Un jeune homme de 21 ans, jugé pour "non-respect du confinement", a été relaxé par le tribunal correctionnel de Caen le lundi 20 avril, après 4 récidives. Le procureur de la République avait requis 2 mois ferme. Le Parquet a fait appel.
Après 4 récidives en moins d'un mois, un jeune caennais de 21 ans, jugé pour "non-respect du confinement", a été relaxé par le tribunal correctionnel de Caen, le lundi 20 avril. Le procureur de la République avait quant à lui requis 2 mois ferme. Le parquet a fait appel.
Les faits
Vendredi 27 mars, Xavier (le prénom a été modifié), prend son heure de sortie quotidienne. Il tombe nez à nez avec un agent de police municipale et lui explique qu'il souhaite "se procurer du tabac". Celui-ci le verbalise pour "non-respect du confinement".Les jours qui suivent, jusqu'au jeudi 16 avril, le jeune homme sera contrôlé à 4 nouvelles reprises puis verbalisé. Xavier est alors placé en garde à vue pour infraction de 5ème classe.
Vendredi 17 avril, il est placé en détention provisoire, et déféré à la maison d’arrêt de Caen.
Lundi 20 avril, il est jugé au tribunal correctionnel de Caen. Après une demi-heure d'audience, le procureur de la République requiert 2 mois ferme. Une heure plus tard, la cour rend son délibéré. Le jeune homme, déjà connu des services de police, est relaxé, puis libéré.
Un vide juridique
5 contraventions, 4 récidives, et une relaxe ? L'avocat de Xavier, Me Victor Defrancq, a en effet fait valoir la nullité de l'acte juridique et des sanctions encourues par son client, car selon lui, "non conformes à la loi". On vous explique.Xavier, a bien été verbalisé à 5 reprises et constaté en état de récidive. Or, les contraventions émises par la police municipale de Caen ont été enregistrées dans un fichier baptisé "ADOC".
Ce fichier, consultable par les forces de l'ordre, a été créé par un arrêté datant du 13 octobre 2004. Il prévoit l'enregistrement de données liées aux infractions routières.
Selon Me Victor Defrancq, un tel fichier ne peut être consulté, en dehors des fonctions qui lui sont confiées et déclarées à la CNIL.
Problème, les agents en question auraient détourné l'usage du fichier ADOC, dans le but de constater si Xavier était en récidive pour "non-respect du confinement".
L’arrêté du 13 octobre 2004, portant création du fichier ADOC, n’a en aucun cas prévu le recensement des contraventions autres que celles liées au Code de la route. Son utilisation dans le cadre de la présente procédure est donc manifestement illégale et représente un détournement des fins du fichier litigieux qui entraîne de facto, la nullité de l’intégralité des poursuites.
Pour régulariser ce vide juridique, le ministère de l'Intérieur a pris un nouvel arrêté le 14 avril 2020 pour modifier le précédent et remplacer les termes “contraventions et délits relatifs à la circulation routière” par “infractions faisant l’objet d’une amende forfaitaire.”
Conséquence, toutes les contraventions réalisées avant ce nouvel arrêté datant du 14 avril, ne peuvent être juridiquement prises en compte, ni d'avoir d'effet rétroactif.
Quelles sanctions prévues en cas de non-respect du confinement ?
Depuis le mardi 17 mars 2020, les citoyens français ont pour obligation de rester chez eux et ne sont autorisés à se déplacer à l’extérieur de leur domicile qu’en cas de « nécessité » et obligatoirement munis d’une attestation dérogatoire de déplacement.
Toutes personnes qui se déplacent pour des motifs non autorisés, ou en l’absence d’une attestation dérogatoire de déplacement complétée en bonne et due forme, s’exposent à de lourdes sanctions.
??? #Covid19 | Pour une application ➕ efficace des mesures de confinement, le décret n° 2020-357 du 28 mars 2020 forfaitise la contravention de 5e classe applicable en cas de récidive.
— Ministère de l'Intérieur (@Place_Beauvau) March 29, 2020
?1ère sanction : 135€ d'amende
➡️ Récidive ds les 15 jrs : 200€ d'amende, majorée à 450€ pic.twitter.com/INy5MG2fDj
L’article L. 3136-1 du code de la santé publique, alinéa 4 :
« […] Si les violations prévues au troisième alinéa sont verbalisées à plus de trois reprises dans un délai de trente jours, les faits sont punis de six mois d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende ainsi que de la peine complémentaire de travail d'intérêt général, selon les modalités prévues à l'article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code, et de la peine complémentaire de suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire lorsque l'infraction a été commise à l'aide d'un véhicule […] ».
Exemples de sanctions récentes
Le mardi 24 mars, une femme de 24 ans a été condamnée par le tribunal correctionnel d’Évry, en "état de récidive légale", à 7 mois de prison ferme et 350 euros d’amende, pour ne pas avoir respecté les mesures de confinement et pour avoir craché sur les policiers qui l’ont contrôlée en leur indiquant "être infectée par le coronavirus".
Une semaine plus tard, le mardi 31 mars 2020, un homme de 22 ans a été condamné par le tribunal correctionnel de Paris à 105 heures de travaux d’intérêt général pour "non-respect réitéré du confinement".