"Il n'y a pas pire scénario possible" : les opposants à la réforme des retraites sonnés par le Conseil constitutionnel

En Normandie, plusieurs rassemblements ont eu lieu ce vendredi soir alors que le Conseil constitutionnel validait la réforme des retraites. Colère et incompréhension dominaient parmi les manifestants. Les organisations syndicales appellent à poursuivre la mobilisation.

Rendez-vous avait été donné à 17 h 30 ce vendredi soir place de la République à Caen, à deux pas de la préfecture. Près d'un millier de personnes étaient présentes, attendant la décision du conseil constitutionnel. Et celle-ci est tombée, vers 18 heures, comme un couperet. Une chape de plomb a semblé s'abattre sur les manifestants, comme plongés en état de sidération. Il aura fallu quelques minutes pour retrouver les mots, des mots empreints de colère et d'incompréhension.

"J'ai l'impression d'être rien", lâche dépitée Françoise, 57 ans, "Je suis peut-être une "gauloise", je suis peut-être rien mais moi, ce matin à 4 h 30, j'étais debout pour aller bosser. Mon mari pareil (...) Aujourd'hui, on s'est foutu de moi. Macron ne nous entend pas, il n'a pas compris que la France c'est nous." Pour Raymond, 65 ans, la décision du conseil constitutionnel est vécue comme "un autre 49.3". Le retraité bat le pavé pour que d'autres puissent bénéficier des mêmes droits que lui. Et se sent également méprisé. "Macron n'a plus rien à perdre, il est en train de mettre à feu et à sang le pays, il n'en a rien à foutre. Et il appelle le mouvement une "foule". Ce n'est pas reconnaître que le peuple est dans la rue. Et le peuple, ça va des lycéens jusqu'au retraités. 80% des gens sont contre cette réforme. A quel moment on peut avoir cette lucidité de s'enfermer dans : "je ferai cette réforme, un point c'est tout" ?"

"Ça me met en rage"

Ce vendredi soir, Caen n'a pas été mis à feu et à sang. Les opposants à la réforme des retraites ont improvisé un défilé dans le centre-ville. Des poubelles et du mobiliser urbain ont été incendiés mais aucun affrontement avec les forces de l'ordre ne s'est produit. La pilule était pourtant d'autant plus amère que le conseil constitutionnel venait également de retoquer l'un des espoirs des manifestants. "Ils refusent le référendum. Moi, c'est vraiment ça qui me révolte. Ça  me met en rage", confiait Soen, co-animateur des jeunes socialistes, "On était prêt à se mobiliser. Ils savaient très bien que si on pouvait le faire, on allait le faire."

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En Normandie, plusieurs rassemblements ont eu lieu ce vendredi soir alors que le Conseil constitutionnel validait la réforme des retraites. Colère et incompréhension dominaient parmi les manifestants. Les organisations syndicales appellent à poursuivre la mobilisation. ©S.Derrien/R.Chen

Continuer à se mobiliser, c'était ce vendredi soir le mot d'ordre lancé par les responsables syndicaux aux manifestants encore sonnés. "Le côté sucré de la réforme, c'est à dire les quelques avancées sociales pour édulcorer le fond de la réforme, qui est une régression importante" ont été invalidées vendredi soir, "il n'y a pas pire scénario possible que celui-ci", déplorait Jérôme Adell, secrétaire départemental (14) de la FSU. "Le conseil constitutionnel a pris une grave décision. La loi est validée comme constitutionnelle. Mais nous lutterons pour qu'elle ne soit pas appliquée." Pour son homologue de la CGT, Alan Bertu, "le combat ne s'arrête pas, bien au contraire. Le combat va devoir se durcir. Le durcissement passera par une remobilisation forte des travailleuses et des travailleurs." Et Jérôme Adell d'espérer "un 1er mai historique".

"On fera sauter leur 49.3 et leur Conseil constitutionnel"

A Rouen, des dizaines de manifestants se sont rassemblés au palais de justice pour laisser éclater leur colère. "Ces gens-là (ndlr : le Conseil Constitutionnel), j'en attendais rien, ce sont des politiciens", explique Frédéric Podguszer militant CGT, "ce que fait la loi, la rue peut le défaire. Je pense que si t'as pas 3 millions de grévistes mais que tu en as 10 millions, on fera sauter leur 49.3 et leur Conseil constitutionnel, tout ça ça vaut rien si on arrête le boulot pour de bon!"

Parmi les manifestants, la députée insoumise de Seine-Maritime, Alma Dufour, enfonce le clou : "on est dans une crise démocratique profonde, on le voit depuis des années avec l'abstention qui grandi. Je pense que le gouvernement serait bien avisé de regarder ce qu'il se passe dans la rue et ne pas se cacher derrière les artefacts de la constitution qui les protège."

Dans la cité Océane aussi, les Havrais se sont rassemblés spontanément devant l'hôtel de ville.  "C'est une douche froide", réagit un manifestant après la décision des Sages. "On va redescendre dans la rue, renforcer nos rangs et on va continuer à se mobiliser jusqu'au retrait", conclut-il.

A Alençon, une centaine de personnes se sont retrouvées vendredi soir devant la préfecture de l'Orne pour un rassemblement qui s'est lui aussi déroulé dans le calme. Les manifestants ont simplement accroché ou lancé à travers les grilles des affichettes proclamant "49.3, c'est non !".

C'est au cœur de la nuit que la promulgation de la loi par le président de la République a été annoncée. Ce samedi matin, aucun rassemblement ne semblait être organisé en réaction à cette annonce. Des militants normands appelaient plutôt à participer à une manifestation "régionale" organisée chez nos voisins bretons ce samedi à Rennes.

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