La Covid s'impose dans les cabinets des médecins :" On n'a pas d'autre choix que de prescrire des tests"

En Normandie, trois des cinq départements sont désormais en "rouge" : le virus y circule activement. Et bouleverse quelque peu l'activité des médecins généralistes. 

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Pour Hervé Jean, médecin généraliste à Mondeville, dans l'agglomération caennaise, le mois de septembre est toujours "sportif". Avec la rentrée, "les gens s'écoutent un peu plus, il y a aussi toutes les demandes de certificats d'aptitude aux activités sportives et beaucoup en profitent pour mettre les vaccins à jour". Mais en cette rentrée 2020, un encombrant visiteur, ou du moins son ombre, s'est invité dans les salles d'attente. "L'activité est toujours débordante, comme un mois de septembre habituel, mais les motifs de consultation ont évolué avec un très fort pourcentage lié à la pathologie infectieuse".

Chez SOS Médecin, à Caen, Jérémie Brissard estime pour le moment ne pas être "submergé" mais constate "une surfréquentation de nos cabinets de l'ordre de 30 % par rapport à un mois de septembre classique." A première vue, la classique rhinopharyngite, encore appelée "gros rhume" par le commun des mortels, monopolise une bonne partie de l'activité. "Pour l'instant, on a surtout l'impression qu'on rencontre des patients qui nous consultent pour des maladies saisonnières avec des symptômes pour lesquels ils n'auraient pas consulté d'habitude. Mais le fait qu'il y ait une épidémie en cours amène des problématiques, des questionnements qu'ils ne se seraient pas posés en temps normal."
 
Ces questionnements, les médecins se les posent également, face à un nez qui coule. "Cliniquement, on n'a pas la possibilité de faire la part des choses entre des cas covid et non covid, on n'a pas les moyens de déceler la présence du virus par un simple examen", souligne Hervé Jean. "On a compris au fur et à mesure face à ce virus qu'on avait des formes assymptomatiques et des formes qui amenaient des patients jusqu'en réanimation", raconte Jérémie Brissard, "Mais entre les deux, on a de tout et faire la distinction entre les différents symptômes est parfois difficile."

"Ça devient exponentiel"

Alors, face à une goutte au nez, une gorge irritée, "on n'a pas d'autre choix que de prescrire des tests PCR", indique le docteur Hervé Jean, qui estime en prescrire, en moyenne ces derniers temps, une dizaine par jour. "Ça devient exponentiel", confie le généraliste. Et en vient presque à s'excuser auprès d'autres acteurs du système de santé. "Ce sont les laboratoires qui sont débordés, qui se prennent en pleine figure cette vague épidémique et qui ont un mal de chien à gérer les flux. Ils n'ont pas le personnel pour absorber ce type de phénomène qui survient tous les 80 ans. Il y a un manque de moyen au niveau national mais notre système n'est pas défaillant. On a un système adapté aux situations normales. Là, il s'agit d'une situation extraordinaire."Comme Jacques Battistoni, président du syndicat MG France, les médecins avec lesquels nous avons pu échanger se prononcent en faveur d'une "priorisation" des tests, une priorisation en théorie effective depuis déjà une semaine, mais que les professionnels de santé continuent aujourd'hui de réclamer. "Il semble naturel que cette priorisation soit faite pour les gens qui ont une ordonnance (après avoir présenté des symptômes) ou des personnes qui ont des maladies qui les exposent particulièrement à des formes graves du coronavirus", déclare Jérémie Brissard, de SOS Médecin. "Au début du mois de septembre, beaucoup de gens nous ont demandé des ordonnances de tests sans avoir de symptômes. C'était un peu compliqué de leur refuser", reconnait Alexandra Tsagouria, médecin à Sainte-Honorine-du-Fay, "Maintenant, on trie." 

Une douzaine de patients positifs depuis une semaine

Et malgré le tri, la tendance à la hausse se confirme. "Depuis une semaine, on commence à voir beaucoup de cas positif, ce qu'on n'avait pas eu au moment du confinement", observe la généraliste, "Pendant le confinement, je n'ai eu que deux patients positifs. Là, j'en suis à une douzaine." Et d'évoquer un profil type : des jeunes, des réunions familiales ou amicales. Son associée, Anémone Delearde, n'a eu pour sa part "que deux cas avérés depuis la rentrée mais j'ai un patient de 59 ans sans antécédent qui se trouve en réanimation et dont l'état s'est degradé en à peine quatre jours."
 
Comme un rappel au milieu des nombreux cas dits assymptomatiques. A Mondeville, Hervé Jean, lui, a reçu ce matin des résultats positifs pour trois de ses patients. "Il y a beaucoup de cas non dangereux, peu problématiques, qui rentrent dans l'ordre tout seul", commente le généraliste, "Mais compte tenu de la contagiosité, il ne faut pas que les personnes positives aillent travailler. On teste pour que l'épidémie se répande raisonnablement, pour éviter la saturation du système de santé.

Winter is coming

Si à Sainte-Honorine-du-Fay, Anémone Delaerde explique être "déjà complet tous les jours, on essaie d'en ajouter où on peut, le midi, on règle certains cas par téléphone",  elle redoute de devoir "jouer à Tetris" l'hiver venu. "Aujourd'hui, cet afflux est supportable", juge Jérémie Brissard, à SOS Médecin, mais prévient : "ça ne serait peut-être pas aussi aisé à gérer si on rencontrait un afflux massif de patients touchés par une autre épidémie. C'est ça qui nous préoccupe."

Cette épidémie tant redoutée par les professionnels de santé, c'est la grippe. Comme nombre de ses confrères, Hervé Jean plaide cette année pour "une couverture vaccinale grandement majorée de manière à ce que le système de soin ne soit pas saturé". Pour Jérémie Brissard, il vaut mieux "imaginer que ce ne sera pas simple et essayer de s'organiser dès maintenant pour trouver une organisation optimale afin de gérer cet hiver plutôt que de ne pas y penser. On va envisager les scénarios les plus difficiles et si ça passe très bien, on sera tous content."
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