La 15e édition de "Tous à l’Opéra" se déroule ce week-end à Caen et partout en France. L’objectif : ouvrir les portes de l'opéra et de ses coulisses, gratuitement. L'occasion aussi de découvrir ceux qui le font vivre. Rencontre avec Marie-Andrée Bouchard-Lesieur, mezzo-soprano normande de 29 ans.
"Je n’ai pas grandi dans une famille de musiciens. On écoutait un peu de musique classique, mais j’ai découvert l’opéra au collège, à la télé", répond Marie-Andrée Bouchard-Lesieur lorsqu’on lui demande comment tout a commencé pour elle. Et son histoire fait écho à l’opération "Tous à l’Opéra" dont la 15e édition se déroule ce week-end partout en France, notamment à Caen. L’objectif de cet événement est d'ouvrir l’Opéra à tous afin de faire découvrir un lieu parfois perçu comme inaccessible et de le démocratiser.
Pour l’artiste de 29 ans originaire de Normandie, il est fondamental de déconstruire les idées reçues autour de lui. "Il y a quelque chose de très populaire dans l’opéra. Au 19e siècle c’était un art populaire", indique celle qui, en pratiquant le chant lyrique, a converti ses proches. "Ça m’est arrivé de donner des concerts dans la région et des amis viennent pour me faire plaisir et en fait ils disent avoir passé un super moment ! Donc il faut faire découvrir cet art. C’est important", insiste celle qui croit en l’importance de "briser la glace" autour de l'opéra.
C’est quelque chose qui me tient à cœur. La dernière fois que je suis revenue en Normandie, j’ai contacté mon professeur de musique du collège. Les enfants me posaient pleins de questions. C’est important de sensibiliser les jeunes à la musique classique en général.
Marie-Andrée Bouchard-Lesieur, chanteuse lyriqueFrance 3 Normandie
"On peut faire découvrir à un enfant l’opéra et soit il sera un public soit il peut en faire son métier. Il y a toutes sortes de métiers, notamment les métiers de l’ombre : la régie, les costumes. On est une région, notamment dans la Manche, où on est loin des productions lyriques. Quand on est à Cherbourg ou Avranches, on a une heure pour aller au théâtre donc c’est compliqué", détaille cette artiste qui a commencé le chant lyrique sur le tard.
"Hamlet ma douleur est immense", duo extrait d’Hamlet d’Ambroise Thomas avec Marie-Andrée Bouchard-Lesieur (Gertrude) et Florian Sempey (Hamlet), Auditorium de l’Opéra de Bordeaux, juin 2021.
Les débuts
Rien ne prédestinait la jeune femme qui a grandi entre Carentan et Grandcamp-Maisy à devenir chanteuse lyrique. Après avoir découvert l’opéra adolescente et vu son premier spectacle à 16 ans, à l’Opéra Garnier de Paris, Marie-Andrée, qui a toujours aimé chanter, poursuit des études très exigeantes. Après une hypokhâgne au lycée Malherbe de Caen, elle démarre un cursus à Sciences Po Bordeaux. C’est dans la capitale girondine qu’elle a alors un déclic : "J’aimais chanter, j’allais au théâtre et un jour je me suis dit "Allez ! Je vais voir comment ça fonctionne." Elle se présente au concours d’entrée au Conservatoire de Bordeaux et intègre le cursus.
Je n’avais jamais pris de cours de chant avant. C’était mes premiers et quand je suis rentrée j’ai compris que c’était vraiment ce qui me plaisait.
Marie-Andrée Bouchard-Lesieur, mezzo-sopranoFrance 3 Normandie
L’étudiante qui visait l’école nationale de la magistrature décide finalement d’arrêter ses études à Sciences Po pour se consacrer entièrement au chant. "Pour passer les concours d’opéra il y a souvent une limite d’âge de 28-29 ans, explique-t-elle. Moi, j’ai intégré le conservatoire à 21 ans et la formation d’un chanteur lyrique c’est 7-8 ans. Alors il n’y avait pas de temps à perdre." Après une formation de 5 ans et le diplôme de chant en poche, la mezzo-soprano normande intègre l’Académie de l’Opéra de Paris, école intégrée à l’institution, où les artistes sont en résidence et donnent des concerts, ont des rôles et participent à des productions.
Attachée à la Normandie
Depuis juin 2021, elle est lancée dans le monde professionnel de l’opéra. Et l'artiste ne perd pas de temps pour se faire remarquer : en mars dernier, elle est nominée dans la catégorie "Révélation" aux Victoires de la musique classique 2022. Si c’est la mezzo-soprano Eugénie Joneau qui l'emporte, cette reconnaissance fut une grande fierté pour la jeune femme : "C’est une grande joie de me dire que je suis reconnue par mes pairs."
L’artiste lyrique prépare actuellement une série de représentations à Paris - "Parsifal" de Wagner à l’Opéra Bastille du 24 mai au 12 juin ou encore "La Flûte enchantée" de Mozart à l’Opéra Bastille du 17 septembre au 19 novembre. La jeune femme se rendra également en Normandie cet été. Elle donnera un concert à l’occasion du festival "Les heures musicales" à l’Abbaye de Lessay, dans la Manche, et un autre pour un nouveau festival, "Accolades eaux pluriels", dont elle est la marraine. "C’est à quelques kilomètres de chez moi. Je vais y faire un mini concert pour la journée inauguration le 2 août", s’enthousiasme Marie-Andrée, très attachée à sa Normandie natale.
J’aimerais qu’il y ait plus de lyrique à Cherbourg notamment. J’aimerais donner un concert dans leur théâtre car c’est un théâtre qui est fait pour ça.
Marie-Andrée Bouchard-Lesieur, artiste lyriqueFrance 3 Normandie
Pour ceux qui seraient tenté de découvrir l’Opéra, la mezzo-soprano conseille "Carmen" de Georges Bizet ou encore "La Traviata" de Verdi : "Tout le monde a les tubes en tête, pleins de films ont repris les musiques, et l’histoire est incroyable."
"Tous à l’Opéra" démarre ce samedi jusqu’à dimanche 8 mai au Théâtre de Caen. L'entrée est libre et gratuite. Au programme : des spectacles, des expositions, des ateliers et des visites.