Depuis un an, les cantines scolaires de Ouistreham ne proposent plus de repas de substitution aux enfants ne mangeant pas de porc. Saisi par la FCPE, le tribunal administratif a annulé cette décision le 14 décembre. Le maire continue de défendre le menu unique au nom, selon lui, de la laïcité.
A Ouistreham, certains écoliers devront peut-être une nouvelle fois se passer de viande jeudi prochain à la cantine. Au menu ce 10 janvier, du "rôti de porc au jus". Depuis un an, les repas de substitution, notamment pour les enfants ne mangeant pas de cochon, ont disparu. Ainsi en a décidé le maire (LR) de la commune. Mais le 14 décembre dernier, le tribunal administratif de Caen, saisi par la FCPE (Fédération des conseils de parents d’élèves) du Calvados, a annulé cette décision.
En principe, Romain Bail peut contester ce jugement devant la cour administrative d'appel et dispose d'un délai de deux mois pour faire cette démarche. Mais ce recours n'est pas suspensif. Le maire de Ouistreham nous a indiqué ce mardi que "la municipalité ne souhaite pas donner suite à (notre) sollicitation et réaffirme sa volonté de défendre avant tout l'intérêt général."
Le communiqué, publié peu après la décision rendue par le tribunal administratif, précisait le point de vue (et l'intention ?) de l'intéressé: "La majorité municipale ne souhaite pas différencier la composition des repas en fonction d'un interdit religieux ou de modes du moment (vegan, sans gluten, etc.) qui relève de la sphère privée et familiale, en application du principe de laïcité et de la liberté de gestion de la collectivité. "
"un dévoiement de la laïcité" pour la FCPE
Si le jugement du tribunal administratif s'appuie dans son jugement sur un vice de forme (la décision de supprimer les menus de substitution ne découlant pas d'une délibération du conseil municipal), le principe de laïcité, invoqué par le maire, a été au coeur des débats. Pour la FCPE, l'interprétation de Romain Bail est "un dévoiement de la laïcité". A l'audience, le rapporteur public avait pour sa part indiqué que "la laïcité créé à l'Etat des obligations à l'égard des citoyens, la reconnaissance notamment de la diversité".Carole Lecomte, de la FCPE du Calvados, se dit aujourd'hui "très étonnée qu'un maire, un élu de la République, ne mette pas en oeuvre une décision de la justice."L'association de parents d'élèves envisage de se faire assister d'un avocat et "ira jusqu'au bout pour faire appliquer cette décision" au nom de "l'égal accès des enfants à la restauration collective". A Ouistreham, une vingtaine d'écoliers sont concernés. "Les enfants se demandent pourquoi untel et untel ne mange plus que le légume. C'est plus compliqué à comprendre pour les enfants. Ça crée des différences et des questionnements qui ne sont pas faciles à expliquer pour ces enfants, déplore Laetitia Rizzotto, de la FPCE.
Romain Bail n'est pas le premier à décider de supprimer les repas de substitution dans la cantine de sa commune. En 2015, à l’initiative du maire (LR) Gilles Platret, le conseil municipal de Chalon-sur-Saône avait voté le retour au menu unique. Le 23 octobre dernier, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé cet arrêté municipal. Le maire, désavoué par la justice, a rapidement annoncé son intention de porter l'affaire devant le Conseil d'Etat et le Conseil constitutionnel.