La Normandie possède un vocabulaire typique dont les habitants de la région sont fiers. Entre "s'empommer", "pouf-pouf" et "boujou", découvrez les termes et expressions locales qui font l'identité des Normands, mais qui ne sont pas utilisées, ni comprises ailleurs en France.
Est-ce qu'il fait rien (très) beau chez vous aujourd'hui ? Qu'est ce que vous bouinez (glandez) ? Il vous reste du blutack (de la patafix) ? Appréhendez-vous l'arrivée d'horsains (touristes parisiens) cet été ?
Si vous avez compris toutes ces phrases sans leur traduction courante entre parenthèses, vous habitez sans doute en Normandie.
Le fameux "boujou"
La région est riche en expressions et se distingue régulièrement du reste de la France par son dialecte et son vocabulaire local.
"En France, les gens adorent ça. Ils sont à la recherche d'un lien communautaire, d'un ancrage identitaire. On le voit avec parfois la création de t-shirt, porte-clés qui affichent des mots locaux. Les gens sont fiers de leur langue, c'est le cas en Normandie" détaille Mathieu Avanzi, directeur du centre de dialectologie et d’étude du français région, qui partage ces spécificités régionales dans des cartes sur son compte instagram françaisdenosregions.
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Parmi les mots les plus usités en Normandie, on retrouve "boujou", interjection pour se dire bonjour, au revoir et bisous. "Se boujouter" est aussi employé pour désigner l'action de se dire bonjour en s'embrassant sur les joues, plus communément appelé "se faire la bise" dans le reste de la France.
Certains termes sont très liés à l'histoire de la Normandie. "Dans la région, on retrouve beaucoup de mots pour désigner tout ce qui touche à la pomme" explique Mathieu Avanzi. Notamment "s'empommer", verbe très précis qui désigne l'action de s'étouffer avec une pomme... mais seulement lorsque l'on parle d'une vache ou d'un cheval.
Des expressions de l'enfance
"On remarque beaucoup de spécificités de langage dans les jeux de quand on était petit" indique Mathieu Avanzi. Lors du fameux "jeu du chat" dans les cours de récréation, les habitants du Calvados, du sud Manche, de l'Orne et de la Seine-Maritime disent "mouille" pour demander une pause. Une exception par rapport au reste de la France, où la majorité des écoliers demandent "pouce".
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Pour désigner quelqu'un au hasard lors d'un jeu, les Normands s'adonnent au "pouf-pouf" et non à "trou-trou" comme c'est le cas en Bretagne ou à "plouf-plouf" dans la majeure partie de l'Hexagone.
"Il y a aussi ce qu'on peut appeler les "mots tabous de l'enfance" qui se nomment de manière très différente selon les régions". Pour évoquer une diarhée, des disparités existent même en Normandie.
Dans le sud de la région, on parle de "déripette", alors que sur le littoral nord c'est une "cliche".
Le débat Tancarville ou étend-à-linge
Même au sein de la Normandie, plusieurs mots typiques sont utilisés pour désigner un même objet ou action. "Le grand ouest de la France est riche en matière d'expressions et dialectes. Et la Normandie a la chance d'être une région très documentée avec des ouvrages qui témoignent du vocabulaire utilisé à l'époque. Les mots et expressions ont en partie continué à vivre jusqu'aujourd'hui" détaille Mathieu Avanzi, auteur de plusieurs ouvrages sur les langues régionales.
Dans leur quotidien, la plupart des Normands sont aussi amenés à passer la "toile" pour nettoyer leur sol à l'aide d'une serpillère. Alors que certains Ornais utilisent "l'emballage".
Même différenciation normande pour l'étendoir, nommé "étend-à-linge" dans le nord de la région et "tancarville" dans le sud. Ce dernier mot tient d'ailleurs "son nom du pont de Tancarville située en Seine-Maritime, qui a inspiré la Société Dupré pour désigner l'objet sur lequel on étend son linge dans les années 60" rappelle Mathieu Avanzi.
Autre sujet à débat : que dites-vous lorsque vous fermez ou ouvrez une porte ? Une majorité d'habitants s'accordent "à clencher" la porte, quand une poignée d'entre eux la "barre".
Mais s'il y a bien une chose sur laquelle tous les Normands s'accordent, c'est sur une viennoiserie. Il n'est pas ici question de pain au chocolat ou chocolatine. Mais bien de "pépito", l'iconique viennoiserie fourrée à la crème et aux pépites de chocolat nommée partout ailleurs "pain suisse".