Témoignages : des normands nous expliquent pourquoi ils s'opposent à la réforme des retraites

Ils étaient des dizaines de milliers dans les rues de Caen (Calvados), ce mardi 31 janvier 2023, pour s'opposer à la réforme des retraites. Recul du départ à la retraite, pensions basses, pénibilité dans le travail... nous nous sommes rendus dans le cortège pour demander aux manifestants pourquoi ils défilent.

À Caen, le cortège s'est élancé aux alentours de 10h30, un drapeau à la main pour certains, des pancartes pour d'autres. Une marche, d'un bout à l'autre du centre-ville, en famille, entre collègues ou amis. Ils étaient 18 000 personnes selon la police, 28 000 selon les syndicats, à défiler, chanter et crier des slogans. Le recul de l'âge de départ à la retraite, les pensions faibles, la pénibilité au travail, nous étions au cœur du cortège pour comprendre les problématiques et inquiétudes des normands qui font grève et sont descendus dans la rue.

Laurence, 50 ans, infirmière

Laurence, 50 ans, est infirmière au CHU de Caen. Elle défile aux côtés d'une amie avec une pancarte où l'on peut lire : "la retraite avant l'arthrite !". Aujourd'hui son âge de départ à la retraite est de 58 ans pour une pension de 1 750 euros. Mais si la réforme passe, ses annuités seront décalées, elle devra travailler 3 ans de plus, c'est inconcevable pour elle :"Je travaille un week-end sur deux, 15 jours à l'avance je ne sais pas comment je serai planifiée, je fais des horaires postés, je fais des nuits sans savoir quand à l'avance". 

Christophe, 53 ans, pompier à Caen

La pénibilité, Christophe aussi la connait. Il est soldat du feu depuis l'âge de 20 ans. Avec la réforme, l'homme de 52 ans partira à la retraite à 59 ans au lieu des 55 ans prévus : "Faire des années de plus avec un métier sollicitant que ce soit du secours à la personne ou des brancardages, c'est compliqué. On se lève la nuit par un bip, physiologiquement ça a une incidence, en intervention la bouteille sur le dos on la sent de plus en plus en vieillissant". Il regrette également que les postes chez les pompiers ne soient pas adaptés pour les personnes les plus âgées : "À 59 ans je vais devoir bosser sur le terrain, on a rien d'autre à nous proposer" s'exclame-t-il ! Quand on lui demande le montant estimé de sa pension, il répond : "Je ne suis pas allé voir, je n'ose pas".

Fabien, 42 ans, informaticien

Fabien avoue également : "Je n'ai pas calculé le montant de ma pension, ça me fait peur". Cet informaticien âgé de 42 ans n'est même pas certain de pouvoir partir à la retraite à 64 ans avec la réforme : "J'ai fait des longues études pour faire ce métier, alors j'ai le temps avant d'avoir toutes mes annuités". Il est aussi dans le cortège car il ne comprend pas le choix du gouvernement de mettre en place cette réforme maintenant :"Le carburant est en moyenne à 2 euros le litre, on est dans l'après-covid, on commence à se remettre, franchement on avait pas besoin de ça".

Victor, 59 ans, couvreur

La réforme des retraites met aussi un coup dur à Victor, 59 ans. Le couvreur qui travaille dans les métiers du bâtiment depuis l'âge de 18 ans, devait s'arrêter et profiter de sa retraite à la fin de l'année :"Si cette réforme passe je prends 9 mois de plus, je vais encore passer un hiver à travailler dehors avec le métier que je fais". Sa pension est estimée à 1 575 euros pour sa carrière longue. 

Virginie, 50 ans, accompagnante des élèves en situation de handicap (AESH)

De son côté, Virginie 50 ans, est loin d'avoir fait une carrière longue : "J'ai élevé mes enfants jusqu'à ce qu'ils soient grands, j'ai donc peu travaillé et ce n'était pas un choix". Elle est aujourd'hui accompagnante des élèves en situation de handicap (AESH) dans les écoles du Calvados: "Je suis payée 850 euros par mois. Je n'aurais jamais pu atteindre les 41 trimestres et là c'est encore moins le cas avec les 43 trimestres que le gouvernement nous demande. Et vous savez, je ne vais rien toucher, même pas 200 euros. Je vais travailler plus pour toucher 200 euros". En effet Virginie devra aller jusqu'à 67 ans pour toucher 200 euros avec cette réforme : "Je travaille avec des enfants en difficulté, vous m'imaginez faire ça à 67 ans?" s'esclaffe-t-elle.

Isabelle, 54 ans, professeur des écoles

A 54 ans, Isabelle travaille aussi avec des enfants en école primaire : "Il faut arrêter, on est tous les jours avec le bruit, les enfants qui demandent beaucoup d'énergie. Déjà à mon âge, il y a un décalage avec eux alors à 64 ans vous imaginez que ça va le faire?". Dans 8 ans, elle doit partir à la retraite avec le système actuel mais avec la réforme, elle devra faire 2 ans de plus pour toucher ses 2 000 euros de pension : "Il faut continuer la lutte, on ne baisse pas les bras, on espère vraiment partir à 62 ans".

Marie, 58 ans, secrétaire dans la fonction publique 

Marie, secrétaire dans la fonction publique, est âgée de 58 ans. Il ne lui reste que 3 ans à faire : "le nouveau système m'obligerait à faire un an de plus pour toucher ma pension à taux plein soit 2 000 euros. D'accord c'est qu' un an de plus, mais je l'attendais moi ma retraite ! C'est pas une question financière, je n'ai pas à me plaindre, mais je pense aux plus jeunes, eux vont galérer pour avoir une retraite à un âge décent, c'est injuste, c'est surtout pour ça que je suis là".

Des normands qui continueront à se battre. Et même si Elisabeth Borne a annoncé dimanche 29 janvier que "le report de l'âge de départ à 64 ans n'est plus négociable", ils seront tous à nouveau dans la rue lors de la prochaine mobilisation.



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