Une centaine de vaches ont été abattues dans le Bessin et près d’Evrecy dans le Calvados ces derniers jours après la découverte de cas de tuberculose bovine dans des élevages. On fait le point sur cette maladie qui avait fait des ravages au siècle dernier et qui fait son retour en Normandie.
Dans la ferme de Nicolas Fontaine, dans le Bessin (Calvados), un cas de tuberculose bovine a été détecté au sein de son troupeau et la sanction est tombée : ses 170 vaches ont été abattues mercredi 19 mai 2021. "C’est 15 ans de travail, de ma vie qu’on efface… Je n’ai pas les mots", déplore l’éleveur. Tel est le protocole appliqué aujourd’hui par les autorités sanitaires pour éviter à la maladie d’évoluer "à bas bruit", explique Christophe Martinet, directeur de la direction départementale de la protection des populations 14 : dès qu’un cas de tuberculose bovine est avéré, c’est tout le troupeau qui est envoyé à l’abattoir.
Ce cas détecté dans la ferme du Bessin est le septième dans le Calvados depuis le début de l’année 2021. Récemment, une ferme située près d’Evrecy a dû abattre plus de 500 vaches. En février 2021, 1000 bovins avait subi le même sort. En Normandie, c’est une reprise de la maladie qui avait fait des ravages au siècle dernier. Mais quelle est cette bactérie qui fait son retour dans la région ?
Qu’est-ce que la tuberculose bovine ?
Selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), la tuberculose bovine est une zoonose, c’est-à-dire une maladie infectieuse transmissible à l'homme, causée principalement par la bactérie Mycobacterium bovis. Les contaminations ont lieu par voie directe (aérosols), mais aussi indirecte car la bactérie peut survivre pendant plusieurs mois dans l’environnement, toujours selon l'agence.
La bactérie peut infecter de nombreuses espèces domestiques et sauvages, particulièrement les bovins et les cervidés, mais aussi les sangliers, les blaireaux ou renards. Ce serait d’ailleurs via les animaux sauvages tels que le blaireau ou le sanglier que la bactérie serait importée dans les élevages, selon un rapport rendu en février 2021 par l’Anses après que la direction générale de l’alimentation (DGAL) a fait une saisine auprès d’elle sur le rôle du renard dans la transmission de la tuberculose bovine.
Chez les bovins, l’infection est souvent invisible, les symptômes cliniques n’apparaissant que tardivement au cours d’une évolution qui est en général très longue. "Il s'agit d'une maladie qui évolue à bas bruit dans l'animal, c'est-à-dire qu'elle n'est pas visible sur les animaux vivants. Si on ne tuait que les animaux identifiés positifs, on en laisserait en cours d'incubation et on ne réglerait pas les problèmes de l'exploitation", expliquait, en 2018, Etienne Gavart, directeur du groupement de défense sanitaire du Calvados.
C’est la raison pour laquelle le protocole des autorités sanitaires est si stricte.
L’abattage total c’est ce qui permet d’éviter d’avoir des animaux qui restent malades et d’éviter de laisser la maladie évoluer à bas bruit dans le cheptel.
En cas d’épidémie, la France risquerait de ne plus pouvoir exporter ses bovins dans le reste de l’Union Européenne. L’enjeu est davantage économique que sanitaire car bien que la maladie soit transmissible à l’homme, elle l’est dans de très rares cas (à peine de 2% des causes de tuberculose).
Quelle situation en Normandie ?
"On a clairement une résurgence des cas. Alors, ce n’est pas non plus un phénomène hyper contagieux où il y a des dizaines de cas, mais on a une recrudescence après une période de calme de pratiquement 30 ans", estime Pierre-Hugues Pitel, directeur du pôle santé et recherche du laboratoire LABEO. D’abord dans la Suisse Normande, puis dans la plaine de Caen et désormais dans le Bessin, le nombre de cas de tuberculose bovine augmente fortement et les contrôles vétérinaires se multiplient.
C'est dans le Calvados, en 2013 que le premier bovin a été touché par la maladie. En 2018, cinq cas de tuberculose bovine ont été détectés en Normandie entraînant l’abattage de 600 animaux dans le Calvados et l’Orne. Cette année 2021 n’a pas été épargnée : 1000 bovins ont été abattus en février pour endiguer la contamination. S’ajoute en ce mois de mai, les 170 vaches de la ferme du Bessin et 500 bêtes de celle d’Evrecy.
Selon les autorités, si le protocole est nécessaire pour éviter toute épidémie, l’abattage du troupeau en contact avec les cas positifs à la tuberculose est un drame pour les éleveurs. Bien qu’indemnisés il leur faut ensuite des mois pour reconstituer leur cheptel et le manque à gagner est important. Nicolas Fontaine, de la ferme du Bessin a d’ailleurs pris sa décision : il va vendre son exploitation.