Ils sont trop nombreux et trop bruyants et les riverains crient leur ras-le-bol. Des corbeaux empoisonnent la vie des habitants de certains quartiers à Vire Normandie (Calvados). Chaque année, à la même époque, les volatiles se retrouvent dans les grands arbres pour se reproduire. Des amours, plutôt bruyantes, qui exaspèrent la population.
Le scénario se reproduit chaque année à la même période. Des dizaines de corbeaux viennent ou plutôt reviennent, à la saison des amours, nicher dans les mêmes arbres. Quand ces arbres sont proches d'habitations, cela peut vite devenir un enfer pour les riverains. A Vire Normandie (Calvados), des habitants sont excédés par les nuisances sonores provoquées par cette concentration de corbeaux. Certains quartiers du centre-ville sont particulièrement impactés par ces nuisances.
Ils ont vraiment leurs habitudes. Ils font la navette tous les jours au-dessus de nos têtes entre le château et le parc. Parfois, ils sont très nombreux et cela fait vraiment beaucoup de bruit. Les campagnes d'effarouchement ne font rien. Ils ont peur deux minutes et reviennent.
MichelUn riverain
Depuis 2011, la municipalité procède chaque année à des campagnes d'effarouchement avec des fusées détonantes. Depuis deux ans, ces fusées sont interdites. La ville envisage de faire voler un drone pour effrayer les oiseaux indésirables. "On a enlevé une quarantaine de nids cette année sur le site de la place Nationale, avec plus de 200 œufs à l'intérieur ", précise Christian Cochin, le responsable des Espaces Verts de la ville, pour qui l'éloignement des corbeaux est un combat au long cours.
Malgré des campagnes d'effarouchement sur le territoire communal, les corvidés semblent avoir une prédilection pour la cité viroise. Plus sérieusement, ces oiseaux qui passent l'année sur le même territoire sont plutôt sédentaires et reviennent au printemps se reproduire dans un endroit familier. Il s'agit de grands arbres, où ils ont construit leurs nids à la force du bec. Des arbres, suffisamment grands, pour accueillir un maximum de congénères.
On a affaire à un phénomène banal. C'est le printemps, les oiseaux se reproduisent. Ils se regroupent au même endroit pour nicher. Ils font beaucoup de bruit parce qu'ils sont nombreux mais aussi, parce que, pendant la période des amours, ils entament tout un dialogue entre eux. Ils sont très bavards.
Jean ColletteMembre du Groupe Ornithologique Normand
La mauvaise image du corbeau
Son plumage noir, avec des reflets bleutés, n'est pas très populaire. Le corbeau freux traine une image plutôt négative auprès du grand public. La faute, notamment à Alfred Hitchcock, qui lui a attribué le rôle du méchant dans son film " Les oiseaux". Plus récemment, son rôle sombre dans la série Game of Thrones, n'a pas arrangé son portrait d'oiseau négatif. Dans la vraie vie, le corbeau est pourtant un oiseau plutôt pacifique. Ce n'est pas un prédateur, même s'il est aujourd'hui classé dans la catégorie des Espèces susceptibles d'Occasionner des Dégâts (ESOD).
Dans l'inconscient collectif, le film d'Alfred Hitchcock a fait des ravages. C'est dommage, parce que le corbeau freux ne présente aucun problème. On a diabolisé l'espèce, alors que c'est un oiseau plutôt farouche qui a peur de l'homme. Ce n'est pas un prédateur. Il mange des graines ou des insectes.
Richard GrègeAdministrateur de la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) de Normandie
Oiseau sédentaire, le corbeau freux est une espèce qui se reproduit dans son habitat naturel. Il vit en colonies et se contente la plupart du temps de manger des insectes et des graines. C'est à ce titre, qu'il est dans la ligne de mire des agriculteurs.
Véritable "bête noire" des paysans au moment des semis, les corbeaux font l'objet de campagnes de tir. Des campagnes encadrées par des autorisations préfectorales qui se déroulent entre la date de clôture générale de la chasse et le 31 mars, mais qui peuvent être prolongées jusqu'au 10 juin.
Une population en léger déclin
En Normandie, la population de corbeaux freux est en léger déclin depuis des années. Plusieurs raisons expliquent cette baisse de la population des corvidés. Regroupés en colonies dans les haies ou de vieux arbres pour se reproduire, les corbeaux sont plus vulnérables aux campagnes de tirs. Beaucoup sont aussi victimes des pesticides.