamol".
Installé en zone rurale, il souligne l'importance du "maillage territorial" et craint l'émergence de déserts pharmaceutiques : "les pharmacies s'installeront
dans les zones les plus rentables, en ville". "Dans les déserts médicaux, les gens se raccrochent à nous, et nous sommes encore
un des rares commerces à faire crédit", souligne-t-il. Bertille Parent, 68 ans, retraitée, est venue avec son fils Olivier, 41 ans, qui a repris sa pharmacie, à Annoeulin (Nord). "Nous ne sommes pas une profession privilégiée, mais réglementée oui, pour le bien du public", dit-elle.
Vous pouvez retrouver en ligne une liste des officines de garde pour la journée de mardi.