Caen, Le Havre, Rouen, les grandes villes de la région reprennent une vie plus ou moins normale ce jeudi 9 mars, après deux jours de forte mobilisation et de grève contre la réforme des retraites. Malgré tout, les étudiants persistent, les blocages continuent dans les universités.
Université de Caen I, des oreillers et sacs de couchage jonchent le sol. Depuis lundi 6 mars, des étudiants passent leurs nuits dans le bâtiment E en signe de protestation contre la réforme des retraites.
Leur objectif est de sensibiliser et rallier un maximum d'étudiants pour se réapproprier ce "lieu de vie et d'études".
Au-delà de l'occupation permanente, d'autres étudiants grévistes renforcent les rangs en journée. Impossible par contre de chiffrer le nombre d'étudiants, il nous a été interdit de filmer à l'intérieur du bâtiment E. Depuis le mardi 7 mars, l'université est fermée administrativement.
Nous réaffirmons que l’université de Caen n’est pas fermée : elle est ouverte et des nombreuses activités, ouvertes à tous-tes, se déroulent au sein des bâtiments occupés !
Communiqué de l'Assemblée générale de l'Université de Caen
Avec ce blocage continu, les cours étaient ainsi censés s'arrêter. Mais certains professeurs dispensent à la demande de l'université, certains cours à distance malgré le droit de grève.
Pour le collectif étudiant, "l’utilisation des cours en distanciel renforce la précarisation de l’enseignement et cela se ressent sur la santé des étudiant-es. De plus l’université enfreint la loi en continuant les cours en distanciel lors d’une fermeture administrative", estime-t-il. La présidence de l'université ne souhaite pas s'exprimer pour l'instant. Des discussions se poursuivent pour tenter de débloquer la situation.
Même combat au Havre et à Rouen
Assis devant les portes, des étudiants bloquent l'accès à l'université de Mont Saint-Aignan (Seine-Maritime). Les moyens sont peu académiques, des poubelles sont placées devant l'entrée.
Certains sont assis dessus. Un peu plus loin, des professeurs se mêlent aux étudiants. Ils se préparent tous ensemble à défiler dans les rues de Rouen.
Dans le cortège, un des étudiants voit en cette réforme un risque grandissant pour les jeunes générations.
On est tout autant concernés que nos parents, si ce n'est plus. Notamment quand on apprend qu'il y a plus d'1,4 millions de jeunes qui ne sont ni en emploi, ni en études. On n'a pas envie de voir des personnes de plus en plus âgées pourvoir les emplois.
Mathéo, étudiant
Au Havre, même son de cloche. "On ne peut pas laisser passer une réforme qui précariserait encore plus les jeunes. Aujourd'hui, on observe que l'intégration dans le monde professionnel se fait plutôt vers 25 ans. Sauf qu'on nous demande de cotiser pendant 44 ans, le calcul est vite fait. On finira nos carrières encore plus tard", s'inquiète un étudiant. Quelle que soit l'université, les mobilisations se multiplient en Normandie. Et c'est aussi l'occasion de faire converger les luttes.
La précarité étudiante aussi en ligne de mire
Si les étudiants se mobilisent, ce n'est pas seulement contre la réforme des retraites. Opposition au service national universel, demande du repas à un euro pour tous et précarité étudiante sont autant de préoccupation. Et pour cause entre 2021 et 2022, leur budget a subi une hausse de près de 3% pour les frais de la vie courante.
Une augmentation qui pousse plus d'un étudiant sur deux à ne pas manger à sa faim et 85% d'entre eux à sauter un repas faute de moyen. Le logement, lui, représente 57% de leur budget, soit la dépense la plus importante. Pour leur venir en aide, des associations, comme l'AFEV, organisent des collectes de dons.
Souvent, les étudiants qui vivent seuls sont ceux qui sont le plus en situation de fragilité économique. Et aujourd'hui encore, un tiers des étudiants vit dans sa famille pendant la semaine quand sept sur dix rentrent chez leurs parents le week-end.