"On travaille dur pour gagner peu" : Hippodromes fermés, manif à Paris, la "réaction de survie" du monde des courses hippiques

Un projet de hausse de la fiscalité sur les paris hippiques alarme les éleveurs, les entraîneurs et les jockeys qui manifestent à Paris ce jeudi 7 novembre. "On est une vraie filière agricole, on est des laborieux", explique l'entraîneur Thibault Lamare. "Taxer le PMU revient à prendre dans nos ressources".

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En temps normal, lorsqu'il prend la direction de Paris, c'est pour se rendre sur un champ de courses. Stéphane Meunier entraîne des trotteurs près du haras du Pin. Il est aussi driver. Exceptionnellement, ce jeudi 7 novembre, les hippodromes sont fermés. Aucune course n'est organisée en France. Le fait est rarissime : en dehors de la période du Covid, le monde hippique ne s'était jamais arrêté depuis la Seconde Guerre mondiale.

"Il ne faut pas le perdre de vue. Nous sommes une production agricole qui fait un spectacle 365 jours par an", rappelle Stéphane Meunier qui préside le syndicat des entraîneurs, drivers et jockeys de trot. Une fois n’est pas coutume, il vient à Paris pour manifester une colère qu'il partage avec beaucoup de collègues du trot et du galop.

Tout est parti d'un amendement déposé à l'Assemblée nationale lors de la discussion budgétaire. Les parlementaires sont priés de faire preuve d'imagination pour renflouer les caisses de l'État. Un texte prévoyait d'augmenter la taxe de 6,9% à 7,5% sur les paris hippiques passés dans les hippodromes et dans les PMU et de 6,9% à 15% pour les paris en ligne.

18 000 emplois en Normandie

Le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin a dit son opposition à cette proposition et l'amendement a depuis été rejeté, mais le mal est fait. Le monde des courses est en alerte et redoute que cette hausse de la fiscalité revienne au Sénat ou à la faveur d'un 49.3. "Nous, ce qu’on veut, c’est que Matignon mette par écrit qu'il n'y aura pas de hausse", explique Thibault Lamare, entraîneur au Haras de Querville dans le Calvados et porte-parole de la filière."Aujourd'hui, on est obligé de monter à Paris. C’est une réaction de survie. Une telle taxe est extrêmement dangereuse".

"Le PMU, c'est notre source de revenu", ajoute Stéphane Meunier. C'est en effet l'argent des parieurs qui finance la filière avec une répartition très encadrée. 80% des gains sur l'hippodrome reviennent au propriétaire du cheval, 15 % à l'entraîneur et 5 % au jockey. L'éleveur du cheval reçoit aussi un pourcentage sur les gains.

Les paris hippiques en recul

Depuis une dizaine d'années, les paris hippiques sont en recul. Ils pâtissent du développement des paris sportifs en ligne. Le gâteau à se partager se réduit. Dans ce contexte, la perspective d'une possible hausse de la fiscalité a fait l'effet d'une douche froide. "L'économie est déjà très compliquée. On a les mêmes problèmes que n'importe quelle entreprise avec les hausses des coûts de l'énergie", explique Stéphane Meunier. "On est dans la compétition. Les meilleurs gagnent bien leur vie. Le ventre mou a du mal à s'en sortir".

"C'est difficile en ce moment", confirme une éleveuse de trotteurs installée dans l'Orne. "On l'a constaté encore récemment aux ventes. Les acheteurs sont très frileux. Les courses et l'élevage, c'est une chaîne. Si la société de courses distribue moins d'argent, on va aller dans le mur". En Normandie, le monde des courses représente 18 000 emplois directs et indirects.

"Tous les matins, dès 7h, on est avec les chevaux, on fait plus de 12h par jour", explique Thibault Lamare. "On n’arrête pas. Et notre quotidien va même plus loin que le travail. On aime notre boulot, on aime nos animaux. On ne compte pas notre temps passé à leurs côtés". Stéphane Meunier renchérit : "Quand on va aux courses, il y a aussi les temps de route. Les jours de nocturne, on rentre à 3h du matin. On l'a voulu. On ne s'en plaint pas, mais on n'est pas des nantis. On travaille dur pour gagner peu".

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