Pris dans la polémique de la rénovation de son appartement de fonction, Thierry Lepaon, le secrétaire général de la CGT, souligne la responsabilité du trésorier du syndicat et dénonce la déloyauté de certains responsables de la centrale.
Le numéro un de la CGT, Thierry Lepaon, a reconnu mardi "une faute collective" de la direction concernant les travaux coûteux dans son appartement de fonction, imputant principalement la responsabilité du devis au trésorier Eric Lafont, mais il a aussi accusé de déloyauté certains dirigeants du syndicat.
"Il y a une faute collective qui ne masque pas des responsabilités individuelles", a affirmé M. Lepaon devant le CCN ("parlement" de la CGT), alors que les révélations la semaine dernière du Canard Enchaîné sur les travaux effectués dans son appartement de fonction situé à Vincennes avaient suscité un vif émoi en interne et un tollé médiatique.
"Cela fait sept jours que, chaque minute qui passe, je pense aux syndiqués de notre CGT, aux militants, aux dirigeants" et aussi "à mes proches", a affirmé M. Lepaon visiblement touché par l'ampleur prise par cette affaire. Il a affirmé avoir "appris par la presse le devis et le montant des travaux réalisés" qui, selon lui, se sont élevés à 105.000 euros et non pas 130.000 comme l'avait affirmé Le Canard Enchaîné.
"Des failles majeures dans le fonctionnement"
Il a aussi précisé que son appartement faisait 79 mètres carrés et non pas 120, comme l'avançait l'hebdomadaire. Cette affaire, a-t-il reconnu, "révèle des failles majeures dans le fonctionnement interne de prise de décisions", puisque "les arbitrages et la décision finale" pour cette location n'avaient été "ni débattus, ni validés par une instance".
Ce type de décision relevait "jusqu'à présent d'une seule personne", non tenue "d'en référer a priori à nos instances", a-t-il dit dans une allusion au trésorier Eric Lafont qui a signé le devis. C'est cette "faille qu'il faut absolument corriger", a estimé le leader de la CGT en annonçant le recrutement d'un "directeur administratif et financier" qui devra "rendre compte de son activité conjointement à l'administrateur de la CGT", Eric Lafont, "et au Bureau confédéral" (exécutif).
Thierry Lepaon a justifié le choix de Vincennes par sa proximité avec le siège de la CGT à Montreuil et "la discrétion, le calme et la sécurité" et "un certain degré d'urgence", rappelant avoir logé plusieurs mois à l'hôtel. Elu en mars 2013 secrétaire général, il habitait auparavant en Normandie. "Depuis Grenoble, Caen ou Lille, Vincennes n'a pas de connotation particulière", a-t-il dit pour justifier le choix de ce quartier cossu. Le numéro un de la CGT va adresser une lettre à tous les syndiqués sur ce sujet pour "qu'ils soient à l'aise pour en parler".
"Certains "fragilisent" la CGT"
Mais la pointe de son attaque a visé "des dirigeants" de la CGT "qui s'expriment, sous couvert d'anonymat" à la presse et "fragilisent l'organisation". Il faisait ainsi référence à des commentaires peu amènes le visant. L'affaire de l'appartement a attisé la crise qui secoue la CGT depuis la guerre de succession de 2012.
Le syndicat est déchiré par des conflits de personnes et des divergences d'orientation. "Je considère que nous avons un problème de fonctionnement du Bureau confédéral" (exécutif resserré de dix membres) "qui handicape notre capacité collective", a affirmé M. Lepaon. "La qualité des personnes n'est pas en cause, mais l'engagement au sein même du Bureau confédéral pose problème" et "cela pourrait nous conduire à ne plus travailler collectivement et donc à ne plus être la CGT", a-t-il prévenu.
M. Lepaon a décidé de "recevoir individuellement chaque membre du Bureau confédéral" pour s'assurer "de leur engagement et adhésion à l'esprit d'équipe". "Si nécessaire je reviendrai vers le CCN" organe décisionnel suprême de la CGT, a averti le numéro un, qui entend renforcer le bureau de deux membres supplémentaires.
Selon lui, le délateur qui a adressé à la presse un devis des travaux est "responsable des conséquences de ses actes". La CGT a lancé une enquête interne pour le débusquer. Le numéro un de la CGT a accusé le Premier ministre Manuel Valls - qui avait plaidé pour "l'exemplarité" dans cette affaire - d'avoir "donné le coup d'envoi au déferlement médiatique" . "Qu'il s'occupe des affaires de la Nation" et "laisse la CGT s'occuper des siennes", a lancé M. Lepaon qui est convié mardi après-midi à Matignon à l'installation du comité de suivi des aides publiques.