A Calais, une "new jungle" des migrants à l'écart de la ville

Ses 500 occupants l'appellent "new jungle". Un nouveau camp de migrants jalonné de centaines d'abris de fortune a émergé au cours de la semaine sur l'ancien emplacement d'une décharge en bordure d'autoroute, à sept km de Calais.

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"Les forces de l'ordre ont demandé aux migrants de quitter les squats de Calais et de s'installer aux abords du centre Jules Ferry", raconte le Dr Jean-François Corty, directeur des missions France de Médecins du monde, ONG présente sur le site avec plusieurs autres pour aider les migrants. Le centre d'accueil de jour Jules Ferry, qui a ouvert progressivement depuis le début de l'année, est à un km de cette "new jungle". "Jungle" est le terme générique
désignant depuis des années des campements qui ont été successivement démantelés.

Sans hébergement la nuit, quelque 500 des 1.200 migrants -qui veulent rejoindre l'Angleterre après avoir fui leur pays mais sont bloqués dans le Calaisis - se sont installés sur ce terrain vague à l'est de Calais, d'après un décompte des ONG. Le nombre de migrants avoisinait les 2.300 en janvier, selon
une évaluation de la préfecture.

"We want human rights"

Certains viennent d'une ancienne "jungle", friche proche de l'usine chimique Tioxide, à l'extrémité du port de Calais, évacuée avec l'aide d'ONG
comme Emmaus, sur ordre de la police. Depuis 2013, y survivaient des Africains de l'Est -Soudanais, Érythréens et Éthiopiens- ayant fui la guerre. Le Tunnel sous la Manche, que les migrants cherchent à emprunter clandestinement à bord de camions pour rejoindre leur eldorado, l'Angleterre, est loin, de l'autre côté de Calais, à des km du nouveau camp.

Sur plusieurs hectares se dressent des centaines d'abris de fortune et de tentes, souvent surmontées de pancartes exprimant la colère des résidents.
"We're not animals" (nous ne sommes pas des animaux), "we want human rights" (nous voulons les droits de l'homme), peut-on lire sur quelques unes d'entre elles. D'autres sont de véritables marqueurs communautaires, comme celle portant l'inscription "Réfugiés afghans". Les seuls points d'eau des environs se situent à un kilomètre à l'ouest et 800 mètres à l'est.

Marécages et paludisme

Khan, 32 ans, a fui l'Afghanistan et les talibans qui le persécutaient. "Ce camp est horrible. On voudrait être traités comme des êtres humains, comme en Italie où on nous donne un toit", plaide-t-il, lui qui est en France depuis de longs mois. "Les gens ici veulent aller en Angleterre pour s'intégrer, travailler et payer des impôts", souligne-t-il, refusant tout apitoiement misérabiliste.

En attendant de pouvoir gagner la terre promise, les migrants tentent de rendre leur quotidien le plus digne possible. Le camp n'a pas une semaine d'existence que déjà se dressent une chapelle et une mosquée - à une prudente distance l'une de l'autre, des conflits communautaires ayant déjà eu lieu par le passé. Sur le fronton de la chapelle chrétienne, se dresse fièrement une croix de bois. Les murs ne sont constitués que d'une simple bâche, et sa charpente de fils de fer, mais Yacob, Erythréen de 30 ans, travaille à son amélioration.

"Je n'ai pas de toit, donc j'ai demandé à des amis de m'héberger sous leur tente", raconte-t-il. "Je participe à la construction de l'église parce que c'est important pour nous". Une centaine de mètres plus loin, Aslam, un Afghan de 29 ans, erre à la recherche d'un kit mains libres pour son téléphone. "Mes hauts parleurs ne marchent plus. Je ne veux plus faire les kilomètres à pied pour aller à Calais parce que les commerçants ne comprennent pas ma demande ou me disent ne rien avoir", se désole-t-il.

L'une des raisons de cet éloignement, selon les ONG: exclure, et au moins éloigner, les "indésirables" d'un centre-ville où des vols répétés ont exaspéré les Calaisiens au cours des derniers mois. Des responsables humanitaires s'inquiètent de l'insalubrité: "ce camp est un lieu hostile, marécageux, sans accès à l'hygiène", soutient Martyne Degryse de Médecins du Monde. Selon elle, "comme il y a quelques années, on pourrait revoir le paludisme". 
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