Francis D’Hulst, maire délégué de Portbail, avait été frappé alors qu'il intervenait sur un campement sauvage. Sa plainte avait été classée sans suite puis le procureur de la République avait requalifié les faits. L'agresseur de l'édile écope d'une peine de 3 mois de prison.
L'agresseur du maire de Portbail est condamné à 3 mois de prison ferme pour "violences et outrages à l’encontre d’une personne dépositaire de l’autorité publique". La décision est tombée mardi 15 décembre. Le jeune homme de 25 ans n'était pas présent à l'audience.
Le maire de Portbail agressé dans l'exercice de ses fonctions
Le 6 août 2020, Francis D’Hulst, maire délégué de Portbail, tente de faire partir des jeunes qui ont installé un campement sauvage près de la plage. L'un des individus assène plusieurs coups à l'élu, dans le cou et la nuque. Le maire, âgé de 70 ans, porte plainte.
Trois jours plus tard, le maire n'en revient pas : le parquet n'impose à son agresseur qu'un simple rappel à la loi. Mais un mois plus tard, la justice change de ton. Le garde des Sceaux promet une réponse de la justice "proportionnée, systématique et immédiate".
Le garde des Sceaux Eric Dupont-Moretti promet une réponse de la justice "proportionnée, systématique et immédiate"
Au mois d'août, la plainte du maire de Portbail avait été classée sans suite. Le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, envoie le lundi 7 septembre, une circulaire aux procureurs afin de mieux défendre les élus et en particulier les maires, victimes d'insultes et de violences."Une réponse pénale systématique et rapide doit être apportée par les parquets qui éviteront les simples rappels à la loi", selon la circulaire.
S'agissant d'insultes, il conviendra de retenir la qualification d'outrage sur personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public plutôt que celle d'injures
La qualification d'outrage permet notamment d'infliger des peines de travail d'intérêt général (TIG) aux auteurs de violences. La circulaire prévoit aussi des peines "d'interdiction de paraître ou de séjour" sur le territoire de la commune pour les personnes ayant agressé des élus. Pour les faits plus graves, elle recommande la comparution immédiate.
Le garde des Sceaux souhaite encore que les élus victimes bénéficient d'un "accueil personnalisé" et soient "systématiquement informés de façon personnalisée des suites judiciaires décidées".
Francis d'Hulst, maire de Portbail, attendait ce soutien envers les élus
Quand nous l'avions rencontré, Francis D'Hulst avait entrepris de classer les nombreuses lettres qui étaient parvenues à la mairie. "Des maires m'ont fait part de leur soutien, des communes voisines mais aussi de toute la France. Des associations d'élus m'ont écrit, mais aussi un officier de gendarmerie. J'en ai bien reçu une cinquantaine", nous expliquait-il, mercredi 2 septembre. L'affaire qui l'a bien malgré lui propulsé dans la lumière de l'actualité, il s'en serait bien passé.
Le 6 août 2020, quand il va au devant de trois jeunes qui font du camping sauvage, il "leur explique que c'est interdit et qu'il n'est pas très responsable de faire du feu à deux mètres d'une pinède alors qu'il fait très chaud et très sec. Quand ils m'ont insulté et menacé de brûler ma voiture, je leur ai dit qu'on ne pouvait pas discuter et que j'allais trouver la gendarmerie. C'est alors que j'ai été frappé à la nuque et dans le dos."
Au début de l'été déjà, il avait été insulté et menacé lors du passage d'un cirque "qui s'était installé sans autorisation sur un terrain privé et qui roulait avec des camions de 38 tonnes sur un pont interdit aux véhicules de plus de 7 tonnes...". Cette agression physique subie dans l'exercice de son mandat l'a profondément ébranlé. "Elle signifie que désormais, lorsqu'on intervient pour des choses mêmes benignes, on risque notre vie." Francis D'Hulst décide donc de porter plainte. "Ce qui m'a fait plus plus mal, ce ne sont pas les coups de poing. C'est la réponse de la justice. Un simple rappel à la loi..."
233 maires agressés depuis le mois de janvier en France
Au coeur de l'été, l'affaire fait le tour des médias. L'Association des Maires de France (AMF) a interpellé le gouvernement. Le mercredi 2 septembre, Eric Dupont-Moretti reçoit des associations d'élus. Le garde des Sceaux annonce une circulaire "dans les prochains jours, voire dans les prochaines heures". Le fermeté sera de mise : "chaque agression commise contre un maire est une agression commise contre la République", dit le ministre. Selon les chiffres de l'Association des maires de France (AMF), 233 maires ont été agressés de janvier à juillet.
"J'espère que ce ne sont pas des paroles en l'air", disait alors un Francis D'Hulst qui partageait l'inquiètude du ministre. "Il ne faut pas s'apensantir sur mon histoire. Mais sur le principe, il est important de protéger les élus. J'ai 71 ans. Mes petits-enfants me demandent pourquoi je me suis présenté aux élections si c'est dangereux. Dans beaucoup de communes, il n'y avait qu'une liste aux municipales. Il y a quand même un problème".
Si on ne protège pas les élus, ce sera bientôt une espèce en voie de disparition.
Une pétition lancée par des habitants et les témoignages d'affection de ses administrés l'ont conforté dans l'idée de ne pas abandonner : "ce serait donner raison à ceux qui agressent et qui insultent". Francis D'Hulst avait toutefois décidé de prendre bien plus de précaution. Désormais, il n'irait plus seul au devant de ses concitoyens s'il s'agit de rappeler des règles ou des interdits.