Oriane Verdier est journaliste. En avril dernier, avec sa consoeur Aabla Jounaïdi, elle a réalisé plusieurs reportages en Ukraine, pour la radio RFI. Aujourd'hui, les deux reporters sont en compétition, au prix Bayeux des correspondants de guerre.
Oriane Verdier, 32 ans, a réalisé une série de reportages à Odessa, ville convoitée par les Russes, au Sud-Est de l'Ukraine. Quand elle arrive sur place, avec sa consoeur Aabla Jounaïdi, elle constate que la ville est soumise à des alertes fréquentes de tirs de missiles.
Odessa en proie aux bombardements
"Le système anti-missiles de l'armée ukrainienne est efficace, observe-t-elle. Un seul tir a touché un immeuble d’habitation à Odessa lorsque nous y étions". Du coup, en marge de la guerre, les deux femmes peuvent réaliser différents sujets : un portrait de jeunes Ukrainiens s'entraînant à la défense territoriale, celui d'un ingénieur reconverti dans la fabrication de gilets pare-balles, des séances de formation à la cyberguerre ou la mobilisation de la population civile pour aider l'armée. "A Odessa, nous avons aussi fait un reportage sur la redéfinition de l'identité ukrainienne et le positionnement politique d'une partie de la jeunesse" développe Oriane Verdier, "un témoignage très intéressant."
Nous avons rencontré une famille au parlé russe mais dont le fils refusait de parler cette langue
Oriane Verdier, journaliste à Radio France Internationale.
"A Zaporijia, plus à l'est, nous avons pu passer une journée dans un hôpital militaire sachant que les Ukrainiens ne communiquent pas beaucoup sur les pertes qu'ils peuvent subir" poursuit la journaliste. Puis, l'équipe se rend dans la ville de Dnipropetrovsk pour traiter de la Pâques orthodoxe où deux églises s'opposent, celle d'Ukraine et celle de Russie. Deux patriarcats aux discours différents sur la guerre. Comment la population se positionne-t-elle entre les deux ? se sont interrogées les journalistes.
Il y avait des listes de journalistes sur lesquelles il fallait s'inscrire plusieurs jours à l'avance pour accéder au front. Il nous a donc fallu trouver des solutions autres pour couvrir l'actualité.
Oriane Verdier, journaliste à Radio France Internationale
Puis, direction le Donbass, encore plus au Nord, pour tenter de rejoindre la ligne de front. Mais là, l'équipe se heurte à la concurrence des autres médias et aux multiples autorisations à obtenir pour intégrer les rangs de l'armée. "Dans un premier temps, nous avons fait un reportage sur le mode de vie de villageois et sur la façon dont ils s'organisent, pour faire face notamment, à la pénurie de certains produits".
Mais la complexité de la situation dans le pays se cristallise à travers les actions militaires, et en particulier celles du bataillon Azov, retranché dans l'usine Azovstal de Marioupol. Un régiment constitué de néonazis selon Moscou, à l'image du pays tout entier, ce qui justifierait l'invasion, selon la propagande du Kremlin. Les deux reporters décident donc de se rendre près de Pokrovske, à la rencontre d'un membre du régiment Azov ayant créé une unité gouvernementale de la Défense territoriale.
Témoigner auprès des jeunes générations
Arrivée hier à Bayeux, Oriane Verdier a rencontré des élèves du lycée Marie-Curie de Vire, particulièrement avertis, puisqu'ils avaient visionné les reportages soumis au "jury jeune public". Comment se prépare-t-on au reportage de guerre ? Comment vit-on en tant que correspondant sur le terrain ? Comment se protège-t-on ? Autant de questions auxquelles la journaliste s'est volontiers prêtée pour témoigner d'une réalité qui peut sembler dépasser l'entendement.