Le patron des maires de France dénonce la "surbureaucratie" qui pèse sur les élus locaux

David Lisnard, le maire (LR) de Cannes est l'invité d'honneur de l’assemblée générale de l’Union amicale des maires du Calvados, ce lundi à Caen. Le président de l'association des maires de France

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"Rebâtir la confiance", c'est le thème de l’assemblée générale de l’Union amicale des maires du Calvados qui a lieu ce lundi 3 avril au centre des congrès de Caen. Ces derniers mois, notamment en Normandie, plusieurs maires ont fait l'objet de menaces ou d'incivilités de la part de leurs administrés. "Rebâtir la confiance", c'est renouer le lien entre les citoyens et leurs élus. Mais aussi avec l'Etat, souligne le maire (LR) de Cannes et président de l'association des maires de France. Pour David Lisnard, les maires font l'objet d'un véritable "harcèlement textuel". 

France 3 Normandie : Qu'entendez par harcèlement textuel ?

C’est d’abord le constat d’une augmentation des textes réglementaires qui entravent l’action. J’ai vécu ça en entreprise. C’est encore plus vrai en mairie. Le code général des collectivités territoriales, qui régit toutes l’organisation des collectivités, a été multiplié par trois en seulement 20 ans. Le code de l’urbanisme est passé de 600 pages à 3600 pages en 40 ans. Le code de l’environnement est passé de 100 000 mots à 1 million de mots en dix ans. Ce “harcèlement textuel” renvoie à une surbureaucratie qui est une des caractéristiques de la France et qui fait que nous avons plus de prélèvements obligatoires qu’ailleurs, plus de dépenses publiques et de moins en moins de services publics. C’est tout le paradoxe.

Pour avancer d'un mètre, vous devez déployer un kilomètre d'énergie

David Lisnard, président de l'Association des maires de France

Les maires doivent-ils acquérir d'avantage de compétences qu'avant ?

Un maire, c’est un citoyen qui se retrouve élu, qui est mandaté, qui doit se former en permanence. Mais surtout, il faut déployer beaucoup plus d’énergie pour un résultat qui met plus de temps à venir. Et ça alimente cette impuissance publique qui est, à mon avis, une des causes de la crise civique dans laquelle nous sommes. Pour avancer d’un mètre, vous devez déployer un kilomètre d’énergie. Quand j’ai commencé à être élu local en 2001, avant de lancer un projet, il fallait regarder ce qui était interdit. Maintenant, on regarde ce qui est autorisé. Ça symbolise toutes les difficultés qu’on affronte.

Le problème, c’est qu’il y a de moins en moins de vocations. Et s’il y a moins de vocations, il y a moins de choix, il y a moins de qualité.

David Lisnard, président de l'Association des maires de France

Les maires ne sont-ils pas victimes de cette crise civique ? 

On ne va pas se plaindre. Personne ne nous oblige à être maire. Mais le problème, c’est qu’il y a de moins en moins de vocation. Et s’il y a moins de vocations, il y a moins de choix, il y a moins de qualité. Tout ça est une spirale infernale.

Nous sommes un pays merveilleux mais qui est dévoré par des démons de l’incivilité, de la violence, du découragement, du dénigrement. Effectivement, je vois beaucoup de mes collègues qui jettent l’éponge parce que se faire salir pour rien sur les réseaux sociaux, se faire agresser en sortant de chez soi, il faut s’y habituer. Moi, je l’ai vécu moi-même. Ce n’est pas évident. Et puis chacun tient à son honneur, c’est logique et respectable. Donc tout ça c’est une spirale négative.

Il ne faut pas être défaitiste. Mais il est temps en France qu’on retrouve le sens de l’engagement, qu’on retrouve le sens du respect, mieux respecter les autres, mieux respecter soi-même, c’est la seule façon de s’en sortir. Regardez le débat sur les retraites. Chacun doit afficher ses convictions, chacun doit pouvoir manifester ou pas. Mais regardez la spirale de la violence, du mépris parfois de certains dirigeants à l’égard des habitants. Il faut absolument retrouver une concorde nationale et ça ne peut se faire que par un effort individuel, y compris civique.  

Propos recueillis par Karine Lepainteur

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